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Berlioz en Allemagne

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Chronologie
Présentation
1843
1854
Suite et fin

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Chronologie

1836

(Avant décembre): Berlioz fait la connaissance de Lipinski à Paris

1843

28 janvier: Berlioz fait le voyage de Weimar à Leipzig
2 février: visite éclair de Leipzig à Dresde et retour par le train
6 février: Berlioz fait le voyage de Leipzig à Dresde par le train
10 février: premier concert au théâtre
12 février: Berlioz instrumente la mélodie Absence pour Marie Recio
17 février: deuxième concert au théâtre
19 février: retour à Leipzig
12 septembre: publication dans le Journal des Débats de la 5ème lettre (Dresde) du Voyage musical en Allemagne

1853

Décembre: Berlioz accepte une invitation de Dresde à donner deux concerts au printemps suivant

1854

10 avril: Berlioz arrive à Dresde en provenance de Brunswick
22 avril: premier concert au théâtre (intégrale de la Damnation de Faust)
24 avril: répétition pour Roméo et Juliette
25 avril: pas de répétition; deuxième concert au théâtre (on redonne la Damnation de Faust)
26-29 avril: répétitions tous les jours
28 avril: un des musiciens présents aux répétitions dessine une esquisse de Berlioz dirigeant
29 avril: troisième concert au théâtre (ouvertures de Benvenuto Cellini et du Carnaval romain, La Fuite en Égypte, et l’intégrale de Roméo et Juliette)
1er mai: quatrième concert au théâtre (on redonne le programme du concert précédent)
3 mai: Berlioz quitte Dresde pour Weimar

Note: Par suite de contradictions dans la correspondance du compositeur la date exacte du deuxième concert de Berlioz à Dresde fait équivoque. Les lettres Correspondance générale nos. 1748 et 1749 (ci-après CG tout court), datées toutes deux par Berlioz du 26 avril et sans doute écrites de suite, disent toutes deux que ce concert devait avoir lieu le jour même au soir. Mais les lettres CG nos. 1746 et 1747, écrites toutes deux le lendemain du concert du (samedi) 22 avril et datées du 23, affirment que le Baron de Lüttichau, l’intendant du théâtre, avait demandé à Berlioz de redonner le concert le mardi suivant, c’est-à-dire le 25 avril. La question semble tranchée par la lettre CG no. 1750, écrite après ce concert, et qui en parle comme ayant eu lieu ‘mardi (avant-hier)’ [cette lettre est datée par Berlioz ‘mercredi 27 avril’ et ‘mercredi’ ne peut être qu’une erreur pour ‘jeudi’]. La conclusion semble donc s’imposer: Berlioz a daté par erreur les deux lettres CG nos. 1748 et 1749 du 26 avril au lieu du 25, et le deuxième concert a donc bel et bien eu lieu le mardi 25 avril, suivant l’intention première du Baron de Lüttichau.

Présentation

    C’est à Paris dans les années 1830 que Berlioz noue indirectement ses premiers liens avec Dresde par l’intermédiaire du violoniste Polonais Karol Lipinski (1790-1861), qui va devenir Konzertmeister (premier violon) de l’orchestre (Staatskapelle) de Dresde en 1839. Dans ses Mémoires Berlioz dit avoir rencontré Lipinski à Paris avant son voyage en Allemagne de 1842-1843; la correspondance du compositeur montre que les deux hommes se connaissaient depuis au moins décembre 1836 (CG nos. 484bis & 485bis, tous deux dans le tome VIII). Nul doute que Berlioz était conscient du fait que Weber, l’une de ses idoles, avait naguère dirigé l’orchestre de Dresde (de 1816 à 1826). Dresde, l’un des grands centres musicaux de l’Allemagne de l’époque, fait donc naturellement partie de l’itinéraire prévu par Berlioz au départ de sa première grande tournée en Allemagne en décembre 1842 (CG. no. 791).

1843

    La première visite de Berlioz à Dresde en février 1843 est connue surtout par le récit publié par le compositeur le 12 septembre de la même année dans le Journal des Débats (Critique musicale V, pages 297-307; cf. CG no. 849) – la cinquième d’une série de lettres parues sous le titre Voyage musical en Allemagne. La lettre sera bientôt reprise dans le Voyage musical en Allemagne et en Italie de 1844, et plus tard incorporée avec les autres dans les Mémoires pratiquement sans changement, sauf pour l’omission significative d’une phrase qui nomme Marie Recio et sa participation à l’un des concerts (Critique musicale V, p. 299). La correspondance du compositeur apporte quelques précisions mais est moins abondante que pour son second voyage onze ans plus tard.

    Pendant son séjour à Weimar Berlioz écrit le même jour à Mendelssohn à Leipzig (CG no. 804, 23 janvier) et à Lipinski à Dresde (CG no. 803): la proximité des deux villes conseille d’organiser les deux visites ensemble. Dans sa lettre à Lipinski Berlioz évoque d’abord leur rencontre à Paris – visiblement ils n’avaient pas gardé contact depuis le départ de Lipinski de Paris; il poursuit en faisant état de ses projets actuels et avance l’idée d’une visite à Dresde pour y donner deux concerts. Des réponses favorables de Mendelssohn (CG no. 805) et de Lipinski donnent à Berlioz le feu vert pour son départ vers l’est. Le 27 janvier, la veille de son départ de Leipzig, Berlioz écrit de nouveau à Lipinski: ‘j’ai le plaisir de vous devoir à vous seul les premières démarches qu’on ait faites en ma faveur dans votre ville et je m’applaudis de n’avoir pas un instant douté de votre cordialité d’artiste. Je ne l’oublierai jamais’. Il avance des propositions pour le programme, promet des lettres de recommendation de Meyerbeer à Berlin au Baron de Lüttichau, l’intendant du théâtre de Dresde, et à Reissiger, le chef d’orchestre, et joint sa propre lettre à Lüttichau (CG no. 807). En fait Meyerbeer avait déjà prodigué ses services: il existe deux lettres de lui, datées toutes deux du 24 janvier 1843, adressées à des musiciens dirigeants à Dresde (Riessiger et Winkler), et recommendant Berlioz à leurs bons offices.

    Peu après son arrivée à Leipzig Berlioz fait un voyage éclair aller-retour par le train à Dresde (2 février) pour voir Lipinski et préparer sa visite (CG nos. 810, 812). Après le premier concert à Leipzig il se rend à Dresde le 6 février où il loge à l’Hôtel de France, dont il semble qu’on ignore l’emplacement (CG nos. 812, 814). Les deux semaines qu’il va passer à Dresde seront particulièrement chargées et pénibles, avec huit répétitions en tout, bien plus qu’à Leipzig. La santé de Berlioz en souffre, comme il le dit à son père le mois suivant: ‘J’ai payé mon tribut, maux de gorge, coliques, douleurs de tête obstinées, rien n’y a manqué et je suis à peine remis; j’ai passé par les mains des médecins de Dresde, de Leipzig et de Brunswick’ (CG no. 820, 15 mars, de Brunswick). Mais la visite apporte ses récompenses. Les ressources musicales de Dresde dépassent tout ce que Berlioz peut trouver en Allemagne à l’exception de Berlin (et plus tard de Vienne). L’orchestre est en général d’un haut niveau, mais le premier hautbois a l’habitude irritante d’ajouter des fioritures à sa partie, défaut dont Berlioz se souviendra encore onze ans plus tard (cf. CG no. 1714, 28 mars 1854, à Lipinski: ‘Est-ce toujours le même 1er hautbois qui faisait si bien les notes de désagrement quand j’allais à Dresde il y a 11 ans?’). Encouragés par Lipinski qui donne à Berlioz un appui sans faille, et rivalisant avec leurs collègues de Leipzig, les musiciens ne ménagent pas leur peine pour apprendre une musique qui leur est encore inconnue. Le jour du premier concert (10 février), donné comme tous ses autres concerts à Dresde au Théâtre, Berlioz écrit à Ferdinand David à Leipzig (CG no. 814):

[…] Le premier (concert) aura lieu ce soir, il s’annonce d’une manière splendide. M. De Lüttichau a haussé d’un tiers le prix des places et toute la salle est louée; nous avons été obligés de faire quatre répétitions générales, sans compter celles des chœurs; je suis éreinté, mais heureusement cela marchera bien, je l’espère. […]

    Le second concert a lieu le 17 février; le lendemain Berlioz écrit à Auguste Morel (CG no. 815):

[…] Je viens de donner ici deux concerts magnifiques et productifs, sur le grand théâtre de Dresde.
Les effets principaux ont été produits par deux fragments du Requiem (L’Offertoire avec le chœur sur deux notes) et le Sanctus dont le solo de Ténor était chanté par le fameux Ténor allemand Tichachek [Tichatschek], et la Symphonie funèbre avec les 2 orchestres et le chœur, et la Cantate du 5 mai sur la mort de l’Empereur, supérieurement chantée par Welcher [Wachter ou Wächter], basse du théâtre, excellente et d’un sentiment musical très distingué. Harold dont Lipinscki jouait l’alto solo, et la Symphonie fantastique n’ont pas mal fait d’impression non plus sur le public et les artistes.
Le lendemain du 1er Concert les musiques militaires à Dresde sont venues me réveiller par une aubade, qui a amené, vous pouvez le penser, une fière consommation de verres de punch. Tous ces gens-là sont dans un ravissement, un enthousiasme, qu’ils ne savent qu’exprimer qu’en me pressant les mains en me faisant des saluts et des embrassades, puisque je ne sais pas un mot d’allemand. […]

    De retour à Leipzig Berlioz raconte ses impressions de Leipzig, Dresde et autres villes à Joseph d’Ortigue (CG no. 816, 28 février):

[…] À Dresde, nous avons dit deux fois l’Offertoire et le Sanctus, une fois la Fantastique, une fois Harold, les ouvertures du Roi Lear, de Benvenuto, le Cinq mai (qui a prodigeusement émotionné le parterre saxon), la Cavatine de Benvenuto, une de mes nouvelles mélodies instrumentées récemment, la Romance pour le Violon, 2 morceaux de Roméo, l’Apothéose (2 fois) avec les deux orchestres et le chœur, comme nous avons fait à l’Opéra de Paris avant mon départ; Reissiger conduisait l’orchestre inférieur. […]
[…] [le final d’Harold] a été enlevé à Dresde, sans toutefois que cette exécution approche de celle de Paris; il n’y avait pas assez de violons et les trombones sont de trop honnêtes gens pour cette orgie de Brigands.
[…] Tu peux bien dire à Dieppo aussi que je n’ai pas encore trouvé son pareil, et que les trombones qui essayent l’Oraison funèbre me font bien mal à la poitrine, sans compter les oreilles. […]

    En comparant les données des Mémoires avec celles de la correspondance on peut reconstituer le programme des deux concerts; l’ordre précis des programmes reste cependant incertain. Les extraits du Requiem, et les deux derniers mouvements de la Symphonie funèbre sont inscrits aux deux concerts (mais le trombone solo n’est visiblement pas du niveau de Dieppo, le tromboniste préféré de Berlioz à Paris). La mélodie évoquée dans la lettre à d’Ortigue doit être Absence, chantée par Marie Recio (qui n’est pas nommée dans les lettres en question). Puisque d’après le manuscrit autographe la mélodie fut instrumentée à Dresde le 12 février (cf. aussi CG no. 858), la lettre suppose que la première exécution de la version pour orchestre a eu lieu à Dresde au second concert le 17 février (et non à Leipzig le 23 février, comme il est dit par exemple par D. Kern Holoman, Catalogue of the Works of Hector Berlioz [1987], p. 228). L’ouverture du Roi Lear, la Symphonie fantastique, et la Cavatine de Cellini (chantée par Mme Schubert) font partie du premier concert, tandis que le second comprend l’ouverture de Benvenuto Cellini, Harold en Italie, Rêverie et caprice (avec Lipinski en soliste), le deuxième et troisième mouvements de Roméo et Juliette et la cantate Le Cinq Mai. Le succès du second concert dépasse encore celui du premier, où ‘la classe élégante de l’auditoire’, avec parmi elle le Roi de Saxe, réagit avec méfiance aux passions tumultueuses de la Symphonie fantastique, alors que ‘le public proprement dit’ est beaucoup plus enclin à se laisser entraîner.

    Très pris par la préparation de ses concerts, et malgré des moments de mauvaise santé, Berlioz n’en prête pas moins attention aux autres activités musicales à Dresde. C’est ici qu’il entend pour la première fois l’étonnant harpiste anglais Parish-Alvars, qu’il va bientôt revoir à Francfort. Il existe une lettre de recommendation pour Parish-Alvars de Berlioz à J.-B. Chélard à Weimar: ‘Je vous donne ma parole d’honneur que c’est le harpiste le plus prodigieux qui ait jamais existé; c’est un phénomène. Sans aucun doute le Grand-Duc et la Grande-Duchesse auront le plus vif plaisir à l’entendre’ (CG no. 826, 3 avril). Berlioz ajoutera par la suite une mention de Parish-Alvars au chapitre sur la harpe dans son Traité d’instrumentation.

    C’est aussi à Dresde que Berlioz a l’occasion d’entendre pour la première fois la musique de Richard Wagner. Par coïncidence ce dernier vient juste d’être nommé chef d’orchestre adjoint à Dresde, poste qu’il va occuper jusqu’à 1849. Berlioz et Wagner se sont déjà recontrés à Paris, où Wagner séjourne pour la première fois de 1839 à 1842. Wagner assiste à une des trois exécutions de Roméo et Juliette au Conservatoire en novembre et décembre 1839 (la troisième, le 15 décembre, selon CG II pp. 510, 607 n. 2, mais aucun témoignage n’est cité). Son nom figure sur une liste manuscrite de la main de Berlioz avec les noms de destinaires de billets de faveur pour les exécutions de Roméo et Juliette (on en trouvera une reproduction dans David Cairns, Berlioz, tome II [1999 – édition anglaise], entre les pages 212 et 213). En août 1840 Wagner assiste aussi à une exécution au concert de la Symphonie funèbre. Les deux œuvres l’impressionnent vivement, mais comme on peut le voir d’après un article sur Berlioz publié par lui dans le Dresdner Abendzeitung en mai 1841 Wagner est dès le départ équivoque dans ses commentaires publics sur Berlioz: il reconnaît le génie de son aîné mais avec une certaine mauvaise grâce, et ne parviendra jamais à entrer tout à fait dans l’esprit de Berlioz. Pendant son séjour parisien Wagner écrit d’autre part plusieurs articles pour la Revue et Gazette Musicale, entre autres un article sur Beethoven que Berlioz signale avec éloge (Critique musicale III, p. 402, décembre 1840), et deux sur la reprise à l’Opéra en 1841 du Freischütz pour laquelle Berlioz écrit des récitatifs en français et instrumente l’Invitation à la valse de Weber. La première lettre connue de Berlioz à Wagner, datée du 12 octobre 1841, concerne d’ailleurs un projet de concert à bénéfice pour la veuve de Weber dans lequel Wagner joue un rôle d’intermédiaire (CG no. 757).

    Les remarques de Berlioz dans sa lettre sur Dresde concernant Wagner et ses opéras frappent par leur ton élogieux, en dépit de quelques réserves. Berlioz loue Wagner pour son aide au cours des répétitions et félicite le Roi de Saxe d’avoir nommé le jeune maître à son poste (voir aussi NL no. 814bis). Il exprime son admiration pour l’audace de Wagner en étant à la fois librettiste et compositeur de ses opéras, à l’encontre de tous les compositeurs de l’époque (y compris au départ Berlioz lui-même): ‘il faut convenir que les hommes capables d’accomplir deux fois avec succès ce double travail littéraire et musical ne sont pas communs’. Pendant son séjour Berlioz entend la deuxième partie de Rienzi, qui en octobre 1842 avait valu à son auteur son premier grand succès, et la totalité du Vaisseau Fantôme nouvellement achevé. Il loue deux morceaux du premier opéra et célèbre la couleur sombre du deuxième, tout en critiquant chez son auteur l’emploi excessif du trémolo: ‘Le tremolo soutenu est de tous les effets d’orchestre celui dont on se lasse le plus vite’.

    Le portrait positif que Berlioz trace de Wagner est délibéré, comme il ressort d’une lettre à Lipinski datée du 14 septembre de la même année, après le retour de Berlioz à Paris (CG no. 849). À propos du compte-rendu de sa visite qui vient de paraître deux jours plus tôt dans le Journal des Débats Berlioz observe: ‘Vous verrez, en lisant ma lettre sur Dresde, que je n’ai pas voulu laisser subsister le soupçon que vous aviez fait naître au sujet de Wagner.’ Lipinski – un ennemi de Wagner d’après l’autobiographie de ce dernier (Mein Leben [1911] 1 pages 301-3) – avait sans doute attiré l’attention de Berlioz sur des remarques désobligeantes dans un article de Wagner publié à Dresde deux jours avant l’arrivée de Berlioz… Mais Berlioz décide de n’en tenir aucun compte. Les rapports ultérieurs de Berlioz avec Wagner sont étudiés ailleurs sur ce site.

    De Dresde Berlioz revient à Leipzig deux jours après son deuxième concert. Ce n’est qu’à la fin de l’été, quand il commence à publier sa série de lettres sur son voyage en Allemagne, que ses pensées peuvent se tourner de nouveau vers Dresde. Par hasard, alors qu’il écrit à sa sœur Nancy le 6 ou 7 septembre il est interrompu par un visiteur (CG no. 847; cf. 848):

[…] Le fâcheux est un français qui arrive de Dresde et vient m’apporter des nouvelles des amis que j’ai laissés en Saxe. Cela m’a fait mal, j’ai tant envie d’y retourner, je me déplais si fort à Paris… il fait si beau… Dresde est si belle… Au lieu d’y aller voilà qu’il faut en te quittant, garder la plume pour raconter mon passage dans cette gracieuse ville; car mes lettres continuent toutes les semaines et le bonheur veut qu’elles aient du succès; la 3e sur Weimar a surtout fait fureur. J’ai reçu des félicitations à leur sujet d’Allemagne même, où on en publie déjà trois différentes traductions. […]

    La publication le 12 septembre du récit de la visite à Dresde incite Berlioz à écrire à Lipinski pour la première fois depuis son séjour en février (CG no. 849, cité ci-dessus). On remarquera le ton chaleureux et amical de la lettre:

Vous voyez d’abord que ne je vous dis pas monsieur. Non! Pas de ces termes-là entre nous! Les amis s’écrivent-ils avec tant de cérémonie?… Je n’ai pas besoin de vous dire combien de fois j’ai cité votre nom ici, devant les artistes dignes de l’entendre prononcer. C’est un bonheur pour moi de raconter à chacun l’accueil que vous m’avez fait! Je ne l’oublierai jamais. Pourquoi n’êtes-vous pas libre de venir en France? Ne fût-ce que pour quinze jours!… […]
Votre fils est-il toujours auprès de vous? En tout cas, rappelez-moi, je vous prie, à son bon souvenir. Mille amitiés à monsieur et à madame Schubert qui ont été si gracieusement obligeants pour moi. Si vous en trouvez l’occasion, n’oubliez pas non plus de présenter mes salutations à M. le baron de Lüttichau.
Je voudrais bien que vous eussiez le temps de m’écrire avec détails ce qu’on fait à Dresde, au théâtre et ailleurs, en m’informant franchement de l’état des idées musicales, si on a des idées… Ici, à Paris, nous n’en avons pas. […]

    Onze ans vont s’écouler avant que Berlioz revienne à Dresde.

1854

    Quand Berlioz retourne à Dresde onze ans plus tard le personnel en place n’a pratiquement pas changé: on y retrouve le Baron de Lüttichau, intendant du théâtre; Reissiger, premier Kapellmeister; Lipinski, premier violon; et le même roi de Saxe dont l’intérêt pour la musique ne peut soutenir comparaison avec celui de son collègue de Hanovre. Principal changement: Wagner a maintenant quitté Dresde et a été remplacé comme chef d’orchestre adjoint par Krebs, dont Berlioz garde des souvenirs partagés qui remontent à sa visite à Hambourg en 1843.

    Les changements intervenus à Weimar entretemps marquent cependant une différence majeure avec le premier voyage de Berlioz en Allemagne: quand Liszt s’y installe en 1848 comme chef d’orchestre, son but, avec l’appui de la Grande Duchesse, est de transformer Weimar en centre de musique progressive. Il monte Tannhäuser et Lohengrin de Wagner en 1849 et 1850, et en mars 1852 Benvenuto Cellini de Berlioz – la première exécution de l’œuvre depuis son échec à Paris en 1838. Berlioz, à Londres à ce moment, n’est pas en mesure d’y assister, mais fait le voyage de Weimar en novembre pour y entendre deux autres exécutions de l’ouvrage (maintenant profondément modifié par rapport à la version de Paris) et donner lui-même un concert. À Weimar il recontre parmi d’autres protégés de Liszt le jeune Hans von Bülow (1830-1894), récemment acquis à la musique de Berlioz et responsable avec Liszt des remaniements apportés à la partition de Cellini pour les exécutions de novembre, sinon plus tôt. Au cours des années suivantes il sera l’un des plus ardents apôtres de Berlioz en Allemagne, comme le montre sa correspondance avec Liszt.

    Pendant son séjour à Leipzig en novembre 1853 Berlioz a vent d’un projet de l’inviter à Dresde, comme il ressort d’une lettre à sa sœur Adèle (CG no. 1657, 30 novembre):

[…] Après quoi [les concerts à Leipzig] je suis capable de faire la folie d’aller à Dresde où l’on fait courir le bruit de ma prochaine arrivée.
Si le Roi de Saxe était comme le Roi de Hanovre, je n’hésiterais pas… Il y a tant de gens à Paris qui cherchent à me nuire en mon absence… Et puis ma place du conservatoire… Enfin, je verrai. […]

    C’est Hans van Bülow qui est responsable de cette initiative, ce que Berlioz semble ignorer. Berlioz reçoit bientôt une invitation de Lipinski qui a lui-même fait une démarche après du Baron de Lüttichau; Berlioz répond chaleureusement le 5 décembre et se déclare prêt à venir le printemps suivant pour exécuter Faust ‘avec le concours de l’admirable Chapelle à la tête de laquelle vous êtes placé’ (CG no. 1660). Mais Liszt a visiblement des ambitions encore plus vastes pour Berlioz à Dresde: au début de janvier il suggère à Berlioz qu’après les exécutions de Benvenuto Cellini à Weimar en 1852 l’ouvrage devrait aussi être monté à Dresde. Berlioz répond avec enthousiasme (CG no. 1690, 15 janvier):

[…] Je ne puis te dire combien ta sollicitude pour mon malheureux opéra me touche et me pénètre d’admiration. Tu es en tout un homme à part. Je le sais depuis longtemps, mais ces monstruosités là sont si rares qu’il est presque permis de s’en étonner. Oui certes, je te donne carte blanche pour aviser au destin de Cellini et j’abonde dans ton sens pour accorder la préférence à Dresde. Je suis aussi de ton avis qu’il faut commencer par le publier en Allemagne… si l’on peut. […]

    Dans la même lettre, semble-t-il, Liszt faisait aussi part à Berlioz confidentiellement d’un projet de le faire nommer chef de l’orchestre de Dresde (en remplacement donc de Reissiger); les journaux de Paris saisissent la rumeur et Berlioz tente de l’étouffer par une lettre ouverte ironique publiée dans la Revue et Gazette Musicale le 22 janvier (CG no. 1692):

[…] Plusieurs journaux de Paris annoncent mon prochain départ pour une ville d’Allemagne, où je serais, à les en croire, nommé depuis peu maître de chapelle. Je conçois tout ce que mon départ définitif de France doit avoir de cruel pour beaucoup de gens, et avec quelle peine ils en sont venus à donner foi à cette grave nouvelle et à la mettre en circulation.
Il me serait donc agréable de pouvoir la démentir tout simplement […] Mon respect pour la vérité m’oblige à ne faire qu’une rectification. Le fait est que je dois quitter la France, un jour, dans quelques années, mais que la chapelle musicale dont la direction m’a été confiée n’est point en Allemagne. Et puisque tout se sait tôt ou tard dans ce diable de Paris, j’aime autant vous dire maintenant le lieu de ma future résidence: je suis directeur général des concerts particuliers de la reine des Ovas à Madagascar. L’orchestre de Sa Majesté Ova est composé d’artistes malais fort distingués et de quelques Malgaches de première force. Ils n’aiment pas les blancs, il est vrai, et j’aurais en conséquence beaucoup à souffrir sur la terre étrangère dans les premiers temps, si tant de gens en Europe n’avaient pris à tâche de me noircir. […]

    Le 24 janvier il doit s’expliquer à Liszt (CG no. 1696):

[…] Je crains que tu ne m’aies supposé coupable de quelque indiscrétion à propos de l’affaire de Dresde dont tu m’as parlé. Je n’en ai dit mot à qui que ce soit; je crois que ce sera par Belloni [le secrétaire de Liszt] que les Escudier en auront entendu murmurer quelque chose. Ce sont eux qui dans la France musicale ont ébruité l’affaire; de là cette sotte rumeur des autres journaux de Paris qui m’a obligé d’écrire hier dans la Gazette musicale la lettre que tu as peut-être lue. […]

    Mais la plaisanterie tourne court, comme on peut le voir d’après la lettre suivante à Liszt le 11 mars (CG no. 1704):

[…] M. De Lüttichau m’a écrit dernièrement qu’il compte toujours sur moi pour le 18 ou le 20 avril. J’irai donc à Dresde à cette époque, malgré une lettre de M. Pohl, lettre très amicale et charmante, mais contenant l’expression de ses craintes d’une opposition formidable des deux maîtres de Chapelle [Reissiger et Krebs] et de l’indifférence du public. D’un autre côté Meyerbeer vient de me parler de je ne sais quelle lettre injurieuse qui m’est adressée dans la Gazette de Leipzig; le Baron de Donop m’écrit aussi de Detmold pour me prévenir d’un autre article très hostile de la Gazette d’Etat de Berlin où l’on essaie de prouver que ma plaisanterie de la Gazette musicale de Paris, au sujet de mon engagement chez la Reine des Ovas à Madagascar, est une allusion insultante à l’Allemagne. Il y a donc bien des rages dans l’air en ce moment. Dis-moi donc ce que tu penses de tout cela. Un Etudiant m’écrivit il y a deux mois (ici) une lettre de la plus impertinente absurdité à laquelle je répondis comme je le devais.
[…] Ce voyage de Dresde qui, d’un autre côté, ne rapportera presque rien, me sourit peu. […]

    Il y avait d’autres raisons d’ordre personnel pour les craintes de Berlioz: Harriet Smithson venait de mourir le 4 mars. Dans une lettre à sa sœur Adèle deux jours plus tard Berlioz ne peut cacher son abattement: ‘Et je vais dans un mois repartir pour l’Allemagne; je suis engagé à Dresde, l’Intendant du roi de Saxe m’a écrit hier, on m’attend. Je n’ai de goût à rien, je me soucie de la musique et de tout comme…’ (CG no. 1701).

    Berlioz part tout de même pour l’Allemagne comme prévu; son premier arrêt est à Hanovre, d’où il écrit à plusieurs correspondants pour préparer sa venue à Dresde, et d’abord à Lipinski au sujet de l’organisation des deux concerts projetés (CG no. 1714, 28 mars):

[…] Il vaut mieux, pour ces deux concerts, où la partie vocale est si importante, laisser l’orchestre en bas à sa place ordinaire et avoir des gradins sur le théâtre pour les chœurs, arrangés de manière à ce que les derniers rangs de choristes puissent bien me voir. Nous fîmes ainsi à Hanovre il y a 4 mois et le résultat fut excellent. […] Je tiens immensément à ce que nous fassions à Dresde quelque chose d’exceptionnellement bien et je compte sur vous pour m’aider à y parvenir. […]

    Le 31 mars il écrit aussi à Liszt (CG no. 1717) et ajoute: ‘J’apprends aussi que M. De Bülow est à Dresde, je serai charmé de le revoir; je sais le grand cas que tu fais de lui, et l’on ne trouve pas partout, assis sur les bornes, de jeunes artistes de sa trempe prêts à vous tendre une main amie.’ Les lettres de Bülow à Liszt pendant les deux derniers mois de 1853 montrent quelle activité il a déployé sur place pour préparer le séjour de Berlioz, et elles confirment l’exactitude du récit donné par Berlioz de sa réception à Dresde. Conscient des avertissements de Pohl (CG no. 1704 ci-dessus), Berlioz écrit le 1er avril aux deux chefs d’orchestre de Dresde pour tenter de les concilier à l’avance (CG nos. 1718 à Reissiger et 1721 à Krebs).

     De Hanovre Berlioz se rend à Brunswick où il écrit le 4 avril à son oncle Félix Marmion (CG no. 1726):

[…] De là [sc. Brunswick] je me rendrai enfin à Dresde où je suis engagé par l’intendant du roi de Saxe pour monter à l’opéra, en deux immenses concerts, ma Légende de Faust, Roméo et Juliette et mon oratorio de La Fuite en Egypte. Je ne connais pas les chanteurs que l’on me donne; cela seul m’inquiète, car l’orchestre est excellent. Je vais avoir là de rudes répétitions, et une hostilité sourde à combattre: celle des deux maîtres de chapelle Reissiger et Krebbs, que mon arrivée et la réputation qu’on veut bien me faire de bon chef d’orchestre enchantent médiocrement. Les journaux allemands me nuisent beaucoup sous ce rapport, en établissant des comparaisons entre ma manière de conduire et celle des Cappelmeister nationaux; comparaison d’autant plus dangereuse pour moi qu’elle est plus à mon avantage. […]

    Une fois arrivé à Dresde – il loge au Goldner Engel Hotel [Hôtel de l’Ange d’Or], dont on ne semble pas connaître l’emplacement – les craintes de Berlioz commencent à diminuer. Le 14 avril il écrit à son fils Louis (CG no. 1733): ‘Je trouve tout le monde ici parfaitement disposé; on espère faire un grand riche concert. C’est une ville splendide, immense et animée comme Paris. Tous mes anciens amis s’y trouvent encore.’ Le même jour il écrit à Liszt (CG no. 1738): ‘Je vois souvent M. De Bülow qui est un digne et charmant gentleman. Il m’a déjà trouvé un si grand nombre de fautes de gravure dans la partition de Faust que je t’avais apportée que je la remporterai à Paris pour les faire corriger.’ Bülow est mentionné dans plusieurs autres lettres au cours du séjour de Dresde (CG nos. 1739, 1740, 1748).

    Pendant la semaine qui précède le premier concert Berlioz conçoit de vives inquiétudes quant au manque de préparation des chanteurs, et en particulier des solistes qui quelques jours avant le concert n’ont pas encore lu leurs parties; le 18 avril il écrit une lettre angoissée à Lipinski à ce sujet (CG no. 1742, la dernière lettre connue qui lui soit adressée; cf. 1739 à Liszt quelques jours plus tôt). Mais pour finir tout ira bien. Le 23 avril, le lendemain du premier concert, il écrit à Liszt (CG no. 1746):

[…] Je suis bien heureux de pouvoir te dire que notre Faust a obtenu hier un grand succès. C’est, il est vrai, la plus magnifique exécution que j’aie jamais obtenu de cette œuvre difficile. Je regrette bien que tu n’aies pu entendre les deux derniers actes que tu ne connais pas. La course à l’abîme et le Pandaemonium et la scène des Follets ont produit un effet extraordinaire. M. de Lüttichau est venu aussitôt me dire que nous redonnerions Faust mardi prochain [25 avril]. Samedi [29 avril] le programme annoncé sera exécuté; c’est Roméo et la Fuite en Egypte et une ouverture.
M. De Lüttichau sort de chez moi à l’instant et après mille compliments il m’a dit ces paroles assez claires qui coïncident avec tes prévisions: « C’est une bien excellente chapelle que la nôtre, n’est-ce-pas? mais c’est dommage qu’elle ne soit pas dirigée comme il faudrait; c’est vous qui seriez l’homme pour l’animer. »
J’attendrai qu’il parle plus directement. […]

    À Liszt de nouveau le 25 avril (CG no. 1748; cf. 1749 à Joachim à Hanovre le même jour [les deux lettres sont datées par erreur 26 avril par Berlioz]):

[…] Je t’écris quelques lignes aujourd’hui, parce que tous les jours prochains de cette semaine je serai dans les répétitions du matin au soir. Comme nous redonnons Faust ce soir, nous laissons notre monde vocal et instrumental reprendre haleine. J’ai assez fatigué l’orchestre hier. A la seconde tentative, le scherzo de la Fée Mab a marché sans faute du commencement à la fin. Je n’en reviens pas. Cet orchestre est merveilleux. M. De Lüttichau est de plus en plus gracieux. Reissiger me comble, il m’embrasse, il me fait des vers… curieux. La Presse, me dit-on, est aigre-douce; plus aigre que douce. J’ai eu la visite de M. Banks [Karl Banck, 1809-1889], le critique influent qui m’a écrasé de son air capable et de son phlegme protecteur; il paraît qu’il compose des Lieder et admire Mozart exclusivement. Il m’a accordé, dit-on, quelques morceaux tels que La Course à l’Abîme, le chœur des Sylphes, la Marche [hongroise], et une certaine puissance de combinaisons; mais je manque totalement d’idées. Nous attendons l’article du Constitutionnel de Dresde qui paraîtra ce soir et doit me foudroyer, car il est plus exclusivement mozartiste encore que son confrère et il n’admet aucune des dernières compositions de Beethoven, ni même celles de sa seconde manière. J’ai envie de faire comme Melle Clauss qui est allée demander des leçons de piano à Davison pour avoir l’appui du Times et du Musical World; peut-être nos messieurs voudront-ils bien me donner quelques leçons de composition. Bülow rit de tout son cœur de leurs naïvetés. Heureusement nous avons pour nous le public et la masse entière des artistes dont l’ardeur est extrême.
[…] Nous donnons les deux ouvertures de Benvenuto au concert de samedi [29 avril]. C’est une idée de Bülow, que je crois bonne. […]

    À Robert Griepenkerl à Brunswick, le 27 avril (CG no. 1750):

[…] Je vous écris ces dix lignes pour que vous sachiez que Faust a eu ici un succès extraordinaire auprès du public et des artistes. Après la première exécution M. de Lüttichau est venu me complimenter sur la scène et me demander de donner Faust encore une fois trois jours après. Il a donc été exécuté encore mardi (avant-hier) [25 avril] devant un auditoire plus chaud encore que celui du premier jour. Samedi prochain [29 avril] nous donnons Roméo et Juliette, la Fuite en Egypte, et les deux ouvertures de Benvenuto Cellini.
Tous les artistes sont dans un transport de fureur contre un article de M. Banks qui prétend comme votre monsieur de Brunswick et d’après l’avis de celui de Hanovre, que je ne suis qu’un calculateur de notes sans idées… Hier a paru un autre article dans la Gazette Constitutionnelle de Dresde, d’une naïveté adorable, où l’on me reproche d’avoir calomnié Méphistophélès en le faisant tromper Faust… Car Méphistophélès est un démon vertueux et honnête qui ne manque pas à sa parole… De plus ce naïf rédacteur proteste solennellement contre la chanson des Etudiants, en assurant que jamais des Etudiants allemands ne sont allés quaerentes puellas per urbemO Sancta simplicitas!… il faut que j’aie lu cela pour le croire!
Ce qu’il y a de sûr, c’est que les deux derniers actes de Faust ont produit encore plus d’effet que les deux premiers et que la Course à l’Abîme, le Pandemonium, la Ballade du Roi de Thulé, les Follets, l’hymne à la nature, l’air de Faust dans la chambre de Marguerite, m’ont gagné (je vous le jure) tous les cœurs musicaux de Dresde.
Reissiger est très bon, d’une chaleur incomparable, il m’aide de tout son pouvoir, il assiste à toutes les répétitions du chœur et de l’orchestre, enfin il se conduit admirablement.
M. De Lüttichau m’a déjà parlé plusieurs fois pour me faire entendre qu’il voudrait bien me garder à Dresde et me donner la direction de cette incomparable chapelle… Comme je lui répondais que la place n’était pas vacante, il m’a dit: « Oh, elle pourra le devenir. » Hier il a donné un grand dîner d’artistes en mon honneur, où se trouvaient le ministre de l’intérieur et toutes les têtes de la chapelle (excepté Krebs…).

Je vous envoie un livret de Faust avec la préface que j’ai eu la faiblesse d’écrire pour répondre aux incroyables stupidités que certains journaux ont répandues à ce sujet.
Plusieurs personnes de Dresde trouvent que j’ai tant de mille fois raison que ce n’était pas la peine de répondre.
Comment! Je ne puis pas faire comme tous les autres compositeurs et prendre dans un poème illustre des situations musicales, les arranger à ma fantaisie, sans exciter la fureur des hommes de lettre allemands?
C’est de l’imbécillité pure. Est-ce que les Anglais se sont jamais avisés de me reprocher d’avoir mutilé Shakespeare, en faisant mon livret de Roméo et Juliette?… Est-ce que Shakespeare est moins respectable que Goethe?…
Je crois qu’il se fait en ce moment dans l’esprit de certains critiques allemands une fermentation contre moi, qui augmentera au fur et à mesure que j’obtiendrai plus de popularité musicale en Allemagne. Eh bien qu’ils ne se gênent pas, je serai heureux de remarquer l’accroissement de leur fureur.
Mais m’attaquer comme librettiste, c’est par trop bête.
Adieu cher ami, je compte sur une magnifique exécution pour samedi. Je vous dis en confidence que je n’ai jamais vu un orchestre pareil à celui de Dresde, tout composé de jeunes gens et de virtuoses. Quel changement!… depuis onze ans. […]

[…] P.S. – Il y a ici un acteur M. Davison qui m’a parlé de vous. Il a dîné hier avec moi chez M. De Lüttichau, il est dans une enthousiasme curieux. Il a assisté à la seconde exécution de Faust. Lipinsiki est dans un véritable délire; les musiciens me serrent les mains, m’embrassent. […]

    Le lendemain de cette lettre, au cours d’une des répétitions du 28 février, un des musiciens dessine une esquisse de Berlioz dirigeant.

    Le 30 avril, le lendemain du troisième concert, Berlioz écrit à sa sœur Adèle (CG no. 1752 [texte plus complet au tome VIII]; cf. aussi le même jour no. 1751bis à J.-C. Lobe):

[…] J’ai eu hier une des plus belles soirées de ma vie d’artiste. J’avais déjà donné au grand théâtre deux splendides exécutions de Faust, avec un succès extraordinaire. Hier c’était Roméo et Juliette en entier avec La Fuite en Egypte et les deux ouvertures de Benvenuto Cellini. Il y avait foule, le théâtre est plein et superbe de toilettes, d’uniformes; il y a eu des scènes d’enthousiasme. On m’a jeté des couronnes des loges et de l’orchestre, on m’a rappelé je ne sais combien de fois, les musiciens me baisaient les mains, les pans de mon habit… ils ont voulu me couronner sur la scène et j’ai eu grand peine à les en empêcher. L’exécution vocale et instrumentale a été une vraie merveille. La scène de réconciliation des Capulets et des Montaigus et l’admonition religieuse du Frère Laurence (le moine) ont été d’un grandiose admirable. Et pour achever le bonheur de ce concert j’avais un excellent ténor [Conradi], qui a chanté d’une manière ravissante le Repos de la Sainte Famille, et 14 enfants de chœur (pour le chœur des anges) doués de voix délicieuses. On m’a redemandé aussitôt ce programme et nous le redonnons demain [1er mai]. Après quoi je retournerai à Paris, mon congé de la Bibliothèque étant expiré et ceux de nos chanteurs de Dresde étant sur le point de commencer. […] Voilà trois fois de suite qu’on me fait retarder le commencement de mes concerts pour attendre le Roi et trois fois qu’il est empêché de venir. Il n’est pas comme le roi de Hanovre qui trouve le temps de venir même à mes répétitions. […]
[…] Comme chef d’orchestre, on me compromet de plus en plus auprès de mes confrères allemands. L’un d’eux [Krebs, semble-t-il] faisait des reproches au premier violon de l’orchestre qu’il dirigeait: « C’est une défaite pour nous », disait-il « d’avoir une pareille exécution sous la conduite d’un étranger… ». […]

    Le 10 mai, de retour maintenant à Paris après un arrêt au passage à Weimar, Berlioz écrit de nouveau à Adèle (CG no. 1756):

[…] Les artistes de Dresde sont venus en corps pour me conduire au chemin de fer, et ceux de Weimar qui savaient que j’arrivais sont venus m’y attendre et m’y reconduire à une heure du matin.
Il y a en Allemagne des gredins comme partout, mais il faut avouer qu’il y a bien plus de cordialité et un plus profond sentiment de l’art que dans le reste de l’Europe.
On m’y a comblé de toutes les marques de sympathie, de respect même, et d’une affection qui me touche jusqu’au fond du cœur.
J’y gagne de l’argent en outre et ce n’est que par cette chère Allemagne que je vis. Ce contraste avec l’indifférence parisienne commence à faire à Paris une sensation qui ne peut avoir que de bons résultats. […]

    Le 4 juin il écrit à Auguste Morel (CG no. 1768):

[…] On me comble en Allemagne et je ne manquerai pas d’y aller le plus souvent possible. La chapelle de Dresde (chœurs et orchestre) est aujourd’hui la plus belle que je connaisse en Europe. Et quel feu, quel amour de l’art, quelle rapide compréhension! […]

    Les concerts de Berlioz à Dresde en avril et mai 1854 marquent sans doute le sommet de sa carrière de chef d’orchestre.

Suite et fin

    Le 18 octobre 1854 Berlioz termine le chapitre 59 des Mémoires où il évoque ses succès récents en Allemagne, entre autres sa visite à Dresde:

[…] M. de Lüttichau, l’intendant du roi de Saxe, m’a proposé la place de maître de chapelle de Dresde, qui ne tardera pas à être vacante. « Si vous vouliez (ce sont ses paroles), que de belles choses nous ferions ici! avec nos artistes que vous trouvez si excellents, et qui vous aiment tant, vous qui dirigez comme si peu de gens dirigent, vous feriez de Dresde le centre musical de l’Allemagne! » Je ne sais si je me déciderai à me fixer ainsi en Saxe quand le moment sera venu... C’est à bien examiner. Liszt est d’avis que je dois accepter. Mes amis de Paris sont d’un avis contraire. Mon parti n’est pas pris, et la place d’ailleurs est encore occupée. Il est question de mettre en scène, à Dresde, mon opéra de Cellini, que cet admirable Liszt a déjà ressuscité à Weimar.

Certainement alors j’irais en diriger les premières représentations. […]

    Il semble cependant que le projet de confier à Berlioz un poste de chef d’orchestre permanent à Dresde ait avorté sans aboutir à une offre concrète – à l’encontre de la proposition faite à Vienne en 1846 mais refusée par Berlioz. Le 14 novembre Berlioz écrit à Liszt et fait part d’une lettre qu’il vient de recevoir de Lüttichau: ‘Mais il ne me dit pas un mot de la proposition par lui faite, lors de mon dernier voyage, à propos de la place de maître de chapelle’ (CG no. 1811). L’opposition sur place était peut-être trop forte, et Lüttichau aurait tout simpliment abandonné l’idée sans bruit. L’occasion ne se représentera plus.

    Le projet de monter Benvenuto Cellini à Dresde fait l’objet de discussions approfondies au cours de l’année, et pendant les premiers mois de 1854 plusieurs lettres, la plupart à Liszt, en font mention (CG nos. 1691, 1739, 1746, 1748, 1756bis [tome VIII], 1762, 1771). Les pronostics semblent au départ favorables: le 2 juillet Berlioz écrit à Liszt que les journaux de Dresde annoncent la mise à l’étude de l’œuvre (CG no. 1773, cf. 1776). Puis subitement un contretemps imprévu; le 1er septembre Berlioz écrit à Hans von Bülow (CG no. 1785):

[…] Ma partition de Cellini ne saurait trouver un critique plus intelligent ni plus bienveillant que vous; laissez-moi vous remercier d’avoir songé à faire, dans le livre de M. Pohl [le projet d’un livre sur Berlioz], le travail qui s’y rapporte. Au reste, cette œuvre a décidément du malheur; le roi de Saxe se fait tuer au moment où on allait s’occuper d’elle à Dresde… C’est de la fatalité antique […]

    Le roi de Saxe venait de mourir des suites d’un accident. Le mois suivant (14 novembre) Lüttichau écrit à Berlioz que le théâtre a décidé de monter d’abord L’Étoile du Nord de Meyerbeer et que Benvenuto Cellini serait donc renvoyé au moins jusqu’à la fin de l’année suivante (CG no. 1811). Entretemps Liszt décide de monter une fois de plus Benvenuto Cellini à Weimar en soirée de gala le 16 février 1856, en présence de Berlioz (une deuxième exécution aura lieu le 16 mars). À propos de cette soirée Berlioz écrit deux jours plus tôt à Tichatschek, le célèbre ténor du théâtre de Dresde qui a déjà chanté pour lui en 1843 (CG no. 2101 [tome VIII]):

[…] Permettez-moi de vous adresser une prière d’artiste. On donne ici mon opéra de Cellini samedi prochain [16 février], tout me fait espérer une bonne exécution. Ma plus haute ambition serait de voir cet ouvrage représenté à Dresde. Vous seriez un merveilleux Cellini. Venez l’entendre. Peut-être serez-vous satisfait du rôle. M. le Baron de Lüttichau est d’ailleurs, si je ne trompe, dans les meilleures intentions à cet égard, et un mot de vous suffirait à tout décider. Je vous aurai une grande obligation et une égale reconnaissance. Liszt m’encourage à vous faire cette demande un peu indiscrète sans doute, mais que vous me pardonnerez en tout cas, j’en suis sûr. En vous écrivant ainsi je sais à qui je m’adresse. […]

    Tichatschek répond le lendemain (CG no. 2101bis [tome VIII]):

[…] Comme je suis très enthousiasmé par vos compositions que j’ai déjà entendues, je n’ai pas à me poser de question, alors que ces œuvres brillent de tous leurs feux à l’horizon musical, cela me serait le plus grand honneur de participer, selon mes moyens, à votre Benvenuto Cellini, si son Excellence ordonne en août ou septembre prochain la mise à l’étude de votre opéra auquel il s’intéresse particulièrement et si des difficultés ne lui seront pas opposées de la part de la direction musicale.
Quelques lignes de votre main à son Excellence M. l’Intendant général von Lüttichau donneraient certainement le poids souhaité pour accélérer la mise en scène de votre opéra. Soyez assuré de mon dévouement le plus zélé. […]

    Quelle qu’en soit la raison – sans doute de nouveau des résistances sur place – le projet tournera court; il n’en sera plus question dans la correspondance du compositeur et par la suite Berlioz n’aura plus l’occasion de revenir à Dresde. On pourrait ici renvoyer à Adolphe Jullien [Hector Berlioz (1888), p. 223] qui affirme, mais sans fournir de témoignages, que c’est Reissiger le chef d’orchestre qui aurait empêché de faire monter Benvenuto Cellini à Dresde.

    Après le séjour à Dresde de 1854 Berlioz et Hans von Bülow continueront à entretenir des rapports amicaux. À l’occasion du voyage de Berlioz à Weimar en février 1856, Bülow lui écrit chaleureusement de Berlin où il vient d’être nommé à un nouveau poste (CG no. 2098, 10 février):

[…] Rien que la nouvelle de votre arrivée en Allemagne me rend infiniment heureux et réveille en moi le souvenir des beaux jours que j’ai passés il y a deux ans pendant votre séjour à Dresde. Je suis d’autant plus affligé de ne pouvoir me rendre aux bienheureux pauvres petits duchés de Saxe, qu’il semble peu probable de vous voir bientôt entrer à Berlin, pour y triompher selon les vœux des admirateurs de votre génie.
La cohorte en est encore petite mais elle forme cependant déjà une ombre de parti, dont l’enthousiasme, je l’espère suppléera au commencement au peu de nombre. […] (Bülow parle ensuite de son ambition de créér à Berlin une collection de partitionsde Berlioz) […]
J’avais espéré, que vous voudriez bien me confier l’arrangement à quatre mains de votre ouverture du Corsaire. Permettez-moi de vous demander en cas de besoin d’arrangeur, de m’offrir comme tel à votre service, et ne veuillez point prendre pour un excès de vanité ma conviction de pouvoir essayer de faire mieux, que par exemple l’arrangement un peu inintelligible, qui vient de paraître pour la scène d’amour de Roméo et Juliette.
En attendant, recevez l’expression renouvelée de mon admiration enthousiaste et du profond dévouement que je ne cesserai point de professer hautement pour votre personne et pour votre noble cause. […]

    Berlioz répond longuement et sur le même ton deux jours plus tard, accepte son offre, promet d’envoyer à von Bülow ses partitions disponibles, et évoque la possibilité d’un concert à Berlin comprenant le Te Deum et l’Enfance du Christ (CG no. 2100). En août de la même année (1856) von Bülow se rend à Bade pour assister au concert que Berlioz y donne (cf. CG nos. 2163, 2168). En 1857, écrivant à l’éditeur Rieter-Biedermann, Berlioz loue l’arrangement pour piano fait par von Bülow de l’ouverture du Corsaire (CG no. 2218). En 1858 von Bülow écrit de nouveau avec des nouvelles de Berlin, et Berlioz réagit avec une lettre particulièrement animée (CG no. 2273, 20 janvier):

[…] Votre foi, votre ardeur, vos haines même, me ravissent. J’ai, comme vous, encore des haines terribles et des ardeurs volcaniques; mais, quant à moi, je crois fermement qu’il n’y a rien de vrai, rien de faux, rien de beau, rien de laid… N’en croyez pas un mot, je me calomnie… Non, non, j’adore plus que jamais ce que je trouve beau, et la mort n’a pas, à mon sens, de plus cruel inconvénient que celui-ci: ne plus aimer, ne plus admirer. Il est vrai qu’on ne s’aperçoit pas qu’on n’aime plus. Pas de philosophie, autrement dit, pas de bêtises. […]

    Mais une lettre de Berlioz à son fils Louis quelques jours plus tard, le 24 janvier, donne un son différent (CG no. 2274):

[…] J’ai reçu, il y a quelques jours, une longue lettre de M. de Bülow, l’un des gendres de Liszt, celui qui a épousé mademoiselle Cosima. Il m’apprend qu’il a donné sous sa direction un concert à Berlin et qu’il y a fait exécuter avec grand succès mon ouverture de Cellini et un petit morceau de chant: le Jeune Pâtre breton. Ce jeune homme est l’un des plus fervents disciples de cette école insensée qu’on appelle en Allemagne l’école de l’avenir. Ils n’en démordent pas et veulent absolument que je sois leur chef et leur porte-drapeau. Je ne dis rien, je n’écris rien, je ne puis que les laisser faire; les gens de bon sens sauront voir ce qu’il y a de vrai. […]

    Bülow, comme son maître Liszt, était fervent à la fois de Wagner et de Berlioz, et s’affligeait de voir Berlioz refuser de partager leur admiration; leurs rapports extérieurs n’en resteront pas moins cordiaux et les deux hommes continueront à se vouer une estime réciproque. Au printemps de 1859 Bülow est de passage à Paris pour rendre visite à sa belle-mère (la Comtesse d’Agoult) et donner des récitals; dans le Journal des Débats du 19 mai 1859, Berlioz rend compte avec éloge d’un concert qu’il a donné le 5 mai (CG no. 2380, à la Princesse Sayn-Wittgenstein, 20 juin; cf. nos. 2354bis, 2365bis, 2372ter [tous dans le tome VIII]). Au début de 1864 Bülow aide le jeune compositeur danois Asger Hamerik à faire la connaissance de Berlioz. Malgré sa déception devant l’attitude de Berlioz envers Wagner, Bülow continue à admirer et jouer la musique de Berlioz (cf. CG. no. 3241, 12 mai 1867), mais pour Berlioz le problème de Wagner et de ses disciples sème la discorde et trouble sa vision du monde musical allemand. Selon Berlioz, et par rapport à ce qu’il a connu dans les années 1840 et 1850, ce monde est maintenant en train d’évoluer pour le pire. On ne peut qu’être attristé par ces lignes qui détonnent dans une lettre de Berlioz à Auguste Morel à l’été de 1864 (CG no. 2888, 21 août):

[…] Il y a après-demain grand festival à Carlsruhe, Liszt y est venu de Rome; ils vont y faire de la musique à arracher les oreilles, c’est le conciliabule de la jeune Allemagne, présidé par Hans de Bülow. […]

Dresde en images

    Sauf indication contraire, toutes les photos modernes reproduites sur cette page ont été prises par Michel Austin en avril 2008; les autres images ont été saisies à partir de cartes postales et de gravures de notre collection. © Michel Austin et Monir Tayeb. Tous droits de reproduction réservés.

1. Dresde d’autrefois

1.1 La ville – vues générales

    La ville que Berlioz a visité et admiré en 1843 puis en 1854, l’un des joyaux de l’Allemagne du 19ème siècle, n’est plus: elle fut détruite pendant la deuxième guerre mondiale par l’aviation britannique et américaine utilisant des bombes au phosphore dans une série de raids du 13 au 15 février 1945, entraînant la mort de quelque 35,000 personnes. Après la guerre la ville fut remise sur pied avec grand soin par ses habitants et de nombreux monuments anciens restaurés, mais la reconstruction ne put forcément être que partielle.

Dresde en 1842
Dresde

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Dresden-Neustadt en 1860
Dresde

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Dresde en 1899
Dresde

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Dresde vers 1900
Dresde

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    Cet image est dans le domaine public.

Dresde au début du XXe siècle
Dresde

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1.2 Le théâtre de Dresde

    Le théâtre où Berlioz donne ses concerts en 1843 et en 1854 fut construit dans le style du début de la Renaissance par l’architecte allemand Gottfried Semper (1803-1879); il ouvre ses portes en 1841. Il a été connu sous divers noms: le Dresdner Hoftheater ou Hoftheater tout court (le Théâtre de Cour de Dresde), le Theater zu Dresden (le Théâtre de Dresde), le Théâtre de la Cour, le Semperoper (l’Opéra Semper), le Sächsische Staatsoper Dresden (le Théâtre d’État de Saxe), et le Théâtre de l’Opéra Royal de Saxe. Le premier bâtiment fut détruit dans un incendie en 1869.

    Le nouveau théâtre, le Neues Hoftheater, fut aussi connu sous le nom de Semperoper: construit en effet dans le style de la haute Renaissance par Manfred Semper, fils du premier architecte et d’après les plans de son père, il ouvre ses portes en 1878. Le théâtre est situé sur le Theaterplatz [Place du Théâtre] au centre de Dresde sur les bords de l’Elbe. Pendant sa construction les représentations avaient lieu au Gewerbehaussaal (Salle du Commerce), la première véritable salle de concert de Dresde qui ouvre ses portes en 1870. Détruit par les bombardements britanniques et américains en février 1945 l’opéra est reconstruit de manière presque identique au précédent bâtiment et rouvre ses portes le 13 février 1985 avec une représentation du Freischütz de Weber, le dernier ouvrage à y être joué avant la destruction de l’opéra.

Le théâtre de Dresde en 1841
Théâtre de Dresde

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Le théâtre de Dresde vers 1850
Théâtre de Dresde

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L’intérieur du théâtre de Dresde au XIXe siècle
Théâtre de Dresde

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    Cette gravure contemporaine de J. C. A. Richter est dans le domaine public.

Le Neues Hoftheater
Neues Hoftheater

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Le Neues Hoftheater
Neues Hoftheater

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1.3 La gare de chemin de fer de Dresde

    La première ligne de chemin de fer à longue distance en Allemagne est ouverte entre Dresde et Leipzig le 7 avril 1839 – c’est la ligne utilisée par Berlioz le 2 février 1843 pour faire le voyage aller-retour entre les deux villes en un jour. ‘Puissance des chemins de fer! s’écrie-t-il à son père (CG no. 820). La gare, appelée ‘Bahnhof der leipzig-dresdener Eisenbahn’, se trouvait à l’ouest du centre de Neustadt (la ville neuve), en dehors des anciennes fortifications. Malheureusement rien n’a survécu des bâtiments d’origine. On trouvera des illustrations à partir de gravures de l’époque dans la page Un voyage en train de Leipzig à Dresde en 1843.

    Une nouvelle gare, appelée ‘Böhmischer Bahnhof’, est ouverte en 1851 sur le site de la ville ancienne (Altstadt), et sera reliée par un nouveau pont sur l’Elbe, le Marienbrücke, à la gare de Leipzig-Dresde ainsi qu’à l’autre gare, appelée ‘Schlesische Bahnhof’, située elle-aussi à Neustadt. Le lien est terminé en 1852. La nouvelle gare aura été utilisée par Berlioz en 1854.

    Par suite de l’accroissement du traffic entre Neustadt et Altstadt, on construit deux grandes gares passagères dans la dernière décennie du 19ème siècle – la gare principale de Dresde (Hauptbahnhof) sur le site de la Böhmischer Bahnhof au sud de la ville ancienne, et la Bahnhof Dresden-Neustadt, sur le site de la Schlesische Bahnhof; cette dernière assume les fonctions des deux gares anciennes de Neustadt. La gare principale est ouverte en 1897, et l’autre le 1er mars 1901. Endommagée au cours de la deuxième guerre mondiale la gare principale sera reconstruite par la suite. L’autre gare sera moins touchée.

La gare de chemin de fer de Dresde en 1839-40
Gare de chemin de fer

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    Cette gravure de 1840 montre la gare vue d’un train en provenance de Leipzig. La gravure suivante, datant de 1841, montre l’extérieur de la gare vu de la rue.

La gare de chemin de fer de Dresde en 1839-40
Gare de chemin de fer

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Böhmischer Bahnhof en 1851
Böhmischer Bahnhof

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    Cette gravure vient d’un numéro spécial du Eisenbahn Journal, “Über 150 Jahre Dresdener Bahnhöfe”, juin 1991.

La gare de chemin de fer principale de Dresden-Neustadt en 1914
Gare de Dresden-Neustadt

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La gare de chemin de fer principale de Dresde (Hauptbahnhof) en 1898
Hauptbahnhof

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La gare de chemin de fer principale de Dresde (Hauptbahnhof) vers 1900
Hauptbahnhof

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2. Dresde de nos jours

Vue de Dresde de l’autre côté de l’Elbe
Dresde

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Le Semperoper
Semperoper

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Le Semperoper
Semperoper

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Le Semperoper
Semperoper

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La gare de chemin de fer de Dresden-Neustadt
Gare de Dresden-Neustadt

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La gare de chemin de fer de Dresden-Neustadt
– La plaque commémorative
Plaque

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    Cette plaque commémore le 150ème anniversaire de la fondation de la première ligne de chemin de fer à longue distance d’Allemagne, entre Leipzig et Dresde.

La gare de chemin de fer principale de Dresde (Hauptbahnhof)
Hauptbahnhof

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Site Hector Berlioz créé par Michel Austin et Monir Tayeb le 18 juillet 1997.
Page Berlioz à Dresde créée le 1er mars 2007; augmentée le 15 février 2010. Révision le 1er mars 2024.

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