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Les rapports de Berlioz avec le Conservatoire, rapports complexes et souvent ambigus, sont un des fils conducteur qui traversent sa carrière à Paris; on les trouvera évoqués ailleurs sur ce site. La présente page se propose de poursuivre cette question après la mort de Berlioz, et rassemble à cette intention les données relatives aux exécutions de la musique de Berlioz au Conservatoire, du lendemain de sa mort en 1869 jusqu’au début de la première guerre mondiale en 1914. Les données sont exposées ci-dessous sous forme d’une table chronologique, elle-même appuyée par des extraits d’annonces et de comptes-rendus de concerts tirés de l’hebdomadaire Le Ménestrel. Cette page sert donc de complément aux pages qui traitent du destin de la musique de Berlioz à Paris au cours de cette période: les pages sur le renouveau après 1869, et celles sur les principaux chefs d’orchestre qui ont mené le mouvement, Jules Pasdeloup, Édouard Colonne (le plus important), mais aussi Charles Lamoureux, ainsi que les successeurs de ces deux derniers. Prises ensemble ces pages fournissent une vue d’ensemble, sinon un tableau complet, des exécutions données à Paris entre 1869 et 1914 de la musique de Berlioz pour orchestre, chœurs et voix. Pour ses ouvrages dramatiques (c’est-à-dire les trois opéras, Benvenuto Cellini, les Troyens et Béatrice et Bénédict, et les mises en scène de la Damnation de Faust), on consultera la page sur les Opéras de Berlioz en France 1869-1914.
Fondée en 1828 avec François Habeneck comme son premier chef d’orchestre, la Société des concerts du Conservatoire est la plus ancienne société de son genre à Paris, et différe à plusieurs points de vue des autres grandes sociétés de concerts fondées par la suite par les trois chefs mentionnés ci-dessus, les Concerts populaires fondés par Jules Pasdeloup en 1861, les Concerts Colonne fondés par Édouard Colonne en 1873-4, et les Concerts Lamoureux fondés par Charles Lamoureux en 1881. Les différences concernent pratiquement tous les aspects de son activité: la salle elle-même, son auditoire, ses programmes, ses chefs d’orchestre, et l’esprit qui anime le Conservatoire.
Les autres sociétés de concerts souffrent tous d’un même inconvénient: elles sont obligées de se produire dans des salles — théâtres et cirques — qui n’ont pas été conçues au départ pour les concerts symphoniques. Le Conservatoire, par contre, a l’inestimable avantage d’avoir dès l’origine sa propre salle de concert, de loin la meilleure à Paris, de l’aveu unanime et réputée pour son acoustique (voir par exemple les remarques d’Auguste Morel en 1878 ou de Julien Tiersot en 1911). Pendant toute une saison, de 1897 à 1898, le Conservatoire se voit obligé de fermer ses portes pour procéder à des rénovations: c’est alors que la bibliothèque, dont Berlioz avait été le bibliothécaire, sera transférée à de nouveaux locaux à la Rue de Madrid, et pendant cette saison les concerts seront donnés à l’Opéra, moins adapté aux concerts. Mais la salle sera ouverte de nouveau pour les concerts dès la saison suivante, et on continuera à s’en servir à cette fin jusqu’à la deuxième guerre mondiale.
Construite entre 1806 et 1811, à une époque où le public pour les concerts est moins nombreux, les dimensions de la salle sont modestes: elle ne peut accueillir qu’un peu plus de 1000 personnes. On se voit donc à la longue obligé de diviser les abonnés en deux groupes, première et second série, et les programmes sont donnés deux semaines de suite pour permettre aux abonnés de les entendre chacun à leur tour. Mais l’accès aux listes d’abonnés est de toute façon considéré comme un privilège pour les bien nantis, et parmi les abonnés ceux de la première série jouissent d’un statut préférentiel, puisqu’ils peuvent assister aux concerts une semaine plus tôt. Les concerts du Conservatoire s’adressent par conséquent à une fraction seulement du public mélomane de Paris, ce qui explique en partie le développement plus tard dans le 19ème siècle de nouvelles sociétés de concerts qui peuvent accueillir un public plus nombreux: les concerts populaires de Pasdeloup comptent jusqu’à 5000 auditeurs, et le théâtre du Châtelet, la salle régulière des Concerts Colonne, compte 3600 places (la Ville de Paris exige d’ailleurs qu’au Châtelet un nombre de places soit offertes au public à prix réduit à l’intention des personnes de ressources modestes). Ajoutons en passant que dans la période couverte d’autres sociétés de concerts tenteront de se lancer de temps en temps (par exemple le Concert Cressonnois en 1878, le Concert Sechiari en 1911), mais sans obtenir le succès des deux grandes sociétés de Colonne et Lamoureux (les concerts populaires de Pasdeloup sont suspendus en 1884; la mort de Pasdeloup en 1887 met fin à une tentative de relance l’année précédente, et les Concerts Pasdeloup ne reprendront qu’après la première guerre mondiale). Du fait des dimensions modestes de l’auditoire des concerts du Conservatoire et de son recrutement parmi les mieux nantis, on s’attendra à ce que ses goûts en musique soient portés à la prudence et son comportement correct (voir par exemple Le Ménestrel 30/12/1888, 27/2/1898): pas question au Conservatoire de l’exubérance, voire même du désordre qui peuvent se manifester à l’occasion aux concerts de Pasdeloup et de Colonne (l’auditoire de Lamoureux semble par contre avoir été plus discipliné, suivant en cela les préférences de son chef d’orchestre).
Au Conservatoire la place tenue par les chefs d’orchestre diffère aussi: alors que les nouvelles sociétés de concerts sont dominées par la personnalité des chefs qui les ont fondées et leur prêtent leur nom, les chefs d’orchestre du Conservatoire se font moins remarquer à titre individuel et changent d’ailleurs plus souvent. Entre 1872 et 1914 on compte pas moins de cinq chefs différents de suite: Ernest Deldevez (1817-1897) de 1872 à 1884, Jules Garcin (1830-1896) de 1885 à 1892, Paul Taffanel (1844-1908) de 1892 à 1901, Georges Marty (1860-1908) de 1901 à 1908, et André Messager (1853-1929) de 1908 à 1919 (dans la table des concerts ci-dessous on supposera que tous les concerts entre certaines dates sont dirigés, sauf indication contraire, par le chef en fonction à ce moment; par exemple entre 1872 et 1884 tous les concerts sont d’ordinaire sous la direction de Delvedez). Jusqu’à André Messager tous les chefs sont eux-mêmes élèves du Conservatoire; trois d’entre eux, Deldevez, Garcin et Marty, y deviennent aussi professeurs par la suite, tandis que Taffanel est un flûtiste renommé dans l’orchestre du Conservatoire avant d’en devenir le chef. Fait significatif, il est fréquent que les comptes-rendus de concerts au Conservatoire ne mentionnent même pas le nom du chef d’orchestre (une exception: Le Ménestrel 4/12/1892), mais soulignent par contre les qualités de l’orchestre pris dans son ensemble (voir par exemple Le Ménestrel 2/4/1899). De manière générale, les chefs d’orchestre du Conservatoire, d’ailleurs excellents musiciens, ne se produisent pas aussi souvent à l’étranger que ne le font Pasdeloup, Colonne et Lamoureux (ainsi que leurs successeurs). Autre caractéristique du Conservatoire: on n’invite pas de chefs étrangers, et notamment les plus célèbres chefs allemands de l’époque, dont les concerts à Paris à partir des années 1890 sont une des grandes attractions chez Colonne et Lamoureux (par exemple en mars 1894 Colonne invite Felix Mottl et Hermann Levi à diriger son orchestre, et Felix Weingartner est invité par Lamoureux en février 1898).
En ce qui concerne son répertoire, le Conservatoire semble avoir estimé que son premier rôle était de conserver: dans la composition de ses programmes il privilégie la musique du passé et les œuvres devenues de longue date classiques. Elles les exécute d’ailleurs magnifiquement: l’orchestre du Conservatoire des années 1830 et 1840 était réputé le meilleur d’Europe, mais même après l’avènement de nouvelles sociétés de concerts qui rivalisent avec elle, comme Lamoureux le fait explicitement, son orchestre reste d’un très haut niveau, comme les comptes-rendus le soulignent souvent (voir par exemple Le Ménestrel 4/12/1892; 2/2/1896; 27/2/1898; 2/4/1899). Mais pour ce qui est de la musique de compositeurs contemporains ou presque (comme Wagner et Berlioz, entre autres, mais aussi d’autres compositeurs français contemporains), la prudence est son mot d’ordre: c’est ici que les sociétés de Colonne et Lamoureux le laissent loin derrière.
Quant à la musique de Berlioz en particulier, le Conservatoire, qui dans les années 1830 avait donné la première exécution de plusieurs de ses grandes œuvres symphoniques — notamment la Symphonie fantastique, Harold en Italie, et Roméo et Juliette — prend par la suite ses distances (on trouvera une liste complète de toutes les exécutions de la musique de Berlioz à Paris de son vivant, y compris au Conservatoire, sur la page Concerts et exécutions 1825-1869 et sa page annexe de Textes et documents). Dans les années 1860 le Conservatoire ne donne qu’un nombre très limité d’exécutions: des extraits de la 2ème partie de la Damnation de Faust (7 avril 1861), la 2ème partie de l’Enfance du Christ (3 et 10 avril 1864, 1er avril 1866), le duo de Béatrice et Bénédict (22 mars, 5 et 8 avril 1863; 22 mars 1865). À la mort de Berlioz le Conservatoire ne fait rien pour commémorer l’évènement mais laisse ce soin à d’autres: rien de Berlioz n’est joué par lui avant 1872. La table ci-dessous donne un inventaire des exécutions de Berlioz au Conservatoire jusqu’à 1914, et le contraste avec les programmes de Pasdeloup, et surtout de ceux de Colonne, est très évident. De manière générale le Conservatoire se montre timide et se limite à des œuvres qui font partie du répertoire commun et ne peuvent plus prêter à la controverse. Le morceau de loin le plus fréquemment entendu est l’ouverture du Carnaval romain (43 exécutions en tout). Parmi les autres ouvertures, les Francs-Juges, le Corsaire et Benvenuto Cellini reçoivent chacune 4 exécutions, contre seulement 2 pour le Roi Lear et Rob-Roy (cette dernière à l’occasion du centenaire en 1903). Avec les œuvres de plus grande envergure le Conservatoire préfère donner des fragments plutôt que l’œuvre intégrale: on joue des extraits plus ou moins étendus de Roméo et Juliette assez souvent (25 fois en tout), pratique qui suscitera un commentaire hostile de la part du critique qui s’attendait à une exécution vraiment intégrale (Le Ménestrel 3/2/1889; en l’occurrence l’ouvrage est joué dans son intégralité 8 fois en tout). La 2ème partie de l’Enfance du Christ a visiblement la faveur du public (18 exécutions), mais l’ouvrage entier n’est entendu que 6 fois et bien tardivement. La Damnation de Faust, de loin l’ouvrage le plus populaire de Berlioz en France après sa mort et la pièce de résistance du répertoire de Colonne (il en donne pas moins de 157 exécutions), n’est joué qu’en extraits (24 fois en tout), mais jamais intégralement. Tristia no. 2 (la Mort d’Ophélie) plaît (13 exécutions), mais le no. 3, l’imposante Marche funèbre pour la dernière scène d’Hamlet, n’est entendu que 3 fois, et les 3 morceaux de l’ouvrage ensemble jamais. Harold en Italie ne reçoit qu’une exécution intégrale (en 1907). Une exécution du dernier mouvement de la Symphonie funèbre est préparée au Panthéon pour les cérémonies du 14 juillet en 1898, mais ensuite supprimée. Il est particulièrement frappant que la Symphonie fantastique, qui avait reçu sa première exécution au Conservatoire en 1830 et que Colonne exécute 45 fois, n’est jamais entendue dans ces années: l’ouvrage est sans doute jugé trop risqué pour le public du Conservatoire. Manquent aussi au répertoire du Conservatoire, et on le comprend, sont les ouvrages qui nécessitent un vaste local: le Requiem et le Te Deum. Mais on n’essaie même pas de donner une exécution intégrale au concert d’un opéra de Berlioz, ce que Pasdeloup et Colonne avait parfois fait: on se contente de donner le duo de Béatrice et Bénédict (8 fois), et deux scènes des Troyens sont exécutées deux fois (1899). Les mélodies, y compris les Nuits d’été, se signalent par leur absence. Quelques rares exécutions d’autres morceaux (Sara la baigneuse, le Chant sacré, la Marche troyenne) complètent le bilan.
Mais il serait injuste de conclure sur un bilan négatif. Parmi les chefs d’orchestre du Conservatoire l’initiative de l’un d’entre eux mérite plus particulièrement d’être signalée. La nomination d’Ernest Deldevez en 1872, en remplacement de George Hainl, marque un tournant: c’est l’avènement d’un chef qui a la réputation d’être dévoué à la musique de Berlioz. Il a connu le compositeur et lui a prêté son appui avec la correction des épreuves de la Damnation de Faust, ouvrage qu’il connaît et admire. Pendant ses années au pupitre de l’orchestre on constate une part accrue de la musique de Berlioz dans la programmation; Deldevez aide notamment à jeter les fondements de la future popularité de la Damnation de Faust en en faisant jouer d’abord des extraits, puis finalement en 1876 les deux premières parties intégralement, ce que personne n’avait fait à Paris depuis les premières exécutions de l’ouvrage en 1846. Il donne aussi Roméo et Juliette intégralement quatre fois, en 1880 et 1883 (la prochaine intégrale de l’œuvre aura lieu à l’occasion du centenaire en 1903). Grâce à Deldevez le Conservatoire prend donc part au renouveau de Berlioz (cf. Le Ménestrel 18/2/1883). Citons pour conclure le rôle des deux derniers chefs de cette période, Georges Marty et André Messager: à eux revient le mérite d’avoir enfin fait entendre au Conservatoire l’Enfance du Christ dans son intégralité, Marty deux fois en 1908, et Messager quatre fois en 1909 et 1912.
La table ci-dessous a été établie à partir d’annonces et de comptes-rendus dans le journal Le Ménestrel qui paraissait à Paris chaque semaine (d’abord le dimanche, puis à partir du 27 octobre 1906 le samedi), jusqu’à la veille de la première guerre mondiale (le dernier numéro paru avant la guerre est daté du 5 septembre 1914). La table se passe sans doute de commentaire. La colonne de droite a pour objet soit d’ajouter quelques notes de détail (par exemple pour préciser le chef d’orchestre s’il y a remplacement), soit pour donner des renvois aux comptes-rendus de concerts; jusqu’à mars 1884 ces comptes-rendus sont reproduits sur d’autres pages de ce site, et à partir de là on les trouvera sur cette page même ci-dessous. Jusqu’à 1884 les comptes-rendus sont dûs à différentes plumes (et ne sont pas toujours signés). À partir de 1885 et jusqu’à la fin de cette période ils sont pratiquement tous de la plume d’un seul critique, Arthur Pougin (1834-1921; photo ci-dessous); très lié au Conservatoire (c’est à lui qu’on doit les notices nécrologiques des quatre premiers chefs d’orchestre cités ci-dessus), il était collaborateur au Ménestrel dès février 1869 et a continué à y contribuer jusqu’à peu avant sa mort en 1921 (sur Pougin voir aussi la page sur Charles Malherbe). À l’encontre des concerts Colonne et Lamoureux, pour lesquels Le Ménestrel publie d’ordinaire pour chaque programme deux comptes-rendus différents par deux critiques à une semaine d’intervalle, les concerts du Conservatoire ne faisaient l’objet que d’un seul compte-rendu.
Dans la colonne d’œuvres de la table ci-dessous on a utilisé les abréviations suivantes: Béatrice = Béatrice et Bénédict, Carnaval = ouverture du Carnaval romain, Cellini = Benvenuto Cellini, Corsaire = ouverture du Corsaire, Damnation = la Damnation de Faust, Enfance = l’Enfance du Christ, Francs-Juges = ouverture des Francs-Juges, Harold = Harold en Italie, Marche = Marche hongroise de la Damnation, Roméo = Roméo et Juliette. Quand le titre est cité sans autre mention (par ex. Enfance) il indique une exécution intégrale de l’ouvrage.
Date | Œuvre | Le Ménestrel | Comptes-rendus/Notes |
1869 | |||
[Pas d’exécution de Berlioz] | |||
1870 | |||
[Pas d’exécution de Berlioz] | |||
1871 | |||
[Pas d’exécution de Berlioz] | |||
1872 | |||
7 janvier | Damnation (IIe partie, extraits) | 7/1, p. 47; 14/1, p. 55 | Jullien |
14 janvier | Damnation (IIe partie, extraits) | 14/1, p. 55 | |
3 mars | Damnation (extrait: Chœur de Gnomes et de Sylphes) | 3/3, p. 112; 10/3, p. 119 | |
13 mars | Chant sacré | 17/3, p. 127 | Dirigé par Guillot de Sainbris |
31 mars | Enfance (IIe partie) | 31/3, p. 144 | |
8 décembre | Damnation (IIe partie, extraits) | 15/12, p. 22 | Anon. |
15 décembre | Damnation (IIe partie, extraits) | 15/12, p. 22 | |
1873 | |||
9 mars | Carnaval | 16/3, p. 126 | Anon. |
6 avril | Damnation (air) | 30/3, p. 141; 6/4, p. 151; 13/4, p. 156 | Planté, piano |
23 avril | Damnation (air) | 20/4, p. 167; 28/4, p. 174 | Planté, piano |
7 décembre | Roméo (3e mouv.) | 14/12, p. 14 | Reyer, Anon. |
14 décembre | Roméo (3e mouv.) | 14/12, p. 15 | |
1874 | |||
1er mars | Carnaval | 1/3, p. 103 | |
8 mars | Carnaval | 8/3, p. 110 | |
22 novembre | Francs-Juges | 22/11, p. 406 | |
29 novembre | Francs-Juges | 29/11, p. 415; 6/12, p. 6 | |
27 décembre | Damnation (IIe partie, extraits) | 27/12, p. 30 | |
1875 | |||
3 janvier | Damnation (IIe partie, extraits) | 10/1, p. 47 | Anon., Reyer |
31 janvier | Tristia no. 2 | 31/1, p. 71 | |
7 février | Tristia no. 2 | 7/2, p. 79 | |
5 décembre | Carnaval | 5/12, p. 6; 12/12, p. 15 | |
12 décembre | Carnaval | 12/12, p. 15 | |
1876 | |||
13 février | Damnation 1ere et 2e parties | 6/2, p. 78; 13/2, p. 87; 20/2, p. 94 | Wilder, Reyer |
20 février | Damnation 1ere et 2e parties | 20/2, p. 95 | |
31 décembre | Roméo (3e mouv.) | 31/12, p. 39 | |
1877 | |||
7 janvier | Roméo (3e mouv.) | 7/1, p. 36 | Dirigé par Charles Lamoureux |
1878 | |||
10 février | Roméo (2e & 3e mouv.) | 10/2, p. 87 | Dirigé par Ernest Altès |
17 février | Roméo (2e & 3e mouv.) | 17/2, p. 95 | Dirigé par Ernest Altès |
17 mars | Tristia no. 2 | 17/3, p. 128; 24/3, p. 134 | |
24 mars | Tristia no. 2 | 24/3, p. 136 | |
31 mars | Carnaval | 31/3, p. 142 | |
7 avril | Carnaval | 7/4, p. 150 | |
28 avril | Harold (2e mouv.) | 21/4, p. 165; 5/5, p. 179 | Concert par les élèves du Conservatoire |
1er décembre | Carnaval | 1/12, p. 7; 8/12, p. 16 | Morel |
8 décembre | Carnaval | 8/12, p. 16 | |
1879 | |||
5 janvier | Roméo (fragments) | 5/1, p. 47; 12/1, p. 56 | Wilder, Reyer |
12 janvier | Roméo (fragments) | 12/1, p. 56 | |
30 novembre | Carnaval | 30/11, p. 420 | |
7 décembre | Carnaval | 30/11, p. 420 | |
1880 | |||
4 janvier | Tristia no. 2 | 4/1, p. 39 | Dirigé par Ernest Altès |
11 janvier | Tristia no. 2 | 11/1, p. 47 | Dirigé par Ernest Altès |
8 février | Roméo | 8/2, p. 79 | |
15 février | Roméo | 15/2, p. 86; 22/2, p. 94 | |
5 décembre | Corsaire | 5/12, p. 6; 12/12, p. 14 | Wilder |
12 décembre | Corsaire | 12/12, p. 14 | |
1881 | |||
9 janvier | Carnaval | 9/1, p. 46 | |
16 janvier | Carnaval | 16/1, p. 55 | |
27 février | Roméo (fragments) | 27/2, p. 104 | |
6 mars | Roméo (fragments) | 6/3, p. 112; 13/3, p. 119 | Wilder; dirigé par Ernest Altès |
1882 | |||
22 janvier | Damnation (fragments) | 22/1, p. 64 | |
29 janvier | Damnation (fragments) | 29/1, p. 71; 5/2, p. 78 | |
19 novembre | Carnaval | 19/11, p. 407; 26/11, p. 415 | |
26 novembre | Carnaval | 26/11, p. 415 & 416 | |
1883 | |||
28 janvier | Roméo | 28/1, p. 72; 4/2, p. 79 | |
4 février | Roméo | 4/2, p. 80 | |
23 mars | Enfance (IIe partie) | 18/3, p. 127 | Vendredi Saint |
24 mars | Enfance (IIe partie) | 18/3, p. 127; 25/3, p. 134 | Anon. |
1884 | |||
10 février | Tristia no. 2 | 10/2, p. 88; 17/2, p. 95 | |
17 février | Tristia no. 2 | 17/2, p. 96 | |
16 mars | Roméo (fragments) | 16/3, p. 128; 23/3, p. 135 | Anon. |
23 mars | Roméo (fragments) | 23/3, p. 136 | |
7 décembre | Francs-Juges | 7/12, p. 8; 14/12, p. 14 | |
14 décembre | Francs-Juges | 14/12, p. 14 | |
1885 | |||
8 février | Carnaval | 8/2, p. 80 | |
15 février | Carnaval | 15/2, p. 88 | |
22 mars | Enfance (IIe partie) | 22/3, p. 128; 29/3, p. 134 | Pougin |
29 mars | Enfance (IIe partie) | 29/3, p. 136 | |
1886 | |||
17 janvier | Enfance (IIe partie) | 17/1, p. 56 | |
24 janvier | Enfance (IIe partie) | 24/1, p. 63 | |
21 février | Carnaval | 21/2, p. 95; 28/2, p. 104 | Pougin |
1887 | |||
27 février | Carnaval | 27/2, p. 102; 6/3, p. 110 | |
6 mars | Carnaval | 6/3, p. 111 | |
1888 | |||
23 décembre | Enfance (IIe partie) | 23/12, p. 415; 30/12, p. 419-20 | Pougin |
30 décembre | Enfance (IIe partie) | 30/12, p. 420 | |
1889 | |||
27 janvier | Roméo (avec coupures) | 27/1, p. 31; 3/2, p. 39 | Pougin |
3 février | Roméo (avec coupures) | 3/2, p. 39 | |
2 mars | Marche troyenne | 24/2, p. 62 | Exécuté par la Musique de la Garde républicaine |
8 décembre | Carnaval | 8/12, p. 390; 15/12, p. 397 | |
15 décembre | Carnaval | 15/12, p. 397 | |
1890 | |||
2 mars | Béatrice (duo) | 2/3, p. 70 | |
9 mars | Béatrice (duo) | 9/3, p. 77 | |
1891 | |||
8 mars | Carnaval | 8/3, p. 77; 15/3, p. 85 | |
15 mars | Carnaval | 15/3, p. 86 | |
19 avril | Enfance (IIe partie) | 19/4, p. 127; 26/4, p. 133 | |
26 avril | Enfance (IIe partie) | 26/4, p. 134 | |
6 décembre | Béatrice (duo) | 6/12, p. 391; 13/12, p. 397 | |
13 décembre | Béatrice (duo) | 13/12, p. 397 | |
20 décembre | Damnation (extraits) | 20/12, p. 405; 27/12, p. 412 | Pougin |
27 décembre | Damnation (extraits) | 27/12, p. 413 | |
1892 | |||
10 janvier | Harold (2e mouv.) | 17/1, p. 20 | Dirigé par Danbé |
17 janvier | Harold (2e mouv.) | 17/1, p. 21 | |
11 décembre | Roméo (extraits) | 11/12, p. 397; 18/12, p. 405 | Pougin |
18 décembre | Roméo (extraits) | 18/12, p. 406 | |
1893 | |||
10 décembre | Enfance (IIe partie) | 10/12, p. 396; 17/12, p. 404 | Pougin |
17 décembre | Enfance (IIe partie) | 17/12, p. 405 | |
24 décembre | Carnaval | 24/12, p. 413; 31/12, p. 419 | |
31 décembre | Carnaval | 31/12, p. 419 | |
1894 | |||
[Pas d’exécution de Berlioz] | |||
1895 | |||
31 mars | Cellini (ouverture) | 31/3, p. 101; 7/4, p. 109 | |
7 avril | Cellini (ouverture) | 7/4, p. 109 | |
1896 | |||
26 janvier | Roméo (extraits) | 26/1, p. 30; 2/2, p. 38 | Pougin |
22 mars | Carnaval | 22/3, p. 92; 29/3, p. 100 | |
29 mars | Carnaval | 29/3, p. 101 | |
3 avril | Enfance (IIe partie) | 5/4, p. 109 | Vendredi Saint |
13 décembre | Cellini (ouverture) | 13/12, p. 397; 20/12, p. 404 | |
20 décembre | Cellini (ouverture) | 20/12, p. 404 | |
1897 | |||
3 janvier | Marche | 3/1, p. 6; 10/1, p. 13 | |
10 janvier | Marche | 10/1, p. 13 | |
12 décembre | Béatrice (duo) | 12/12, p. 396; 19/12, p. 404 | Concert à l’Opéra |
19 décembre | Béatrice (duo) | 19/12, p. 404 | |
1898 | |||
20 février | Roméo (extraits) | 20/2, p. 61; 27/2, p. 68 | Pougin |
27 février | Roméo (extraits) | 27/2, p. 68 | |
17 avril | Carnaval | 17/4, p. 124 | |
[14 juillet] | [Symphonie funèbre (Apothéose)] | 10/7, p. 222; 17/7, p. 226-7 | Tiersot (Panthéon; pas exécutée) |
1899 | |||
8 janvier | Le Roi Lear | 8/1, p. 14; 15/1, p. 20 | Concert au Conservatoire |
15 janvier | Le Roi Lear | 15/1, p. 21 | |
5 février | Tristia nos. 2 & 3 | 5/2, p. 46; 12/2, p. 53 | Pougin |
12 février | Tristia nos. 2 & 3 | 12/2, p. 54 | Jullien |
26 mars | La Prise de Troie (2e et 3e scènes) | 26/3, p. 101; 2/4, p. 109 | Pougin |
9 avril | La Prise de Troie (2e et 3e scènes) | 9/4, p. 116 | Jullien |
17 décembre | Marche hongroise | 17/12, p. 404; 24/12, p. 412 | |
24 décembre | Marche hongroise | 24/12, p. 412 | |
1900 | |||
7 janvier | Carnaval | 7/1, p. 4; 14/1, p. 13 | |
14 janvier | Carnaval | 14/1, p. 13 | |
21 janvier | Enfance (IIe partie) | 28/1, p. 28 | Pougin |
28 janvier | Enfance (IIe partie) | 28/1, p. 29 | |
4 février | Roméo (extraits) | 4/2, p. 37; 11/2, p. 46 | |
11 février | Roméo (extraits) | 11/2, p. 46 | |
31 mai | Roméo (IIe partie) | 27/5, p. 167 | Trocadéro; premier concert de l’Exposition |
1901 | |||
10 février | Cellini (ouverture) | 10/2, p. 45; 17/2, p. 52 | |
17 février | Cellini (ouverture) | 17/2, p. 53 | |
29 décembre | Corsaire | 29/12, p. 412; 5/1/1902, p. 5 | |
1902 | |||
5 janvier | Corsaire | 5/1, p. 6 | |
7 décembre | Damnation (chœur des soldats et étudiants) | 7/12, p. 389; 14/12, p. 396 | |
14 décembre | Damnation (chœur des soldats et étudiants) | 14/12, p. 396 | |
1903 | |||
1er février | Carnaval | 1/2, p. 38; 8/2, p. 45 | |
8 février | Carnaval | 8/2, p. 45 | |
22 mars | Sara la baigneuse | 22/3, p. 93; 29/3, p. 100-1 | Pougin |
29 mars | Sara la baigneuse | 29/3, p. 101 | |
6 décembre | Rob Roy, Roméo | 6/12, p. 389; 13/12, p. 396 | Pougin |
13 décembre | Rob Roy, Roméo | 13/12, p. 396 | |
1904 | |||
5 mai | Tristia nos. 2 & 3 | 1/5, p. 143; 8/5, p. 150 | Pougin |
1905 | |||
5 février | Carnaval | 5/2, p. 45; 12/2, p. 52 | |
12 février | Carnaval | 12/2, p. 53 | |
26 mars | Tristia no. 2 | 26/3, p. 100; 2/4, p. 109 | |
2 avril | Tristia no. 2 | 2/4, p. 109 | |
21 avril | Damnation (IIe partie, extraits) | 23/4, p. 133 | Vendredi Saint |
1906 | |||
11 février | Enfance (IIe partie) | 11/2, p. 45; 18/2, p. 53 | |
18 février | Enfance (IIe partie) | 18/2, p. 53 | |
1907 | |||
10 mars | Harold | 9/3, p. 76 | Première exécution au Conservatoire depuis 1843; pas de compte-rendu publié |
14 avril | Béatrice (duo) | 13/4, p. 119 | |
21 avril | Béatrice (duo) | 20/4, p. 127 | |
1908 | |||
1er mars | Enfance | 29/2, p. 68 | Première exécution intégrale au Conservatoire; voir le programme ci-dessous |
8 mars | Enfance | 7/3, p. 76 | Jullien |
1909 | |||
14 février | Roméo | 13/2, p. 52; 20/2, p. 60 | Pougin |
21 février | Roméo | 20/2, p. 61 | |
19 décembre | Enfance | 18/12, p. 404; 25/12, p. 412 | Pougin |
26 décembre | Enfance | 25/12, p. 412 | Jullien |
1910 | |||
23 janvier | Carnaval | 22/1, p. 29 | |
30 janvier | Carnaval | 29/1, p. 36; 5/2, p. 45 | |
1911 | |||
26 février | Carnaval | 25/2, p. 62; 4/3, p. 68 | |
5 mars | Carnaval | 4/3, p. 69 | |
1912 | |||
28 janvier | Roméo (IVe et IIe parties) | 27/1, p. 28; 3/2, p. 37 | |
4 février | Roméo (IVe et IIe parties) | 3/2, p. 37 | |
24 novembre | Carnaval | 23/11, p. 373; 30/11, p. 380 | |
1er décembre | Carnaval | 30/11, p. 380 | |
22 décembre | Enfance | 21/12, p. 405; 28/12, p. 412 | Pougin |
29 décembre | Enfance | 28/12, p. 413 | |
1913 | |||
[Pas d’exécution de Berlioz] | |||
1914 | |||
1er mars | Carnaval | 28/2, p. 68; 7/3, p. 76 |
Pour la période allant de 1873 à mai 1884 on a ajouté des renvois à des textes déjà transcrits ailleurs sur ce site, notamment sur la page Articles et comptes-rendus de concerts, 1869-1884, articles qu’il n’y pas lieu de reproduire ici de nouveau. À partir de 1884 tous les textes transcrits proviennent de l’hebdomadaire Le Ménestrel et ont été transcrits à partir du site internet de la Bibliothèque nationale de France. Nous avons conservé la syntaxe et l’orthographe du texte original du Ménestrel.
Adolphe Jullien, Le Ménestrel 14/1/1872, p. 55
Anon., Le Ménestrel, 15/12/1872, p. 22
Anon., Le Ménestrel, 16/3/1873, p. 126
E. Reyer, Journal des Débats 13/12/1873, p. 2
Anon., Le Ménestrel, 14/12/1873, p. 14
[Pas de compte-rendu retenu]
Anon., Le Ménestrel, 10/1/1875, p. 47
E. Reyer, Journal des Débats 15/1/1875, p. 2
Victor Wilder, Le Ménestrel 20/2/1876, p. 94
E. Reyer, Journal des Débats 1/3/1876, p. 1-2
[Pas de compte-rendu]
Auguste Morel, Le Ménestrel 8/12/1878, p. 16
Victor Wilder, Le Ménestrel 12/1/1879, p. 56
E. Reyer, Journal des Débats 16/2/1879, p. 1
Victor Wilder, Le Ménestrel 12/12/1880, p. 14
Victor Wilder, Le Ménestrel 13/3/1881, p. 119
[Pas de compte-rendu retenu]
Le Ménestrel 18/2/1883, p. 94: — Au sujet de ce même concert [du 11 février] nous recevons la seconde note que voici et qui a son intérêt : « La Société des Concerts elle-même ne peut échapper au mouvement qui entraîne les esprits vers ce qu’on pourrait appeler le « romantisme » en musique. Berlioz et Schumann tiennent chaque jour une place de plus en plus grande dans le répertoire de l’illustre société. […]
Le Ménestrel 25/3/1883, p. 134
Le Ménestrel 27/5/1883, p. 206: — Dans sa séance de mardi dernier la Société des concerts a fait acte de sage prévoyance en ajournant tout changement de dynastie. Elle s’est tout simplement confiée de nouveau aux mains de M. Deldevez, lequel s’est rendu avec autant de bonne grâce que de dévouement aux instances des délégués en restant à la tête de la célèbre Compagnie symphonique du Conservatoire. Une forte majorité a décidé de cette solution inattendue, et lorsque la députation, chargée, séance tenante, d’aller présenter à M. Deldevez le vœu général des sociétaires, est revenue transmettre son acceptation, d’unanimes bravos ont éclaté dans la docte assemblée. C’est ici ou jamais le cas de redire : « Tout est bien qui finit bien. » […]
Le Ménestrel 23/3/1884, p. 135
Arthur Pougin, Le Ménestrel 29/3/1885, p. 134: […] Trois fragments de la Fuite en Egypte, de Berlioz (Prélude instrumental, l’Adieu des bergers, le Repos de la Sainte-Famille), ont produit la plus vive impression et littéralement enchanté le public, qui a redemandé le troisième d’une voix unanime et l’a applaudi avec transport. […]
Arthur Pougin, Le Ménestrel 28/2/1886, p. 104: […] Le concert se terminait par la brillante ouverture du Carnaval romain, de Berlioz, cette ouverture qu’en Allemagne on a coutume d’exécuter, en guise d’entr’acte, entre le premier et le second acte de Benvenuto Cellini. C’est une tradition que l’Opéra-Comique ferait peut-être bien de s’approprier, lors de la reprise qu’il projette de l’œuvre de Berlioz.
Le Ménestrel 10/4/1887, p. 151: — On vient de placer, dans la grande salle de lecture de la bibliothèque du Conservatoire, un portrait de Berlioz, qui fut, comme on le sait, bibliothécaire de notre École de musique et de déclamation. Ce portrait, d’une étonnante ressemblance et d’une belle facture, avait été commandé par l’État au peintre Alexis Lahaye, qui l’a exécuté d’après les documents que des intimes du maître lui avaient fournis. C’est un véritable tour de force de reconstitution que cette œuvre, qui semblerait plutôt avoir été faite du vivant de Berlioz, tant la vie y est intense. Ce sera sans doute le même peintre qui sera chargé de faire le portrait d’Auber, qui manque au Conservatoire.
Arthur Pougin, Le Ménestrel 30/12/1888, p. 419-20: — Programme très beau, très varié et très éclectique dimanche dernier, au Conservatoire, où les noms de Berlioz et de Saint-Saëns avoisinaient ceux de Mozart, de Beethoven et de Richard Wagner. Bien que la température fût douce, l’enthousiasme du public était cependant, au commencement de la séance, à un nombre incommensurable de degrés au-dessous de zéro, et c’est à peine si l’admirable Symphonie héroïque, dite pourtant d’une façon superbe, put exciter quelques maigres applaudissements, donnés chichement, comme à regret, et du bout des doigts. Il en fut de même du morceau symphonique de la Fuite en Egypte, de Berlioz, qui fut accueilli avec une égale froideur, et ce public rétif ne sortit de sa réserve qu’en entendant l’air du Récitant, auquel cependant M. Dupuy est bien loin d’avoir prêté le genre de voix, le style, l’accent et le caractère qui lui conviennent ; je n’en fais pas un crime au chanteur, que je tiens pour un artiste de talent, mais à qui cette musique admirablement simple, belle et émouvante ne convient en aucune façon. Enfin, ces auditeurs, qui tout d’abord semblaient glacés ont redemandé avec enthousiasme le charmant chœur des bergers de cette même Enfance du Christ, ils ont vivement applaudi la Danse macabre de M. Saint-Saëns, ils ont fait répéter encore le joli chœur de Cosi fan tutte, de Mozart, et ont enfin trouvé quelques bravos pour la belle exécution de l’ouverture de Tannhäuser. Tout est bien qui finit bien.
Arthur Pougin, Le Ménestrel 3/2/1889, p. 39: Nous reprocherons à la Société des concerts du Conservatoire de ne jamais faire les choses qu’à demi, et de ne pas avoir le complet courage de ses meilleures idées. Pourquoi, ayant eu l’heureuse pensée d’une exécution du Roméo et Juliette de Berlioz, a-t-elle reculé devant l’intégralité de cette exécution, et pourquoi, en présentant à son public une œuvre de cette importance et d’un si grand intérêt, a-t-elle jugé bon de la mutiler encore une fois, brisant ainsi son unité, lui enlevant ses proportions et son équilibre, et altérant comme à plaisir sa couleur générale? Pourquoi supprimer arbitrairement tout le prologue, et le chœur du convoi de Juliette, et le premier chœur du finale, et le bel air du père Laurence qui précède le serment de la réconciliation? Mais...
Tes pourquoi, dit le dieu, ne finiront jamais !
Occupons-nous donc de ce qu’on a bien voulu nous faire entendre, et louons tout d’abord l’excellente exécution que nous a donnée la Société. Toute l’introduction (« combats, tumulte, intervention du prince ») a été dite par l’orchestre d’une façon superbe, avec une franchise, une largeur, un accent merveilleux. Le solo de hautbois du larghetto espressivo (« Tristesse de Roméo »), d’un caractère si profondément mélancolique, a été phrasé par M. Gillet d’une façon magistrale ; ce chant si douloureux, d’un accent si pénétrant, qui plane sur un accompagnement d’une extrême simplicité, produit une impression vraiment poignante. Quant à l’épisode de la fête chez Capulet, je renonce à en décrire la couleur, l’éclat et la splendeur ; il semble, en entendant cette musique chevaleresque et vibrante, qu’on voie défiler devant ses yeux ces seigneurs et ces grandes dames, en habit d’apparat, couverts de velours et de brocart, de soie et de dentelles. C’est un spectacle féerique, obtenu à l’aide des seuls éléments sonores. Et l’allegretto du jardin, avec son chœur invisible ! quelle poésie, quelle couleur, quel enchantement pour l’oreille ! Et le scherzo de la reine Mab ! et le serment de la réconciliation, avec son triple chœur ! Tout cela est superbe, et tout cela fait regretter davantage encore que la Société recule toujours devant une exécution intégrale d’une œuvre si curieuse et si originale. […]
Le Ménestrel 7/12/1890, p. 391: — Le petit-fils de Georges Kastner, M. Frédéric Kastner, vient de faire un nouveau don très précieux à la bibliothèque du Conservatoire. Il s’agit cette fois d’un autographe important, celui de la partition de Roméo et Juliette, de Berlioz. […]
Arthur Pougin, Le Ménestrel 27/12/1891, p. 412: […] Ce concert se terminait par des fragments de la Damnation de Faust, de Berlioz : l’air de Méphistophèlès, fort bien dit par M. Delmas, le chœur de gnomes et de sylphes, le ballet des sylphes — qui, par extraordinaire n’a pas été redemandé, — le chœur de soldats, la chanson d’étudiants et la marche hongroise.
Arthur Pougin, Le Ménestrel 4/12/1892, p. 388: Saluons la soixante-sixième année de l’existence de la Société des concerts du Conservatoire, l’aînée et la plus glorieuse de nos phalanges artistiques, celle dont la renommée est depuis longtemps européenne et qui est la gardienne jalouse des plus nobles traditions musicales. Un intérêt d’un genre tout particulier s’attachait cette fois à la reprise des sessions de l’illustre compagnie, qui, par suite de la démission de M. Garcin à l’issue de la dernière campagne, avait dû se choisir un nouveau chef, en la personne de M. Paul Taffanel. M. Taffanel, qui allait ainsi troquer sa flûte exquise contre le bâton de commandement, se trouve être le septième chef d’orchestre de la Société, depuis sa fondation par Habeneck en 1828. […] Ce n’est pas, j’imagine, sans quelque émotion que le nouveau chef s’est présenté devant le public pour prendre possession de ses nouvelles fonctions. Il n’en a pas moins fait preuve de réelles et solides qualités dans le maniement de cet instrument aux cent voix qu’on appelle un orchestre symphonique. […]
Arthur Pougin, Le Ménestrel 18/12/1892, p. 405: Le Conservatoire nous a donné, dans sa séance de dimanche dernier, les fragments ordinaires du Roméo et Juliette de Berlioz, M. Auguez tenant, avec sa sûreté et son ampleur de style ordinaire, la partie du père Laurence. L’œuvre est trop connue et trop appréciée maintenant pour qu’il soit utile d’entrer, à son sujet, dans des détails d’analyse qui deviendraient superflus. Je me bornerai donc à constater la sûreté de son exécution de la part de l’orchestre et des chœurs, qui n’ont vraiment rien laissé à désirer, soit au point de vue de l’ensemble, soit sous le rapport de la chaleur et de l’entrain. […]
Arthur Pougin, Le Ménestrel 17/12/1893, p. 404: […] J’en reviens au concert pour constater le très grand succès de la Fuite en Egypte de Berlioz, dont on a fait répéter le solo à M. Warmbrodt, qui l’avait chanté avec le style et le goût qu’on lui connaît, et d’une façon tout à fait pénétrante. […]
[pas de compte-rendu]
[pas de compte-rendu retenu]
Arthur Pougin, Le Ménestrel 2/2/1896, p. 38: Dans l’ombre du Ténare, l’ombre de Berlioz doit être satisfaite. Dimanche dernier, le nom de l’illustre artiste flamboyait sur les affiches de nos trois grands concerts, et tandis qu’au Châtelet et au Cirque on jouait simultanément la Damnation de Faust, on exécutait au Conservatoire, Dieu sait avec quelle verve et quelle ardeur, toute la partie symphonique de Roméo et Juliette. C’est le 24 novembre 1839 que Berlioz, en la dirigeant lui-même, donnait au Conservatoire la première exécution de cette œuvre importante. Deux mois après, il la produisait avec succès à Londres [inexact!], et il le constatait dans cette lettre à son ami Humbert Ferrand (Londres, 31 janvier 1840 [CG no. 700, lettre écrite à Paris à la rue de Londres et non à Londres]) : «... Me voilà content, le succès est complet. Roméo et Juliette ont fait cette fois verser des larmes (car on a beaucoup pleuré, je vous assure). Il serait trop long de vous raconter ici toutes les péripéties de ces trois concerts. Il vous suffit de savoir que cette nouvelle partition a excité des passions inconcevables et même des conversions éclatantes. Bien entendu que le noyau d’ennemis quand même reste toujours plus dur. Un Anglais a acheté 120 francs, du domestique de Schlesinger, le petit bâton de sapin qui m’a servi à conduire l’orchestre. La presse de Londres, en outre, m’a traité splendidement... Alizard a eu un véritable succès dans son rôle du bon moine (le père Laurence, dont le nom lui est resté). Il a merveilleusement compris et fait comprendre la beauté de ce caractère shakespearien. Les chœurs ont eu de superbes moments ; mais l’orchestre a confondu l’auditoire d’étonnement par les miracles de verve, d’aplomb, de délicatesse, d’éclat, de majesté, de passion qu’il a opérés... » Dimanche aussi, l’orchestre du Conservatoire s’est montré superbe dans l’interprétation de cette œuvre si travaillée, si difficile, si délicate parfois, parfois si puissante, et qui réclame une attention toujours en éveil. […]
Arthur Pougin, Le Ménestrel 18/10/1896, p. 336: C’est
avec un sentiment de chagrin véritable que j’enregistre ici la mort de mon
vieil ami Jules Garcin, que nous avons conduit mardi dernier à sa dernière
demeure. Ce dénouement d’une longue et douloureuse maladie était depuis trop
longtemps prévu pour qu’il pût étonner beaucoup, mais il n’en laissera
pas moins de bien sincères regrets à tous ceux qui ont connu ce galant homme,
cet excellent artiste que, chose rare, son talent et sa modestie n’avaient pas
empêché d’atteindre une situation brillante. Artiste de cœur et fort
instruit, esprit élevé et distingué, Garcin valait mieux encore que cette
situation, qui pour lui s’était fait attendre quelque peu. Professeur au
Conservatoire, chef d’orchestre de la Société des concerts, il était, avec
son abord que la timidité rendait d’apparence froide, plein de chaleur de cœur
et accessible à tous les enthousiasmes, et je me rappelle l’appui très
efficace et plein de désintéressement qu’il me donna, à moi qui jadis avais
été un peu son élève, lorsque je m’occupai, pendant près de dix ans, de
l’érection à Givet de la statue de Méhul, que nous avons pu enfin inaugurer
en 1892.
Garcin, qui appartenait à une famille de comédiens de
province, la famille des Garcin et des Chéri (il était le cousin de Rose
Chéri, morte jeune, de Victor Chéri, qui s’est pendu il y a quelques années,
et de la pauvre Anna Chéri, Mme Lesueur, qui est folle depuis quinze ans)
était né à Bourges le 11 juillet 1830. Après avoir obtenu au Conservatoire
un second et un premier prix de solfège, il devint un des plus brillants
élèves d’Alard et se vit décerner un accessit de violon en 1848, le second
prix en 1851 et le premier prix en 1853. Il fut aussi élève de Bazin pour l’harmonie
et d’Adolphe Adam pour la composition. Violoniste fort distingué, il entra
par concours à l’orchestre de l’Opéra, où il devint plus tard violon-solo
et troisième chef, et il fit entendre, dans une séance de la Société des
concerts, un concerto de sa composition, qui était une œuvre vraiment
remarquable. Il dut cependant renoncer d’assez bonne heure à se produire en
public, parce qu’il était atteint de cette petite infirmité qu’on appelle
la crampe des violonistes. Cela, toutefois, ne pouvait l’empêcher de faire de
bons élèves, et il l’a prouvé dans la classe dont il avait été nommé
titulaire en 1875. Lors de la retraite de M. Deldevez, il prit sa succession
comme premier chef d’orchestre de la Société des concerts dont il sut
maintenir fidèlement les brillantes traditions. Il dut se retirer lui-même il
y a deux ans, atteint déjà de la maladie qui lui causait une sorte de
tremblement convulsif et qui lui enlevait toute confiance en lui-même. Il est
mort le 10 de ce mois, en pleine connaissance de lui-même, en quelque sorte
épuisé par un mal implacable. Huit jours auparavant il écrivait les
dédicaces de quatre morceaux qu’il venait de publier. L’assistance
nombreuse et recueillie qui s’est rendue à ses funérailles a donné la
mesure des regrets que l’excellent Garcin a laissés derrière lui.
Au cimetière, M. Théodore Dubois, directeur du
Conservatoire, a prononcé une allocution touchante, et a rappelé en termes
émus les services que Garcin avait rendus, comme professeur, à l’école dont
il avait été l’un des plus brillants élèves. « Si je parle, a dit M.
Dubois, de celui que nous pleurons comme professeur, il me suffira de rappeler
les succès que ses élèves ont constamment obtenus aux concours, et l’amour
qu’ils avaient pour leur maître. Il était bon, dévoué et passionné pour
sa classe. Pendant plus de vingt ans, il a donné à son enseignement du
Conservatoire le meilleur de sa vie, de son activité, de son intelligence,
malgré les cruelles souffrances qu’il ressentait depuis plusieurs années
déjà et qu’il supportait avec une résignation touchante ». L’hommage
était légitime, et il n’aurait pu être rendu mieux et avec plus d’autorité
que ne l’a fait M. Théodore Dubois.
Le Ménestrel 17/10/1897, p. 335: — La Société des concerts du Conservatoire vient d’adresser la circulaire suivante à ses abonnés : « La commission supérieure des théâtres ayant décidé la fermeture de la salle du Conservatoire, reconnue dangereuse pour la sécurité du public, nous avons l’honneur de vous informer que la Société des concerts du Conservatoire donnera provisoirement ses séances dans la salle de l’Opéra. Cette situation provisoire durera, nous l’espérons, peu de temps, et nous comptons pouvoir vous réserver, dans la salle du nouveau Conservatoire dont la construction est projetée, des places équivalentes à celles de votre abonnement actuel. Les concerts, pendant notre séjour à l’Opéra, seront, comme par le passé, divisés en deux séries. Pendant la saison de 1897-98, chaque série sera de sept concerts. »
Arthur Pougin, Le Ménestrel 14/11/1897, p. 365-6:
Nous avons le regret d’enregistrer la mort de l’excellent artiste qui avait
nom Deldevez et qui fut chef d’orchestre de l’Opéra et de la Société des
concerts et professeur de la classe d’orchestre au Conservatoire. Édouard-Marie-Ernest
Deldevez, qui était né à Paris le 31 mai 1817, avait fait au Conservatoire de
brillantes études. Elève d’Habeneck, d’Halévy et de Berton, il avait
obtenu le premier prix de solfège on 1831, le premier prix de violon en 1833,
et en 1838, le premier prix de fugue et le second grand prix de Rome à l’Institut.
Il faisait partie dès cette époque de l’orchestre de l’Opéra, et, chose
assurément rare, il se vit confier, dans cette situation, la mission d’écrire
la musique de plusieurs ballets. C’est ainsi qu’il composa, avec Flotow et
Burgmüller, celle de Lady Henriette (21 février 1844), puis, seul,
celle d’Eucharis (7 août 1844), de Paquita (1er avril 1846), et
avec Tolbecque celle de Vert-Vert (24 novembre 1851). Les compositions de
Deldevez sont nombreuses d’ailleurs, et de divers genres, et je ne puis citer
que les plus importantes. Elles comprennent trois symphonies, deux quatuors et
un quintette pour instruments à cordes, deux trios pour piano, violon et
violoncelle, deux ouvertures de concert, une messe de Requiem à la
mémoire d’Habeneck, deux ballets inédits : Mazarina et Yanko
le bandit, deux grands opéras inédits : Samson, en deux actes,
et le Violon enchanté, en un acte, des recueils de chant, etc.
En 1839, Deldevez fut nommé coup sur coup second chef d’orchestre
à l’Opéra et à la Société des concerts. Au bout de quelques années il se
démit du premier de ses emplois ; mais, déjà élu premier chef à la
Société des concerts lors de la démission de George Hainl en 1872, il rentra
à l’Opéra comme premier chef à la mort de celui-ci, l’année suivante.
Cependant il prit sa retraite à ce théâtre en 1876, restant seulement à la
tète de la Société des concerts, qu’il ne quitta qu’en 1883. Très
instruit dans la pratique et la théorie de son art, il occupa alors ses loisirs
à des travaux littéraires relatifs à la musique. Il avait déjà publié deux
ouvrages importants Curiosités musicales, notes, analyses, interprétation
de certaines particularités contenues dans les œuvres des grands maîtres
(1873), et l’Art du chef d’orchestre (1878) ; il donna par la
suite la Société des concerts de 1860 à 1885 (1887), et De l’exécution
d’ensemble (1888). Ces divers ouvrages ont été publiés à la librairie
Firmin-Didot. Antérieurement, Deldevez avait donné un écrit intitulé la
Notation de la musique classique comparée à la notation de la musique moderne,
et de l’exécution des petites notes en général, et, sous le titre de Trilogie,
une série d’études sur l’harmonie et sur les œuvres des compositeurs et
des violonistes célèbres. On peut dire de Deldevez qu’il fut vraiment un
artiste infatigable.
Cet homme excellent et un peu misanthrope, depuis longtemps
souffrant et valétudinaire, est mort à Paris, dans son petit appartement
solitaire de l’avenue Trudaine, le samedi 6 de ce mois, à l’âge de 80 ans.
Arthur Pougin, Le Ménestrel 27/2/1898, p. 68: A l’Opéra, dimanche dernier, septième séance de la Société des concerts du Conservatoire, avec un programme superbe sur lequel — chose rare ! — se détachaient deux noms de compositeurs français, les noms de Berlioz et de M. Massenet, en regard de ceux de Beethoven et du grand Bach. Et je vous assure qu’ils ne déparaient pas l’ensemble. […] Pourquoi donc le public est-il resté relativement si froid à l’audition d’un tel chef-d’œuvre [la Symphonie pastorale] interprété avec une si prodigieuse supériorité ? J’en dirai presque autant au sujet de la sélection du Roméo et Juliette de Berlioz, qui nous a été offerte ensuite. Il a fallu toute la vigueur d’exécution de la Fête chez Capulet, qui a été jouée, surtout par les violons, avec une énergie et un éclat superbes, pour arracher à ce public à demi somnolent des applaudissements un peu vigoureux et le faire sortir de sa torpeur. Même l’adorable scherzo de la Reine Mab l’a laissé à moitié indifférent. […]
Julien Tiersot, Le Ménestrel 17/7/1898, p. 226-7:
LA MUSIQUE AU 14 JUILLET
Pour la première fois depuis bien des
années, la musique a occupé une place importante dans la célébration de la
fête nationale. Une cérémonie commémorative en l’honneur de Michelet a eu
lieu au Panthéon, au cours de laquelle l’orchestre et les chœurs de la Société
des Concerts, dirigés par M. Taffanel et renforcés par la musique de la Garde
républicaine, ont exécuté des hymnes du temps de la Révolution et divers
morceaux de maîtres contemporains. […]
Le Ménestrel a publié dimanche
dernier le programme de cette partie musicale. Au dernier moment on a reconnu
que ce programme était trop long, et l’on en a supprimé le dernier morceau,
l’apothéose de la Symphonie funèbre et triomphale de Berlioz. J’avoue
que je l’ai regretté, car ce morceau, à peu près unique dans son genre,
convient merveilleusement à une semblable cérémonie. Parmi les quelques
personnes qui, aujourd’hui, se préoccupent du rôle que l’art en général
et la musique en particulier pourraient jouer dans l’éducation populaire, c’est
un sujet de graves réflexions que la constitution d’un répertoire de
compositions propres aux fêtes publiques, une sorte de liturgie de chants
nationaux. Un des premiers principes à poser à cet égard devrait être, à
mon avis, l’exclusion absolue de toute musique d’opéra, celle-ci étant
trop étrangère au sentiment que l’on se propose d’exprimer. Cependant,
dans l’état actuel des choses, il faut bien avouer que le répertoire
vraiment convenable dans lequel on pourrait puiser est très restreint,—
surtout si l’on considère que, dans des cérémonies données en l’honneur
d’hommes qui représentent le génie français, a musique française doit
être seule admise. Or, ce n’est qu’au temps de la Révolution que l’on a
tenté de constituer méthodiquement ce répertoire. Mais les œuvres qui furent
produites dans cet esprit, vieilles d’un siècle et plus, ne sont pas, on ne
saurait le méconnaître, suffisantes pour satisfaire les aspirations de notre
époque. Quelques-unes ont mérité de survivre ; mais la plupart ne
méritent pas d’être tirées de l’oubli où elles sont tombées aussitôt
après leur naissance. Après une évolution musicale telle que celle qui s’est
accomplie en ces cent années, il nous faut aujourd’hui des monuments d’un
autre style.
Or, il se trouve que le maître français
qui, le premier, a imprimé à la musique ce grand mouvement qui l’a portée
vers les hauteurs où elle sait parfois planer, ayant, d’autre part, hérité
de ses devanciers immédiats les traditions de l’école musicale de la
Révolution, Hector Berlioz, a composé une œuvre qui répond en tout point aux
conditions énoncées. N’est-ce pas là une rare bonne fortune, et pouvait-on
hésiter à en profiter? La Symphonie funèbre et triomphale a été
écrite pour une cérémonie commémorative non sans analogie avec la fête du
Panthéon ; par ses formes très arrêtées et son caractère très en
dehors, elle représente parfaitement l’esprit de nos fêtes nationales. Veut-on
connaître là-dessus une opinion que l’on jugera sans doute suffisamment
autorisée ? Voici ce qu’a écrit Wagner :
« Il est un talent qu’on ne
saurait contester à Berlioz : c’est son entente à produire des
compositions parfaitement populaires, — je dis « populaires » au
sens le plus idéal du mot.
Quand j’entendis la symphonie qu’il a composée pour la
translation des victimes de Juillet, j’éprouvai l’impression vive que le
premier gamin en blouse bleue devait la comprendre à fond ; ce genre de
compréhension, à vrai dire, exigerait le nom de « national »,
plutôt que de « populaire ». Cette composition est noble et grande
de la première à la dernière note ; un sublime enthousiasme patriotique,
qui s’élève du ton de la déploration aux plus hauts sommets de l’apothéose,
garde cette œuvre de toute exaltation malsaine... »
Voilà pourquoi j’ai regretté la suppression de ce morceau, qui, dans la situation présente, me semble représenter essentiellement « la musique du Panthéon ». Il était, nous dit-on, de trop sur le programme, d’ailleurs fort bien composé dans l’ensemble : cela est une fort bonne raison, et il est certain que la cérémonie fut très suffisamment longue. Mais mes regrets seraient plus amers encore si je pouvais croire que cette soustraction a été motivée par l’opinion professée, je le sais, par quelques musiciens, que l’allure du thème principal est insuffisamment « distinguée ». La Marseillaise non plus n’est pas « distinguée ». En vérité, il n’est pas étonnant si notre musique moderne est anémique. Nous nous consumons par excès de distinction !... […]
Le Ménestrel 27/11/1898, p. 382: — Rappelons que c’est aujourd’hui dimanche [27 novembre] que la Société des concerts du Conservatoire, rentrant en possession de la salle de la rue Bergère après son excursion sous les voûtes trop vastes de l’Opéra, reprend le cours hivernal de ses séances, pour la soixante-douzième année de son existence. […]
Arthur Pougin, Le Ménestrel 12/2/1899, p. 53: […] Si le silence du peuple est la leçon des rois, celui du Conservatoire, dimanche dernier, a dû être pour M. Fauré une invitation à changer sa manière. Heureusement nous avions ensuite, en guise de contraste, une page magnifique de Berlioz et d’une inspiration généreuse : la Mort d’Ophélie, empreinte d’une mélancolie profonde, et la « Marche funèbre pour la dernière scène à Hamlet, » dont la tristesse est vraiment poignante et désolée, et que la Société des concerts nous faisait entendre pour la première fois. Cela est fort beau et d’un grand style. […]
Arthur Pougin, Le Ménestrel 2/4/1899, p. 109: On a beau bien connaître cet orchestre superbe du Conservatoire, il semble qu’à chaque fois on le trouve supérieur à lui-même. Le fait est que dimanche dernier, par son incomparable exécution de la symphonie en si bémol de Beethoven, il nous a procuré une de ces jouissances artistiques si absolues, si complètes, qu’on ne saurait leur trouver d’équivalent. Il est vrai que — ce qui paraît assez difficile à comprendre et ce qui est pourtant l’exacte vérité — un orchestre est comme un virtuose : il n’est pas toujours également « en train, » il a ses jours d’enthousiasme et ses jours de froideur ; or, dimanche il était monté à son diapason le plus élevé, et il nous l’a bien prouvé ; toute la symphonie a été dite par lui avec une perfection idéale, mais surtout il a fait ressortir d’une façon unique la suavité de l’adagio, et il a rendu le final avec une chaleur, un ensemble et un fini prodigieux. La salle en était électrisée. Il ne fallait rien de moins, pour ne pas laisser tomber cet enthousiasme, que les superbes fragments de la Prise de Troie, de Berlioz, qui venaient ensuite, et dont l’effet à été considérable. Ces fragments, qui comprennent une grande partie du premier acte, étaient chantés par Mlle Bréval, qui faisait Cassandre, et M. Renaud, qui personnifiait Chorèbe, tous deux à la hauteur de la tâche difficile qui leur était confiée. Mlle Bréval a dit avec largeur, avec un accent plein d’émotion, le bel air de Cassandre, dont le sentiment dramatique est si plein de noblesse. M. Renaud s’est distingué dans le long cantabile de Chorèbe, qu’il a superbenient phrasé, en en faisant ressortir le caractère profondément mélancolique, et tous deux se sont surpassés dans l’exécution du duo, si dramatique et si fougueux. Aussi, le public du Conservatoire, qui ne s’emballe guère à l’ordinaire, ému par la beauté de cette musique et par son interprétation superbe, a-t-il fait aux deux artistes une véritable ovation, couronnée par un triple rappel. […]
Arthur Pougin, Le Ménestrel 28/1/1900, p. 28: […] On eût pu craindre que le voisinage d’une œuvre si puissante [la 9e symphonie de Beethoven] ne portât préjudice à la Fuite en Egypte de Berlioz, qui venait ensuite, composition exquise, mais d’un sentiment austère et d’une simplicité voulue. Il n’en a rien été, et la grâce angélique de ce délicieux poème religieux n’en a que mieux ressorti peut-être. Il a été l’occasion d’un succès personnel très vif pour M. Laffitte, chargé du solo, et qui a chanté celui du Repos de la sainte famille avec tant de goût et une grâce si délicate que la salle entière le lui a redemandé. […]
Le Ménestrel 12/5/1901, p. 151: — M. Paul Taffanel vient de donner sa démission de chef d’orchestre de la Société des concerts du Conservatoire, et malgré la démarche très pressante des membres du comité de la Société, il n’a pas cru pouvoir, en raison de son état de santé, revenir sur sa détermination d’abandonner ce haut poste. Le comité de la Société des concerts, tout en regrettant vivement la perte de son éminent chef, s’est vu contraint d’accepter cette démission. L’élection du successeur de M. Taffanel aura lieu dans le courant de juin.
Le Ménestrel 16/6/1901, p. 191: — Mercredi a eu lieu, au Conservatoire, en assemblée générale, l’élection pour la nomination du chef d’orchestre de la Société des concerts du Conservatoire, poste devenu vacant par la démission de M. Taffanel. Les votants étaient au nombre de 101. M. Georges Marty, un des chefs d’orchestre de l’Opéra-Comique, a été nommé au cinquième tour de scrutin par 54 voix, contre 37 données à M. Samuel Rousseau (dix bulletins blancs).
[pas de compte-rendu retenu]
Arthur Pougin, Le Ménestrel 29/3/1903, p. 100-1: […] La séance nous offrait ensuite, pour la première fois au Conservatoire, l’exécution de Sara la baigneuse, ballade à trois chœurs (un chœur d’hommes, un chœur de femmes, un chœur mixte) écrite par Berlioz sur des vers de Victor Hugo. Faut-il constater que l’accueil fait par le public à cette composition a été assez froid, et faut-il ajouter que, malgré mon admiration pour Berlioz, cela ne m’étonne pas outre mesure ? On sait que Sara la baigneuse a été présentée par le maître sous diverses formes : en quatuor pour voix d’hommes avec orchestre, en duo pour deux voix avec piano, enfin avec l’ensemble des trois chœurs et de l’orchestre, telle que nous l’avons entendue dimanche. Pour ma part, je l’avoue, je n’ai pas retrouvé là le Berlioz des grands jours, avec son inspiration si chaude et la poésie si pénétrante. C’est une œuvre un peu quelconque, et sur laquelle ne me semble pas planer le génie superbe du maître. […]
Arthur Pougin, Le Ménestrel 13/12/1903, p. 396: Pour le centième anniversaire de la naissance de Berlioz, qui est célébré de toutes parts et qui semble bien un événement musical européen, la Société des concerts du Conservatoire nous donnait une séance qui comprenait, avec l’exécution intégrale de Roméo et Juliette, l’une des œuvres les plus délicieuses du maître, celle de l’ouverture de Rob-Roy, absolument inconnue de la génération actuelle. Inspiré par le très curieux et très beau roman de Walter Scott, l’ouverture de Rob-Roy, très curieuse elle-même et pleine d’éclat, constituait l’un des envois de Rome de Berlioz à l’Académie des beaux-arts. Ecrite on 1831, elle fut exécutée une première fois par la Société en 1833, et depuis lors il n’en fut plus question, Je ne dirai pas que c’est l’une des meilleures compositions de Berlioz; mais elle est nerveuse, colorée et ne manque assurément pas d’intérêt. Je ne crois pas utile de m’appesanlir plus que de raison au sujet de Roméo et Juliette, l’œuvre étant aujourd’hui suffisamment connue : mais il me semble intéressant de reproduire exactement, avec sa disposition typographique, le programme de sa première exécution en 1839, tel qu’il parut alors dans les journaux. […] En rendant compte de cette première exécution, la Revue et Gazette musicale terminait ainsi son article : — « Une musique de ce caractère, écrite avec autant de conviction, ne saurait être appréciée après une seule audition. Heureusement la symphonie de Roméo el Juliette sera encore exécutée dimanche prochain. On assure que l’auteur a fait quelques coupures utiles, principalement dans le récitatif du père Laurence, qui avait été jugé trop long. L’exécution de l’orchestre et des chœurs sera plus irréprochable, et toutes les parties de cette œuvre pourront être plus également comprises et plus sûrement jugées par le public. Le succès ne fera certainement que s’accroître. » Ce succès a été complet dimanche dernier, où les soli étaient chantés par Mlle Maria Gay, MM. de Poumayrac et Bartel, et où l’exécution d’ensemble était vraiment superbe. La Société des concerts a bien mérité de Berlioz.
Arthur Pougin, Le Ménestrel 8/5/1904, p. 150: L’exercice des élèves du Conservatoire, qui a eu lieu jeudi dernier [5 mai], a été un gros succès et suffirait, à lui seul, à avoir raison des sottes critiques formulées chaque année par les détracteurs quand même de notre admirable école musicale. L’ardeur enthousiaste de ce jeune orchestre, l’ensemble remarquable de ces chœurs, où la fraîcheur des voix donne à l’oreille une sensation si délicieuse, la grâce et déjà le talent déployé par les élèves chanteurs ou instrumentistes mis en évidence par le programme, tout cela prouve, et plus que jamais, en faveur de l’école et de la solidité des études qui s’y font. Ce programme, un peu long cette fois, s’ouvrait par l’ouverture de Fidelio, bien enlevée par l’orchestre, et qui était suivie de deux pages bien intéressantes de Berlioz, la Mort d’Ophélie, qui est vraiment empreinte d’une tristesse poignante et dont l’expression est celle de l’angoisse la plus douloureuse, et la Marche funèbre pour la dernière scène d’Hamlet, autre page singulièrement caractéristique, dans laquelle le chœur a sa place à côté de l’orchestre, et où l’on retrouve la profonde mélancolie qui est comme la marque même du génie de Berlioz. Ces deux pièces ont été dites par les chœurs avec un accent très remarquable. […]
[pas de compte-rendu retenu]
[pas de compte-rendu retenu]
[pas de compte-rendu retenu]
Arthur Pougin, Le Ménestrel 17/10/1908, p. 335: C’est avec un bien vif regret que je suis obligé de rendre ici les derniers devoirs à l’artiste excellent et très distingué qu’était Georges Marty. J’avais appris, il y a quelques jours à peine, qu’il était atteint d’une façon très grave, je savais que c’était à force de courage et d’énergie qu’il était parvenu à terminer la saison du Casino de Vichy, et dimanche soir j’apprenais sa mort ! De caractère un peu brusque et qui ne savait pas arrondir les angles, Marty n’en était pas moins un parfait honnête homme et un bon camarade, en même temps qu’un travailleur infatigable et un artiste bien doué. Né à Paris le 16 mai 1860, il entrait fort jeune au Conservatoire, où il fut successivement élève de Gillette, de M. Théodore Dubois, de César Franck et de M. Massenet pour le solfège, l’harmonie, l’orgue et la composition, 1re médaille de solfège en 1875, 2e et 1er prix d’harmonie en 1876 et 1878, il se présentait au concours de Rome dès l’âge de 19 ans, et obtenait une mention honorable en 1879, le second grand prix en 1881 et le premier en 1882, pour la cantate intitulée Edith. Je crois que c’est avant son triomphe à ce concours que nous l’avions couronné, à la Société des compositeurs, pour une scène lyrique avec orchestre qui fut exécutée à l’un de nos concerts. Après le voyage réglementaire en Italie et en Allemagne, Marty, comme tous les autres, chercha à faire sa situation, non sans difficultés. Il fit exécuter, soit aux Concerts-Populaires de Pasdeloup, soit à ceux de Lamoureux, quelques compositions symphoniques : Ballade d’hiver (1875), Matinée de printemps (fragment d’une suite d’orchestre intitulée les Saisons, 1887), une ouverture de Balthasar, une Petite suite romantique. Puis il écrivit pour le Cercle funambulesque la musique d’une pantomime intitulée Lysic, et un poème dramatique, Merlin enchanté, qui, je crois, fut présenté au concours de la Ville de Paris. Lors de la trop courte campagne lyrique ouverte à l’ancien Eden en 1892, Marty y avait rempli les fonctions de chef des chœurs ; il devint chef du chant à l’Opéra l’année suivante et conduisit, avec M. Vidal, les concerts donnés à ce théâtre ; c’est là que, du premier coup, il donna la preuve et la mesure de ses rares qualités de chef d’orchestre, c’est-à-dire l’aplomb, la précision et l’autorité. En 1894, Marty était nommé professeur de la classe d’ensemble vocal au Conservatoire, et là aussi il témoigna de ses précieuses facultés d’éducateur. Mais il n’entendait pas se désintéresser de son avenir de compositeur : tandis qu’il allait faire une saison comme chef d’orchestre au Théâtre du Liceo de Barcelone, il faisait représenter ici, au Théâtre-Lyrique de la Renaissance, un opéra en trois actes, le Duc de Ferrare (1899). En même temps, il publiait un assez grand nombre de mélodies : Prunelle, la Sieste, Chanson d’Avril, Fleur des Eaux, Berceuse, Toast, Sonnet mélancolique, un Ave Maria pour ténor, etc., ainsi que diverses pièces de piano. En 1900 il entrait comme chef d’orchestre à l’Opéra-Comique, où il ne devait rester que deux ans ; en 1901, à la suite de la démission de M. Taffanel, il était élu chef d’orchestre de la Société des Concerts du Conservatoire, et en 1904 il succédait au regretté Samuel Rousseau comme professeur d’une classe d’harmonie (femmes). Tout cela ne l’empêchait pas d’écrire encore la musique d’un drame lyrique en deux actes, Daria, qui fut représenté à l’Opéra le 27 janvier 1905. — La mort de Marty doit jeter un désarroi profond, juste au moment de la reprise de la session, à la Société des Concerts, où il s’était vraiment affirmé comme chef d’orchestre de premier ordre et de grande envergure. Qui va prendre le bâton pour la campagne prochaine ? Je sais bien qu’il y a un second chef, mais... Et, en tout cas, qui sera appelé à lui succéder définitivement ? Cet événement est une véritable catastrophe pour la Société en de telles circonstances.
Le Ménestrel 31/10/1908, p. 351: — La Société des concerts du Conservatoire, réunie lundi dernier en Assemblée générale, a choisi son chef d’orchestre, en remplacement de Georges Marty ; elle a élu à l’unanimité M. André Messager. Pour la première fois, le chef d’orchestre de la Société des concerts sera en même temps directeur de l’Opéra. Il y a cependant un rapprochement que l’on ne manquera pas de faire. Le fondateur de la Société, Habeneck, venait en effet d’abandonner l’administration de l’Académie royale de musique, lorsque le vicomte de La Rochefoucauld le nomma inspecteur général du Conservatoire sous la direction de Cherubini, en même temps qu’il devenait chef d’orchestre de la Société des concerts, le 9 mars 1828. Tous les musiciens, tous les amis de la musique applaudiront au choix que vient de faire la Société. Aucun artiste n’était mieux désigné pour diriger ces concerts que M. André Messager. La façon magistrale dont il a conduit l’orchestre aux premières représentations du Crépuscule des Dieux l’avait définitivement désigné pour un poste qui est l’un des plus élevés parmi nes institutions musicales.
Arthur Pougin, Le Ménestrel 28/11/1908, p. 383: Encore une mort, encore un deuil ! Nous avons à enregistrer cette fois la perte d’un des plus grands artistes de ce temps, Paul Taffanel, qui est mort dimanche matin, après une longue agonie qui l’avait laissé sans connaissance depuis trois jours. Virtuose d’un ordre absolument exceptionnel, musicien instruit, chef d’orchestre doué de rares qualités, Paul-Claude Taffanel était né à Bordeaux le 16 septembre 1844. Petit-fils d’un luthier, fils d’un professeur qui était chef de musique de la garde nationale, il fut élevé dans un milieu essentiellement musical où ses aptitudes personnelles ne trouvèrent que des encouragements. Envoyé de bonne heure à Paris et recommandé à Dorus, celui-ci l’admit dans sa classe du Conservatoire, où, dès son premier concours, en 1860, il remportait d’emblée le premier prix de flûte. Il entra alors dans la classe d’harmonie de Reber, où il se vit décerner un premier prix en 1862, puis, Reber ayant été nommé professeur de composition, il suivit son maître dans sa nouvelle classe, et obtint le premier prix de fugue en 1865. J’avais raison de dire que Taffanel était un musicien instruit.
En 1864, après avoir passé deux ans à l’orchestre de l’Opéra-Comique, Taffanel entrait à celui de l’Opéra, où il ne tardait pas à devenir première flûte. Il faisait partie alors de la Société des Jeunes Artistes de Pasdeloup, qu’il accompagna lorsque celui-ci fonda les Concerts-Populaires. Il n’y devait pas rester longtemps, car son admirable talent de virtuose le faisait appeler, en 1867, comme première flûte à la Société des concerts du Conservatoire. Très actif de sa nature et doué d’un véritable tempérament d’artiste, il fondait en 1879, avec MM. Gillot (hautbois), Turban (clarinette), Brémond (cor), Espaignet (basson) et de Bailly (contrebasse), cette délicieuse Société de musique de chambre pour instruments à vent dont les succès furent si éclatants non seulement à Paris, mais en Angleterre, en Allemagne et en Russie. Entre temps il prenait part à un de nos concours de la Société des compositeurs et se voyait couronner pour un fort joli quintette d’instruments à vent. En 1890 il était nommé troisième chef d’orchestre à l’Opéra ; en 1892, à la retraite de Jules Garcin, il était élu chef d’orchestre de la Société des concerts, et l’année suivante il succédait à M. Colonne comme premier chef à l’Opéra. Il ne fut pas moins heureux dans cette nouvelle carrière que dans celle de virtuose. Il y joignit bientôt celle de professeur. En 1893, à la retraite d’Henri Altès, il était nommé professeur de flûte au Conservatoire, et peu après il se voyait chargé de la direction de la classe d’orchestre. C’est lui qui, à ce titre, dirigeait les exécutions de tous les exercices et des auditions des envois de Rome. Il y a sept ans, sentant quelques atteintes de fatigue, il donnait sa démission à la Société des concerts, où il était remplacé par le pauvre Marty, disparu quelques jours avant lui, et l’année dernière, atteint déjà par la maladie, il quittait l’Opéra. C’est à ce moment que nous l’avions choisi, à l’Association des artistes musiciens, pour succéder comme président à M. Emile Réty. Nous n’avons aujourd’hui que le regret de l’avoir eu si peu de temps à notre tête. Taffanel a occupé une grande place, et très importante, dans le monde musical de ces trente dernières années, et soit comme virtuose, soit comme chef d’orchestre, soit comme professeur, il a rendu de nombreux et signalés services. C’était un véritable artiste, doué d’initiative, et pourvu, sous les rapports les plus divers, de qualités de premier ordre et tout à fait exceptionnelles.
Arthur Pougin, Le Ménestrel 20/2/1909, p. 60: […] La dernière et la plus grande partie de la séance était consacrée à l’audition intégrale de Roméo et Juliette, de Berlioz, dont les soli étaient confiés à Mme Auguez de Montalant, à MM. Nansen et Journet. Que trouver à dire encore de cette œuvre si connue, dont les grandes pages sont dans la mémoire de tous : la rêverie de Roméo, la délicieuse scène d’amour, le scherzo de la reine Mab qui est bien, au point de vue de l’orchestre, l’une des plus étonnantes créations de Berlioz ? sans oublier l’éclatante Fête chez Capulet et les jolies strophes du prologue si bien chantées par Mme Auguez, ces strophes dont la première n’a pour accompagnement que les batteries d’une harpe, à laquelle, dans la seconde, viennent se joindre les violoncelles. Cette partition de Roméo, qui n’est pas d’une égalité parfaite, mais dont certaines pages sont d’une rare beauté et d’une originalité réelle, a été accueillie très chaleureusement, avec des applaudissements nourris et sincères. La séance, en résumé, a été extrêmement brillante, et le succès complet.
Arthur Pougin, Le Ménestrel 25/12/1909, p. 412: — Que dirai-je ensuite pour exprimer mon admiration toujours croissante à l’égard de l’Enfance du Christ, dont on nous donnait cette fois une exécution intégrale, et bien intéressante ? L’Enfance du Christ est pour moi le chef-d’œuvre de Berlioz, un chef-d’œuvre accompli, dans lequel je ne rencontre pas une ombre, je ne distingue pas une faiblesse, et que je ne me lasserais pas plus d’entendre que le public ne se lasse d’entendre la Damnation de Faust. Je ne veux certes pas faire fi de celle-ci, mais je lui préfère celle-là. Affaire de sympathie et de sentiment personnels sans doute, mais peu m’importe. L’inspiration, la grâce, la couleur, l’émotion, avec une tendresse et une onction pleines de suavité, il y a tout dans cette Enfance du Christ, tout, avec le style le plus pur et le plus admirable, avec une sobriété de moyens qui n’était guère habituelle à Berlioz et qui lui permettait, comme à Bach, de produire avec la plus grande simplicité les effets les plus prodigieux. Ecoutez plutôt la harpe et les deux flûtes du trio des jeunes Ismaélites ! cela n’est-il pas vraiment angélique ? Mais je veux me garder d’analyser et de disséquer; je ne veux ni émousser ni flétrir mes sensations et mes impressions ; je veux me contenter de dire et de répéter : admirable, admirable, admirable !
[pas de compte-rendu retenu]
Le Ménestrel 28/1/1911, p. 32: — La Salle des Concerts du Conservatoire. — On rappelait l’autre jour, ici même, l’opinion du bibliothécaire, favorable à sa conservation. Voici les paroles prononcées par M. Julien Tiersot devant les jeunes universitaires des Annales, dans le sanctuaire même qu’il faudrait sauver : « Hélas ! cette salle qui recèle de si grands souvenirs d’art, et qui est, pour l’acoustique, une merveille incomparable, est destinée à périr, devant disparaître avec l’ensemble du Conservatoire ! Tous les amis de la musique déploreront sa perte, et, s’il se peut, devront empêcher sa destruction. Déjà des démarches ont été faites pour obtenir qu’elle soit conservée à titre de monument historique. Nous ne pouvons que nous associer de grand cœur à l’accomplissement d’un vœu si légitime ». Et ces dernières paroles furent, comme toute la causerie, couvertes de bravos.
Arthur Pougin, Le Ménestrel 28/12/1912, p. 412: — C’est toujours avec une joie profonde que j’entends ce chef-d’œuvre inimitable qui a nom l’Enfance du Christ, et qui est pour moi la perle la plus précieuse et la plus pure de l’œuvre de Berlioz, parce qu’il est complet d’un bout à l’autre, sans une faiblesse, sans une défaillance, et que l’exquise limpidité du style s’y allie à la richesse ininterrompue de l’inspiration. Je ne m’attarderai pas à raconter après cent autres, et après Berlioz lui-même dans sa fameuse lettre à Ella des Grotesques de la Musique, la petite supercherie dont il se rendit coupable en attribuant naguère le chœur des Bergers à un certain Pierre Ducré, musicien imaginaire dont il faisait de son autorité privée un maître de musique de la Sainte Chapelle au XVIIe siècle, tout cela pour tromper et dérouter les naïfs ; je ne m’attarderai pas davantage à tenter une nouvelle glose de l’œuvre analysée cent fois. Mais j’exprimerai une fois de plus mon admiration surtout pour la seconde partie de cette œuvre, la Fuite en Egypte, véritable merveille de grâce simple et de sentiment, qui me procure à chaque audition une impression et une émotion indéfinissables. Tout cet épisode du Récitant racontant l’arrivée de la Sainte Famille à Bethléem est d’une suavité et d’une beauté vraiment angéliques, et suffirait seul à la gloire d’un compositeur. Et il faut dire que Berlioz n’a guère été moins inspiré en traçant ses vers qu’en écrivant sa musique, car la seconde partie de ce récit est charmante. […] Orchestre, chœurs et soli, la Société des concerts nous a donné une excellente exécution de cette délicieuse Enfance du Christ, que nous n’avions plus entendue depuis quelques années. Mme Auguez de Montalant prêtait l’appui de son talent toujours si correct et si sûr au personnage de sainte Marie, tandis que M. Roselly lui donnait la réplique dans celui de saint Joseph, et que la belle voix, si bien conduite de M. Journet, faisait merveille dans celui d’Hérode. C’est M. Muratore qui devait chanter le Récitant; mais, assez indisposé pour faire reculer la représentation de Fervaal à l’Opéra, il avait dû se faire remplacer ici. Il n’aurait pu faire mieux que l’artiste qu’on lui a substitué et dont j’ai le regret d’ignorer le nom, car il s’est acquitté de sa tâche de façon à mériter tous les éloges. — […]
Le Ménestrel 18/1/1913, p. 24: — M. Julien Tiersot, bibliothécaire du Conservatoire, vient d’être mis en possession des autographes musicaux de la collection Charles Malherbe, légués au Conservatoire par le regretté bibliothécaire de l’Opéra. Cette importante collection, en venant s’ajouter à celle qui s’était formée antérieurement dans notre grande école de musique durant les cent vingt années de son existence, achève de faire de ce dépôt un trésor inestimable et certainement unique au monde. Le classement en a été commencé immédiatement par les soins de M. J. Tiersot, et l’on peut espérer que, d’ici peu de temps, ce fonds nouveau pourra être mis à la disposition du public. — De son côté, la Bibliothèque de l’Opéra, conformément aux termes du testament, a reçu les livres et imprimés de même provenance que possédait déjà la Bibliothèque du Conservatoire.
[pas de compte-rendu retenu]
Le Ménestrel 12/8/1921, p. 327:
Arthur Pougin
Le Ménestrel vient d’avoir la douleur de perdre un de ses collaborateurs les plus anciens et les plus assidus, en la personne d’Arthur Pougin, qui fut pendant de longues années son rédacteur en chef, et qui est mort, le 8 août dernier, à Paris, à l’âge de 87 ans.
Né à Châteauroux, Arthur Pougin, après avoir étudié le violon et le piano au Conservatoire, fit partie de l’orchestre de différents théâtres. La carrière de compositeur le tenta bientôt et il écrivit les paroles et la musique d’un petit opéra qui fut représenté chez Mlle Augustine Brohan.
Mais il s’occupait, entre temps, de littérature et de critique musicale au Soir, à l’Evénement, à la Revue Encyclopédique. Il y écrivit un grand nombre de pages qui témoignent d’une vaste érudition. Il fut aussi l’un des collaborateurs du « Grand Dictionnaire Larousse » pour la partie musicale.
Pendant dix ans, de 1896 à 1906, il enseigna l’esthétique et l’histoire de la musique à l’Association pour l’Enseignement secondaire des jeunes filles, qui tenait ses cours à la Sorbonne.
Possesseur d’une des plus importantes bibliothèques théâtrales et musicales de Paris, Arthur Pougin était lui-même l’auteur de nombreux ouvrages justement appréciés.
On peut citer notamment : Musiciens français du XVIIIe siècle ; Meyerbeer ; F. Halévy, écrivain ; Bellini, « sa vie et ses œuvres » ; Boïeldieu, « sa vie, ses œuvres, son caractère, sa correspondance » ; Dictionnaire historique et pittoresque du Théâtre ; Verdi, « histoire anecdotique de sa vie et de ses œuvres » ; Supplément à la Biographie Universelle des musiciens, de Fétis ; Méhul, « sa vie, son génie, son caractère » ; l’Opéra-Comique pendant la Révolution ; la Jeunesse de Madame Desbordes-Valmore ; Jean-Jacques Rousseau musicien ; la Comédie-Française et la Révolution ; Essai historique sur la Musique en Russie ; Hérold, biographie ; enfin un ouvrage paru en 1908 sur Monsigny et son temps.
Nos lecteurs n’ont pas oublié la collaboration longue et féconde qu’Arthur Pougin apporta si longtemps à notre journal, son érudition remarquable, sa sûre documentation, sa sincérité parfois un peu agressive, mais qui était la marque d’une indépendance d’esprit des plus louable.
A la mémoire de cet artiste consciencieux et éclairé, le Ménestrel adresse un dernier et respectueux hommage, en présentant à la famille de cet homme de bien ses condoléances émues.
Toutes les photos ci-dessous viennent de la Bibliothèque Nationale de France.
La photo ci-dessous vient de la Bibliothèque Nationale de France.
Sur Pougin voir aussi la page sur Charles Malherbe et la notice nécrologique ci-dessus.
L’original du programme reproduit ci-dessous se trouve au Musée Hector Berlioz qui possède une très importante collection de programmes de concerts. Nous remercions vivement le Musée de nous avoir accordé la permission de le reproduire sur cette page. Tous droits de reproduction reservés.
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Tayeb et Michel Austin le 18 juillet 1997;
Page Berlioz: Pionniers et
Partisans créée le 15 mars 2012; cette page créée le 1er mai 2013.
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