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‘Œuvre plus grande que ses plus grandes symphonies, plus grande que tout ce qu’il a fait, supérieure en conséquence à tout ce que l’art musical a jamais produit’
(Berlioz à l’occasion d’une exécution par Mme Massart vers 1860 de la sonate pour piano de Beethoven dite Appassionata (op. 57, en fa mineur), texte reproduit dans À travers chants, chapitre intitulé ‘Les temps sont proches’.)
C’est une circonstance à première vue surprenante que le compositeur que Berlioz considérait comme le plus grand de tous, et dont la musique eut une influence si considérable sur la sienne, ne soit venu qu’assez tard à la connaissance de Berlioz pendant sa période de formation musicale: Beethoven était en fait le dernier venu parmi les grandes influences musicales des années d’apprentissage à Paris. La découverte de Gluck a lieu presque dès l’arrivée de Berlioz à Paris fin 1821; Gluck est bientôt suivi de près par Spontini l’année suivante, puis par Weber en 1824-5. La révélation de Shakespeare suit un peu plus tard avec les représentations à l’Odéon en 1827 par une troupe d’acteurs anglais. Berlioz écrira plus tard à propos du milieu des années 1820: ‘Beethoven, dont j’avais lu deux symphonies et entendu un andante seulement, m’apparaissait bien au loin comme un soleil, mais comme un soleil obscurci par d’épais nuages’ (Mémoires chapitre 14).
Le moment précis de la révélation n’est pas établi de façon certaine, mais doit se situer vers la fin de 1827 et au tout début de 1828 (les Mémoires ne mentionnent pas d’évènement précis). Avant cette date la correspondance du compositeur ne trahit aucune connaissance particulière de Beethoven. Mais dans une lettre à sa sœur Nancy datée du 10 janvier 1828 (Correspondance générale no. 79, ci-après abrégé CG), il écrit à propos de Thomas Moore et de son sentiment pour la musique ‘c’est quand on a entendu les sublimes compositions instrumentales de l’aigle Beethoven qu’on voit la justesse de l’exclamation du poète: “O divine musique, le langage impuissant et faible se retire devant ta magie.”’ Ceci suppose un véritable choc survenu à une date récente: il s’agirait peut-être d’un concert au Conservatoire le 30 novembre 1827, où fut jouée une ouverture de Beethoven (on ne sait laquelle). En tout état de cause l’évènement précède le début de la célèbre série de concerts donnée à partir de mars 1828 par la Société des Cconcerts du Conservatoire qui venait d’être fondée.
Les raisons du retard relatif de Berlioz dans sa découverte de Beethoven semblent évidentes. Gluck et Spontini étaient essentiellement compositeurs d’opéras: l’Opéra était à l’époque la première institution musicale de France et les représentations sur la scène ont tout de suite initié Berlioz à leurs œuvres. C’est également au théâtre (l’Odéon) qu’il fait la découverte de Weber, dont le génie instrumental s’était manifesté, non dans son œuvre proprement symphonique, mais dans ses grands opéras (le Freischütz, Euryanthe, Obéron). Le domaine de Beethoven, par contre, était avant tout la musique instrumentale et pour orchestre, exception faite de son unique opéra Fidelio et de quelques œuvres avec chœur. Berlioz de son côté n’était pas pianiste, et dépendait par conséquent d’autres pour l’exécution de toute musique pour le piano, tels son ami Ferdinand Hiller qui va l’aider dans la découverte de l’œuvre pianistique de Beethoven en 1829 (CG nos. 117, 138, 148), et Camille Moke on 1830 (CG nos. 168, 169, 173, 176). Il en sera de même par la suite: Berlioz aura souvent l’occasion de vanter plus tard le rôle de Liszt dans la diffusion de l’œuvre pour piano de Beethoven (par exemple CG nos. 622, 660, 992; Critique Musicale tome II, p. 474; tome III, pages 69-71, 129f.). L’une des joies de Berlioz dans les années 1860 sera d’entendre son amie Mme Massart jouer Beethoven au piano (CG nos. 2766, 2832, 2944, 2985, 3157). Berlioz ne jouait pas non plus d’instrument à cordes, d’où également un retard initial dans sa connaissance de la musique de chambre de Beethoven.
Il fallait donc des circonstances particulières pour initier le public parisien à la musique de Beethoven, et le mérite en revient en premier lieu à François Habeneck, violoniste et chef d’orchestre (1781-1849). La rivalité qui se développera par la suite entre Berlioz et lui est bien connue grâce aux Mémoires (par exemple le récit de la première exécution du Requiem en 1837). Mais Berlioz rendra toujours hommage au rôle de pionnier de Habeneck (Mémoires chapitre 20):
Les coups de tonnerre se succèdent quelquefois dans la vie de l’artiste, aussi rapidement que dans ces grandes tempêtes, où les nues gorgées de fluide électrique semblent se renvoyer la foudre et souffler l’ouragan.
Je venais d’apercevoir en deux apparitions Shakespeare et Weber; aussitôt, à un autre point de l’horizon, je vis se lever l’immense Beethoven. La secousse que j’en reçus fut presque comparable à celle que m’avait donnée Shakespeare. Il m’ouvrait un monde nouveau en musique, comme le poète m’avait dévoilé un nouvel univers en poésie.
La société des concerts du Conservatoire venait de se former, sous la direction active et passionnée d’Habeneck. Malgré les graves erreurs de cet artiste et ses négligences à l’égard du grand maître qu’il adorait, il faut reconnaître ses bonnes intentions, son habileté même, et lui rendre la justice de dire qu’à lui seul est due la glorieuse popularisation des œuvres de Beethoven à Paris. Pour parvenir à fonder la belle institution célèbre aujourd’hui dans le monde civilisé tout entier, il eut bien des efforts à faire; il eut à échauffer de son ardeur un grand nombre de musiciens dont l’indifférence devenait hostile, quand on leur faisait envisager dans l’avenir de nombreuses répétitions et des travaux aussi fatigants que peu lucratifs, pour parvenir à une bonne exécution de ces œuvres alors connues seulement par leurs excentriques difficultés.
Il eut à lutter aussi, et ce ne fut pas la moindre de ses peines, contre l’opposition sourde, le blâme plus ou moins déguisé, l’ironie et les réticences des compositeurs français et italiens, fort peu ravis de voir ériger un temple à un Allemand dont ils considéraient les compositions comme des monstruosités, redoutables néanmoins pour eux et leur école. Que d’abominables sottises j’ai entendu dire aux uns et aux autres sur ces merveilles de savoir et d’inspiration!
Bien avant 1828 Habeneck s’était donné pour mission de faire connaître la musique de Beethoven. De 1806 à 1815 il dirige un orchestre d’étudiants du Conservatoire dans une série d’Exercices publics qui lui donne l’occasion de jouer les trois premières symphonies. Il poursuit son rôle d’apôtre après avoir assumé en 1818 la direction des Concerts Spirituels de l’Opéra. Mais le tournant vient avec la fondation de la Société des concerts du Conservatoire par décret ministériel le 15 février 1828; elle donne son premier concert le mois suivant (9 mars) avec la 3ème symphonie de Beethoven comme pièce de résistance. La principale raison d’être de la société était l’exécution d’œuvres de compositeurs allemands, Haydn, Weber et surtout Beethoven. De nombreux concerts suivront au cours des années à venir. Ils deviennent rapidement célèbres dans toute l’Europe musicale par la haute qualité de leurs exécutions de Beethoven, et les visiteurs étrangers affluent à Paris pour les entendre.
Tard venu à Beethoven, Berlioz n’en saisit pas moins très rapidement la portée de ce qu’il entend. On peut mesurer l’étendue du choc de Beethoven sur Berlioz à travers la correspondance du compositeur: les mentions de Beethoven se multiplient rapidement et sont particulièrement fréquentes en 1829 et 1830. D’emblée l’envergure de Beethoven s’impose à lui: ‘immense’, ‘colossal’, ‘sublime’, ‘un géant’, ‘un Titan’, tels sont les termes qui à partir de ce moment reviennent constamment sous sa plume; les œuvres de Beethoven seront toujours pour lui des ‘merveilles’. Les grands adagios de Beethoven l’émeuvent particulièrement, et évoquent pour lui l’image d’un aigle qui plane majestueusement dans les hauteurs. Dans une lettre à son père il écrit ‘ce n’est plus de la musique, mais un art nouveau’ (CG no. 107; 20 décembre 1828 [retraduction d’un original perdu]). Fidèle à sa méthode, il entreprend l’étude des partitions de Beethoven et les connaît bientôt à fond: à la longue Berlioz a dû connaître toutes les œuvres publiées de Beethoven. Weber a sans doute surpassé Beethoven dans la dexterité et l’invention de son écriture pour orchestre: mais pour Berlioz Beethoven sera toujours la pierre de touche de toute musique instrumentale. Dans le Traité d’instrumentation de 1844 Beethoven, comme il se doit, est cité aussi fréquemment que Gluck, et les citations purement instrumentales dépassent en nombre celles de tout autre compositeur. Le verdict de Berlioz sur les symphonies de Beethoven se résume dans cette appréciation à son ami Auguste Morel (CG no. 2596; 2 mars 1862):
En fait de symphonies, Mozart en écrivit 17 dont 3 sont belles et encore… Le bon Haydn seul a fait une grande quantité de jolies choses en ce genre. Beethoven a fait sept chefs-d’œuvre mais Beethoven n’est pas un homme. Et quand on n’est qu’un homme il ne faut pas trancher du Dieu.
Berlioz comprit aussi très vite l’importance toute particulière de la musique de chambre et de piano de Beethoven. Son ami Ferdinand Hiller l’initie à la musique de piano en 1829, et la même année Berlioz entend pour la première fois les derniers quatuors, joués par un groupe d’instrumentistes mené par le violoniste Baillot (maître de Habeneck, et premier violon à l’Opéra). Une lettre à sa sœur Nancy du 29 mars 1929 (CG no. 120) fait part de l’énorme impression que fit sur lui le quatuor en ut dièse mineur (op. 131) à l’un de ces concerts (le quatuor en fa op. 135 faisait aussi partie du programme; voyez également Critique Musicale I p. 55-57). Mais si le public parisien reconnaît assez rapidement la grandeur du Beethoven des symphonies, il reste longtemps plus réticent envers sa musique de chambre. Par la suite Berlioz aura souvent l’occasion d’insister sur ce fait: encore plus que dans les symphonies, c’était dans la musique de chambre et pour piano que Beethoven s’était élevé le plus haut (par exemple Critique Musicale I, pages 136-8 [en 1834], III, pages 33-36, 67-71 [en 1837]). Pendant toute sa carrière, au cours de ses voyages à l’étranger, il est toujours à l’affût des meilleurs interprètes de cette musique (par exemple Mémoires, Premier voyage en Allemagne, 6ème lettre: le quatuor Müller à Brunswick; Premier voyage en Allemagne, 10ème lettre: Anton Bohrer et sa famille à Hanovre; Second voyage en Allemagne, 2ème lettre: le quatuor Mayseder à Vienne). Pendant son séjour à Londres en 1851 en tant que juge des instruments de musique à la Grande Exposition Berlioz a la chance de loger au 27 Queen Anne Street: les séances de la Beethoven Quartet Society avaient lieu à cette adresse et Berlioz n’avait qu’a laisser sa porte ouverte pour entendre la musique. Dans ses dernières années à Paris il saisit souvent l’occasion d’aller écouter des concerts de musique de chambre de Beethoven (CG nos. 2877, 3001), et Mme Massart le régale avec les sonates pour piano.
(Voyez aussi les Souvenirs d’Ernest Legouvé dans lesquels il évoque plusieurs fois l’admiration de Berlioz pour Beethoven, notamment les §§IV, VI et IX)
Berlioz ne tarde pas à se considérer l’un des principaux défenseurs de Beethoven en France, par opposition à la vieille école qui maintient son hostilité envers la musique nouvelle. Il raconte par example sa tentative de convaincre son maître Lesueur lors d’une exécution de la 5ème symphonie au Conservatoire; mais au grand regret de Berlioz, Lesueur, d’abord bouleversé, se ressaisit ensuite et préfère garder ses distances (Mémoires chapitre 20). Ne pas comprendre Beethoven et lui rester rebelle est pour Berlioz un crime de lèse-majesté (par exemple Mémoires chapitre 46). Mais dans la pratique Beethoven avait moins besoin de défenseurs que Gluck et Spontini, premières idoles de Berlioz: ces derniers appartenaient à l’ancienne école et pouvaient facilement passer pour démodés en comparaison avec les maîtres modernes qu’étaient Beethoven et Weber. Dès avant la découverte de Beethoven par Berlioz il existait déjà en Europe, du moins en Allemagne et en France, un groupe de fervents beethovéniens qui ne cessait de grandir: Habeneck en est un exemple. A partir de 1828 les principales œuvres symphoniques de Beethoven sont exécutées régulièrement à Paris par un orchestre reconnu à l’époque comme le meilleur en Europe. La musique de chambre et pour piano attire certes un public plus restreint, mais a cependant ses défenseurs à Paris; elle coûte aussi moins cher à faire exécuter. De 1828 à 1830 Berlioz assiste à nombre de ces concerts, tant symphoniques que de musique de chambre, et à partir de 1833 il renoue avec ses habitudes après son retour d’Italie.
Le rôle de Berlioz dans la propagation de l’œuvre de Beethoven va par conséquent consister d’abord non dans l’exécution de musique sous sa propre direction mais dans le travail de critique musical. Dès 1829 il publie une biographie de Beethoven en trois livraisons, la première des esquisses biographiques qu’il va consacrer aux compositeurs qu’il admire particulièrement (Critique Musicale I, pages 47-61); Gluck et Spontini ne viendront que plus tard. La même année il écrit un article pour une revue allemande dans lequel il présente la nouvelle Société des concerts du Conservatoire et souligne la portée de sa création (Critique Musicale I, pages 41-5). Après son retour d’Italie il inaugure à partir de 1833 la série d’études de fond des symphonies de Beethoven à l’occasion des concerts réguliers au Conservatoire; elles paraissent dans diverses revues, notamment le Journal des Débats et la Revue et gazette musicale de Paris (tous les articles se trouvent réunis dans Critique Musicale I-III). Au début, de 1833 à 1836 les articles suivent l’ordre des exécutions au concert; dans cette période il traite en détail des symphonies 2 à 8, les plus fréquemment jouées. Ses tout premiers articles comme critique du Journal des Débats au début de 1835 traitent d’une série de concerts au Conservatoire dans lesquels figurent ces sept symphonies (Débats 25 janvier, 12 février, 20 février, 22 mars, 12 avril, 18 avril et 23 juin 1835). En 1838 il décide de les rassembler dans une suite continue qui obéit non à l’ordre des concerts mais à la chronologie des symphonies: l’intention est de faire ressortir le développement de l’œuvre symphonique de Beethoven (Revue et gazette musicale, janvier à mars 1838; Critique Musicale III pages 373-410). Il ajoute aussi maintenant une étude de la 1ère symphonie, jusqu’alors négligée et la moins jouée des neuf, et une étude de la 9ème qu’il avait remise à dessein à plus tard pour pouvoir rendre justice à cette œuvre monumentale. Toutes les autres symphonies avaient été adoptées par le public parisien, mais la 9ème faisait toujours l’objet de jugements contradictoires. Après mûr examen Berlioz tranche sans hésiter: la 9ème symphonie représente ‘la plus magnifique expression du génie de Beethoven’. Ces études des années 1830 formeront la trame des chapitres sur Beethoven qu’il rassemble par la suite, d’abord dans le premier tome du Voyage musical en Allemagne et en Italie de 1844, et plus tard dans À Travers chants (1862): Beethoven vient en tête dans le recueil, au devant de Gluck suivi de Weber, et est évoqué de nouveau dans les chapitres 23 et 28 (le texte intégral de l’Étude critique des symphonies de Beethoven est disponible sur ce site dans l’original ainsi que dans une traduction anglaise). D’autres études sur Beethoven sont reproduites par Berlioz dans le Deuxième Épilogue des Soirées de l’orchestre: un compte-rendu du livre de W. von Lenz sur les ‘Trois styles’ de Beethoven, et un récit des célébrations pour l’inauguration de la statue de Beethoven à Bonn en août 1845 auxquelles Berlioz avait assisté (publiés d’abord dans les Débats, 22 août et 3 septembre 1845). On remarquera que malgré son enthousiasme pour la musique de chambre et pour piano de Beethoven, que Berlioz considère comme le véritable sommet de son œuvre, il n’y consacrera jamais d’études de détail pour faire pendant aux études sur les symphonies.
Avec tant d’exécutions de Beethoven à Paris et généralement de bonne qualité, l’idée de diriger lui-même Beethoven ne vient pas d’emblée à Berlioz. En fait le nombre d’exécutions d’œuvres de Beethoven par Berlioz dans ses concerts à Paris est modeste: il dirige par exemple les deux derniers mouvements de la 5ème symphonie au vaste concert au Palais de l’Industrie le 1er août 1844. C’est une occasion spéciale, et le résultat est d’ailleurs un peu décevant, vu le grand nombre des exécutants et la réverbération de la salle (Mémoires chapitre 53). En 1860 Berlioz prodigue ses conseils lors des représentations, très réussies, de Fidelio au Théâtre Lyrique avec Pauline Viardot dans le rôle de Léonore. L’évènement lui fournit la matière de deux articles sur l’opéra (Journal des Débats 19 mai et 22 mai 1860), qui donnent lieu à leur tour à un échange de lettres chaleureux entre Wagner et Berlioz: les deux hommes se retrouvent momentanément dans une admiration partagée du chef d’œuvre (CG nos. 2503, 2504). Les articles seront repris par la suite dans À travers chants (1862). Mis à part des exécutions régulières d’extraits des symphonies et de morceaux plus brefs à ses concerts de Bade (en 1856, 1857, 1858, 1860 et 1861), Berlioz n’aura que deux fois l’occasion de donner sous sa direction une série de concerts consacrés à Beethoven. À Londres en 1852 il dirige 6 concerts à Exeter Hall et Beethoven figure au programme de chaque concert; le clou de la série est une exécution de la 9ème symphonie le 12 mai, redonnée le 9 juin. Elle nécessite pas moins de sept répétitions, et c’est une révélation pour le public de Londres (CG nos. 1488, 1495). Berlioz se souviendra longtemps de cette exécution, qu’il considérait comme l’un des sommets de sa carrière de chef d’orchestre (CG no. 3287; octobre 1867). L’expérience de Londres est sans doute dans son esprit quand à la fin de sa vie, pendant l’hiver de 1867-1868, il part pour sa dernière tournée de concerts en Russie: Beethoven et Gluck figurent en tête aux programmes. L’exécution prévue de la 9ème symphonie n’aura finalement pas lieu du fait de la faiblesse des chœurs disponibles. Pour les autres œuvres jouées l’exécution est d’un très haut niveau d’après les critiques contemporains, et Berlioz est content: ‘Quel orchestre! quelle précision! quel ensemble! Je ne sais pas si Beethoven s’est jamais entendu exécuter de la sorte’ (CG no. 3315; 15 décembre 1867).
Défenseur enthousiaste de la musique de chambre de Beethoven, Berlioz n’a cependant pas cherché à le suivre dans cette voie. Parler de musique de chambre avec Berlioz, c’est évoquer un genre qui brille chez lui par son absence. Mises à part les 3 pièces pour l’orgue mélodium d’Alexandre, fruit d’une commande de circonstance, on ne peut guère recenser que le trio pour deux flûtes et harpe dans la 3ème partie de l’Enfance du Christ. Le seul passage qu’il ait semble-t-il jamais écrit pour quatuor à cordes se trouve dans un contexte inattendu, et prend une forme inaccoutumée: dans le finale d’Harold en Italie le thème du deuxième mouvement est brièvement évoqué, joué par deux violons et un violoncelle en coulisses, alors que l’alto joue séparément dans l’orchestre (mesures 473-500). Berlioz n’est pas pianiste: on pourrait arguer de ce fait qu’il évite à dessein la musique pour piano seul. Mais la question est peut-être plus complexe. Berlioz connaissait bien les principes de la technique de tout instrument de musique, et dès ses premières années à Paris il recherchait les conseils d’instrumentistes dont beaucoup comptaient parmi ses amis. Il n’y avait aucune raison a priori pour que Berlioz évite la forme du quatuor ou du trio pour piano où Beethoven avait montré la voie.
En vérité l’orchestre, avec ou sans le support des voix, est le champ d’expression naturel de Berlioz: il met à sa disposition une gamme de sonorités que la musique instrumentale ne peut lui fournir. Ses toutes premières impressions à l’Opéra soulignent le rôle de l’orchestre avant celui des voix. Quand il découvre Weber, il est sans doute frappé par la maîtrise démontrée par l’orchestre dans les ouvertures (Der Freischütz, Obéron): l’orchestre est capable à lui seul d’évoquer le drame et de le développer selon son propre langage, sans l’appui des voix. Mais Weber n’était pas devenu un grand symphoniste. Avec la révélation de Beethoven Berlioz comprend rapidement qu’il vient de trouver sa propre voie. Citons une lettre du 11 janvier 1829 à un ami (CG no. 111):
À présent que j’ai brisé le frein de la routine, je vois se dérouler un champ immense, dans lequel les règles scholastiques me défendaient d’entrer. A présent que j’ai entendu cet effrayant géant Beethoven, je sais à quel point en est l’art musical, il s’agit de le prendre à ce point-là et de le pousser plus loin… pas plus loin, c’est impossible, il a atteint les bornes de l’art, mais aussi loin dans une autre route. Il y a du neuf à faire et beaucoup, je le sens avec une énergie extrême; et j’en ferai, sois-en sûr, si je vis.
Le premier résultat est la Symphonie fantastique de 1830. Beethoven n’aurait certes jamais composé rien de pareil, mais l’œuvre n’aurait pu exister sans l’influence de Beethoven. La Scène aux champs (le 3ème mouvement) est un hommage évident à la Symphonie pastorale qui Berlioz admirait tellement. Mais ce n’est qu’un début. Quand en avril 1831 il abandonne sagement son projet de retourner d’Italie à Paris pour assassiner Camille Moke et sa mère, il fait cette remarque pleine de sens dans une lettre à sa mère (CG no. 219; 21 avril 1831, de Nice):
O mon jeune et sublime orchestre, nous nous reverrons donc!… Nous avons de grandes choses à faire ensemble. Il y a une Amérique musicale, dont Beethoven a été le Colomb, je serai Pizarre ou Cortez.
On peut rapprocher aussi cette remarque dans une lettre de 1863 sur la différence entre l’orchestre de théâtre et l’orchestre de concert (CG no. 2714):
L’orchestre de théâtre est un esclave; il agit en esclave placé dans une cave; l’orchestre de concert est un roi placé sur un trône.
Plus que toute autre musique ce sont les symphonies de Beethoven qui ont révélé à Berlioz les possibilités expressives de la musique symphonique. Un des traits du style de Beethoven qui a particulièrement frappé Berlioz, c’est son originalité dans le domaine du rythme: de ce point de vue comme d’autres Berlioz est bien le successeur de Beethoven (chez Wagner, par contre, le rythme ne joue qu’un rôle plus limité). À la fin d’un article dans le Journal des Débats du 10 novembre 1837 Berlioz l’énonce ouvertement: ‘Il y a dans le domaine musical un champ encore inexploré, dont Beethoven et Weber ont ouvert la route [...] Ce champ est celui du rhythme; il est vaste et fécond, il ne s’agit que de le bien cultiver’. Dans la cinquième de ses lettres sur son deuxième voyage en Allemagne de 1845-1846 Berlioz critique l’absence d’une classe de rythme dans les conservatoires en Europe, et souligne que c’est la pratique des symphonies de Beethoven qui a brisé les instrumentalistes parisiens à un nouveau langage rythmique.
On pourrait appeler les années 1830 et le début des années 1840 la ‘période Beethoven’ dans l’œuvre de Berlioz: ses quatre symphonies datent de cette époque, et par la suite son imagination créatrice prendra d’autres directions. (On pense cependant au récit poignant de la symphonie en la mineur rêvée par Berlioz en 1852 mais rejetée par suite de préoccupations personnelles et de soucis d’argent — Mémoires chapitre 59.) Harold en Italie (1834) fait plusieurs fois écho à Beethoven, notamment dans le procédé du rappel thématique au début du dernier mouvement (allusion au dernier mouvement de la 9ème symphonie), et dans le retour du thème de la Marche des pélerins plus loin dans ce même mouvement (mesures 473-500; allusion au retour du Scherzo dans le finale de la 5ème symphonie). Roméo et Juliette (1839) est l’interprétation berliozienne du modèle de la symphonie avec chœurs — Berlioz avait déjà envisagé d’introduire un chœur dans Harold en Italie. La Symphonie funèbre et triomphale, œuvre purement instrumentale dans la version originale (1840), se voit augmentée dans la version revue d’un chœur pour la fin du dernier mouvement (1842). L’œuvre évoque en partie la Symphonie héroïque, qui selon Berlioz serait ‘l’oraison funèbre d’un héros’ (Critique Musicale III p. 106), qui fait penser à ‘l’oraison funèbre’ du deuxième mouvement de la symphonie de Berlioz.
À partir des années 1830 les critiques associent logiquement les noms de Berlioz et de Beethoven et font de Berlioz en quelque sorte l’héritier du maître allemand (ainsi par exemple Théophile Gautier en décembre 1839, après la deuxième exécution de Roméo et Juliette). L’hommage est fait publiquement en décembre 1838 par nul autre que Paganini: sa lettre à Berlioz annonçant son don de 20,000 francs commence par les mots ‘Beethoven mort, il n’y avait que Berlioz qui pût le faire revivre’ (CG no. 600; Mémoires chapitre 49). Dans ses voyages en Allemagne Berlioz est naturellement souvent conscient de la présence de son grand prédecesseur. En août 1845 il assiste aux cérémonies pour l’inauguration de la statue de Beethoven à Bonn (voyez le récit dans les Soirées de l’orchestre, 2ème épilogue, paru d’abord dans les Débats du 22 août et 3 septembre 1845). À Vienne plus tard la même année et l’année suivante il a l’émotion de diriger sa propre musique dans la même Salle des Redoutes où Beethoven avait donné ses œuvres quelques décennies plus tôt (Mémoires, Second voyage en Allemagne, 2ème lettre).
Il y a chez Berlioz bien des échos de passages précis de Beethoven, plus peut-être que pour n’importe lequel des compositeurs que Berlioz admirait le plus, sans omettre Gluck. Ces échos peuvent parfois être voulus, et parfois inconscients: il n’est pas toujours facile de trancher, et Berlioz a tendance à préférer l’allusion à l’énoncé direct. On signalera en temps voulu ces échos avec chaque partition de Beethoven présentée sur ce site.
Malgré ces échos, et en dépit des autres influences qu’on peut relever (comme par exemple le procédé du récitatif instrumental, dérivé de Beethoven, tant sa musique de chambre que son œuvre symphonique), le monde de Berlioz reste différent de celui du maître allemand. Berlioz exclut d’emblée l’imitation pure et simple: tout au long de sa carrière il cherchera toujours à faire du neuf et à éviter les redites, tant de ses prédécesseurs que de ses propres œuvres. En outre, quelle que soit l’influence de Beethoven sur la musique d’orchestre de Berlioz, il y aura aussi toujours d’autres influences en jeu. Chacune des partitions majeures de Berlioz est un confluent où s’assimilent une série d’influences variées, littéraires aussi bien que musicales. Avant d’entreprendre ce qui deviendra la Symphonie fantastique Berlioz écrit qu’il a en tête ‘une symphonie descriptive de Faust’ (CG no. 113; 2 février 1829); les Mémoires confirment que la symphonie fut écrite ‘toujours sous l’influence du poème de Gœthe’ qu’il venait de lire (chapitre 26). Également selon les Mémoires le modèle pour Harold en Italie est le Childe Harold de Byron (chapitre 45). Malgré l’inspiration de Beethoven Roméo et Juliette est un hommage à Shakespeare, qui est invoqué directement dans les Strophes de la 1ère partie.
Note: on trouvera ailleurs sur ce site une étude de détail par Diana Bickley concernant l’influence possible de Beethoven sur une œuvre de Berlioz, l’ouverture de Waverley (en anglais seulement).
Berlioz a toujours désiré se sentir proche des grands créateurs qu’il admirait le plus: c’est un des traits constants de sa personnalité. Beethoven faisait partie du petit groupe de ces intimités imaginaires. Citons ce passage d’une lettre à son vieil ami Humbert Ferrand (CG no. 2928; 10 novembre 1864):
Croiriez-vous, mon cher Humbert, que j’ai la faiblesse de ne pouvoir prendre mon parti du passé? Je ne puis comprendre pourquoi je n’ai pas connu Virgile; il me semble que je le vois rêvant dans sa villa de Sicile; il dut être doux, accueillant, affable. Et Shakespeare, le grand indifférent, impassible comme le miroir qui reflète les objets. Il a dû pourtant avoir pour tout une pitié immense. Et Beethoven, méprisant et brutal, et néanmoins doué d’une sensibilité si profonde. Il me semble que je lui eusse tout pardonné, ses mépris et sa brutalité. Et Gluck le superbe!…
Les derniers paragraphes des Mémoires, qui portent la date du 1er janvier 1865, un peu plus d’un mois après cette lettre, donnent à la même idée un tour encore plus personnel:
Il faut me consoler d’avoir été connu d’elle trop tard [Estelle Fornier], comme je me console de n’avoir pas connu Virgile, que j’eusse tant aimé, ou Gluck, ou Beethoven... ou Shakespeare... qui m’eût aimé peut-être. (Il est vrai que je ne m’en console pas.) [...]
Un *astérisque indique que la partition est citée par Berlioz dans son Traité d’instrumentation
Symphonie no. 3 (Héroique), 1er mouvement (durée 17'37")
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(fichier créé le 29.2.2004)
— Partition en format pdfSymphonie no. 3 (Héroique), 2ème mouvement (durée 13'57")
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(fichier créé le 16.3.2004)
— Partition en format pdf*Symphonie no. 3 (Héroique), 3ème mouvement (durée 6'31")
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(fichier créé le 7.2.2003)
— Partition en format pdf*Symphonie no. 3 (Héroique), 4ème mouvement (durée 11'23")
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(fichier créé le 3.8.2003)
— Partition en format pdf*Symphonie no. 4, 2ème mouvement (durée 8'42")
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(fichier créé le 12.1.2003)
— Partition en format pdf*Symphonie no. 5, 1er mouvement (durée 6'53")
— Partition en grand format
(fichier créé le 14.2.2003)
— Partition en format pdf*Symphonie no. 5, 2ème mouvement (durée 9'39")
— Partition en grand format
(fichier créé le 15.8.2003)
— Partition en format pdf*Symphonie no. 5, 3ème et 4ème mouvements (durée 4'46" et 10'46", durée totale 15'32")
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(fichiers créés le 3.10.2003 et 8.12.2003)
— Partition en format pdfSymphonie no. 6 (Pastorale), 1er mouvement (durée 11'43")
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(fichier créé le 2.4.2004)
— Partition en format pdfSymphonie no. 6 (Pastorale), 2ème mouvement (durée 11'12")
— Partition en grand format
(fichier créé le 19.4.2004)
— Partition en format pdf*Symphonie no. 6 (Pastorale), 3ème, 4ème et 5ème mouvements (durée 5'18", 3'53" et 8'54", durée totale 18'05")
— Partition en grand format
(fichiers créés le 1.4.2003 et 25.1.2004)
— Partition en format pdf*Symphonie no. 7, 1er mouvement (durée 13'20")
— Partition en grand format
(fichier créé le 14.9.2003)
— Partition en format pdf*Symphonie no 7, 2ème mouvement (durée 7'20")
— Partition en grand format
(fichier créé le 1.5.2003)
— Partition en format pdf*Symphonie no. 7, 3ème mouvement (durée 7'31")
— Partition en grand format
(fichier créé le 13.10.2003)
— Partition en format pdfSymphonie no. 7, 4ème mouvement (durée 9'01")
— Partition en grand format
(fichier créé le 1.1.2004)
— Partition en format pdf*Concerto pour piano no. 5, 2ème mouvement (durée 6'51")
— Partition en grand format
(fichier créé le 8.7.2003)
— Partition en format pdf
Premier mouvement: le tempo pour ce mouvement a été fixé à blanche pointée = 48, nettement plus lent que l’indication de Beethoven (blanche pointée = 60) que peu d’exécutions tentent d’observer.
Deuxième mouvement: le tempo pour ce mouvement a été fixé à croche = 72, plus rapide que la plupart des exécutions modernes, mais cependant en deça du mouvement indiqué par Beethoven, croche = 80. (Note: on a dû omettre une série de notes d’agrément suivant un trille entre les mesures 117-133, le logiciel n’étant pas capable de les reproduire correctement.)
Troisième mouvement: Berlioz cite intégralement le Trio de ce mouvement dans son Traité d’instrumentation, au chapitre sur le cor (pour illustrer l’emploi des sons bouchés). On peut reconnaître un écho de ce trio dans la mélodie de Berlioz (avec cor solo) Le Jeune pâtre breton, qui montre plusieurs ressemblances frappantes avec le trio de la symphonie de Beethoven.
Le tempo pour ce mouvement a été fixé à blanche pointée = 100, plus lent que l’indication de Beethoven (blanche pointée = 116).
Quatrième mouvement: Berlioz cites les mesures 348-372 [354-378 dans cette transcription] dans son Traité d’instrumentation, au chapitre sur le hautbois. (Note: par suite d’un bogue dans le logiciel touchant les barres de reprises, on a dû modifier la notation des mesures 45 à 75, avec pour résultat d’ajouter 6 mesures à la notation du mouvement dans son ensemble; la musique reste pour elle identique.)
Les mouvements ont été établis comme suit. Allegro molto, blanche = 63; Poco Andante, croche = 80; Presto, noire = 100 (Les mouvements de Beethoven sont plus rapides: Allegro molto, blanche = 76; Poco Andante, croche = 108; Presto, noire = 116).
Voyez aussi l’étude critique consacrée par Berlioz à cette symphonie.
Berlioz admirait particulièrement cette symphonie, qu’il inscrit au programme de ses concerts en Russie en 1867-8. Le mouvement lent lui semblait l’une des plus belles créations de Beethoven, et il le cite à deux reprises dans le Traité d’instrumentation, au chapitre sur le violon et celui sur les timbales. Il l’évoque souvent dans ses écrits – une lettre à son ami Humbert Ferrand raconte l’avoir entendu une nuit en rêve (CG no. 2335; 26 novembre 1858).
Deuxième mouvement: le tempo pour ce mouvement a été fixé à croche = 72, nettement plus lent que l’indication de Beethoven (croche = 84) que peu d’exécutions observent, mais plus rapide aussi que ce que l’on entend parfois au concert.
Voyez aussi l’étude critique consacrée par Berlioz à cette symphonie.
Premier mouvement: Berlioz cite un extrait de la péroraison de ce mouvement dans son Traité d’instrumentation, au chapitre sur le violon (pour illustrer un unisson de tous les violons).
Le tempo pour ce mouvement a été fixé à blanche = 96, plus lent que l’indication de Beethoven (blanche = 108).
Deuxième mouvement: Berlioz cite le début de ce mouvement dans son Traité d’instrumentation, au chapitre sur l’alto (pour illustrer un unisson des altos et des violoncelles).
Les tempi ont été établis comme suit: Andante con moto, croche = 76, più mosso, croche = 104 (les tempi de Beethoven sont respectivement croche = 92 et croche = 116).
Troisième mouvement: Berlioz cite ce mouvement pas moins de trois fois dans son Traité d’instrumentation, aux chapitres sur le basson, le violon (pizzicato) et les timbales.
Le mouvement a été fixé à blanche pointée = 84 (plus lent que l’indication de Beethoven, blanche pointée = 96).
Quatrième mouvement: les mouvements sont ceux indiqués par Beethoven (Allegro: blanche = 84; Presto: ronde = 112).
Voyez aussi l’étude critique consacrée par Berlioz à cette symphonie.
Berlioz a toujours particulièrement admiré cette symphonie, qu’il évoque fréquemment dans ses écrits; elle figure au programme de ses concerts en Russie en 1867. On peut reconnaître des échos évidents de l’œuvre de Beethoven dans le mouvement lent de la Symphonie fantastique, et l’orage de la Pastorale est sans doute présent à l’esprit de Berlioz quand il écrit la Chasse royale et orage des Troyens (voyez notamment les dernières pages des deux morceaux). Il cite plusieurs fois des extraits des troisième et quatrième mouvements de la Pastorale dans son Traité d’instrumentation (aux chapitres sur la contrebasse, la petite flûte et le hautbois).
Premier mouvement: le mouvement a été fixé à blanche = 56, plus lent que l’indication de Beethoven (blanche = 60).
Deuxième mouvement: le mouvement est celui de Beethoven, noire pointée = 50, un peu plus rapide que la plupart des exécutions modernes.
Dans ce mouvement la notation des notes d’agrément placées après des trilles présente des difficultés avec le logiciel utilisé; il a été nécessaire d’omettre celles des mesures 47 et 77, et de récrire celles des mesures 11, 33-37, 86-7, 105-9, 126 et 128 comme notes ordinaires avec leur durée effective.
Troisième et quatrième mouvements: les mouvements sont ceux de Beethoven, sauf pour le tempo principal du scherzo qui a été fixé à blanche pointée = 96 (l’indication de Beethoven est blanche pointée = 108).
Cinquième mouvement: l’indication de métronome, noire pointée = 60, est celle de Beethoven.
Voyez aussi l’étude critique consacrée par Berlioz à cette symphonie.
Premier mouvement: Berlioz cite les mesures 300-310 de ce mouvement dans son Traité d’instrumentation, au chapitre sur le hautbois. On peut reconnaître quelques échos de ce mouvement dans Roméo et Juliette, notamment les mi répétés de la fin de l’introduction, mesures 57-62 (comparez les mi en ostinato dans le Convoi funèbre de Juliette, d’abord dans les voix (Jetez des fleurs), puis dans les violons et altos), ainsi que l’ostinato chromatique des basses à la fin du mouvement (mesures 401-422 — comparez l’ostinato chromatique des basses dans le 2ème mouvement de Roméo et Juliette, Roméo seul – Grande fête chez Capulet, mesures 290-329). Voyez aussi la fin du dernier mouvement évoqué ci-dessous.
Les mouvements sont ceux de Beethoven — Poco sostenuto: noire = 69; Vivace: noire pointée = 104.
Second mouvement: cette page célèbre était fort prisée du public parisien avant même la fondation de la Société des Concerts du Conservatoire en 1828; Habeneck l’avait substituée au deuxième mouvement de la seconde symphonie pour faire passer cette dernière aux exécutants et au public… Berlioz l’admirait grandement. Il cite une partie du mouvement dans son Traité d’instrumentation, au chapitre sur la trompette. On peut reconnaître plusieurs échos de la page de Beethoven dans plusieurs œuvres de Berlioz, notamment le deuxième mouvement d’Harold en Italie (comparez en particulier chez Berlioz le pizzicato des contrebasses aux mesures 169-247 avec les mesures 102-44, 150-83 et 225-42 de Beethoven, et la fin des deux mouvements), et la Marche Funèbre pour la dernière scène d’Hamlet (outre la tonalité de la mineur et le rythme semblable, le soupir des vents au début et à la fin du mouvement chez Beethoven fait penser aux soupirs du chœur sans paroles chez Berlioz). Les mi répétés du thème principal chez Beethoven ont peut-être aussi inspiré les mi en ostinato dans le Convoi funèbre de Juliette (5ème mouvement de Roméo et Juliette) — voyez ci-dessus à propos du 1er mouvement.
Le mouvement adopté suit l’indication de Beethoven (noire = 76).
Troisième mouvement: Berlioz cites les mesures 181-208 de ce mouvement dans son Traité d’instrumentation, au chapitre sur le cor. Berlioz s’est peut-être souvenu de ce scherzo dans son scherzo de la Reine Mab dans Roméo et Juliette (même mouvement très rapide, et même tonalité de fa majeur). Pour ce mouvement les tempi ont été établis comme suit. Presto, blanche pointée = 126, Assai meno presto, blanche pointée = 72, dans les deux cas plus lents que les indications de Beethoven (blanche pointée = 132 et 84).
Par suite de bogues dans le logiciel utilisé, il a été nécessaire (1) de déplacer d’un temps la première barre de reprise (ce qui modifie la notation mais non la musique elle-même), et (2) d’omettre toutes les notes d’agréments après le trille aux mesures 18, 20, 22 et dans tous les passages correspondants.
Quatrième mouvement: Dans ses articles sur cette symphonie Berlioz fait remarquer la ressemblance entre le thème principal de ce mouvement et celui de l’ouverture de l’Armide de Gluck. La démarche chromatique des basses aux mesures 373-414 fait penser à l’ostinato chromatique des basses dans le 2ème mouvement de Roméo et Juliette, Roméo seul – Grande fête chez Capulet, mesures 290-329 (voyez aussi la fin du premier mouvement évoqué ci-dessus).
Le tempo pour ce mouvement (Allegro con brio, blanche = 72), suit l’indication de Beethoven.
Pour obtenir correctement la reprise de la première partie du mouvement il a fallu la recopier intégralement une deuxième fois (mesures 5 à 122). Dans cette reprise les mesures ont été renumérotées à partir de la mesure 5 pour éviter de fausser le compte total du mouvement.
Voyez aussi l’étude critique consacrée par Berlioz à cette symphonie.
C’est son ami Ferdinand Hiller qui initie Berlioz au 5ème concerto de Beethoven en octobre 1829. Le choc est immédiat: ‘sublime, immense’, dit Berlioz à son confident Humbert Ferrand (CG nos. 130 and 140, 3 et 29 octobre 1829). Par la suite Berlioz citera dans ses écrits le concerto dit L’Empereur plus fréquemment que tous les autres concertos de Beethoven. Il le dirige plusieurs fois pendant sa carrière, notamment au Conservatoire avec Liszt comme soliste (25 avril 1841), à Londres (13 juin 1855), et à son avant-dernier concert à St Pétersbourg (25 janvier 1868). Dans son Traité d’instrumentation, au chapitre sur le piano, il cite un passage du second mouvement où les rôles du piano et de l’orchestre sont renversés et le soliste se fait accompagnateur. Le passage a visiblement suggéré à Berlioz l’utilisation de deux pianos dans sa Fantaisie sur la Tempête de Shakespeare de 1830, que Berlioz cite dans son Traité à la suite du concerto de Beethoven (une autre inspiration est ici sa liaison de 1830 avec la pianiste Camille Moke). Le passage du second mouvement d’Harold en Italie, où l’alto solo accompagne l’orchestre avec des arpèges sul ponticello (mesures 169-248), pourrait également devoir son inspiration au concerto de Beethoven.
Second mouvement: le mouvement a été fixé à noire = 48 (il n’y a pas d’indication de métronome dans la partition de Beethoven). Par suite d’un bogue dans le logiciel on a dû omettre deux notes d’agrément à la mesure 44.
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1997.
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