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Berlioz à Londres

Musical Union – Willis’s Rooms

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    Dans son premier rapport sur les institutions musicales de Londres, qu’il publie d’abord dans le Journal des Débats du 31 mai 1851 (p. 1-2) et reprend l’année suivante dans les Soirées de l’orchestre (21ème soirée), Berlioz écrit:

Il y a encore à Londres plusieurs Sociétés de quatuors et de musique de chambre, dont la plus florissante aujourd’hui porte le titre de Musical Union. Elle a été fondée par M. Ella, artiste anglais distingué, qui la dirige avec un soin, une intelligence et un dévouement au-dessus de tout éloge. The Musical Union n’a point pour but exclusif la propagation des quatuors, mais celle de toutes les belles compositions instrumentales de salon, auxquelles on adjoint même parfois un ou deux morceaux de chant, appartenant presque toujours aux productions de l’école allemande. M. Ella, bien que violoniste de talent lui-même, a la modestie de n’être que le directeur organisateur de ces concerts, sans y prendre aucune part comme exécutant. Il préfère adjoindre aux virtuoses les plus habiles de Londres ceux des étrangers de grand renom qui s’y trouvent de passage; et c’est ainsi qu’il a pu cette année, à MM. Oury et Piatti, réunir Léonard, Vieuxtemps, Mlle Clauss, Mme Pleyel, Sivori et Bottesini. Le public s’accommode fort bien d’un système qui lui procure à la fois et l’excellence de l’exécution, et une variété de style qu’on ne pourrait obtenir en conservant toujours les mêmes virtuoses. M. Ella ne se borne point à donner ses soins à l’exécution des chefs-d’œuvre qui figurent dans ces concerts; il veut encore que le public les goûte et les comprenne. En conséquence, le programme de chaque matinée, envoyé d’avance aux abonnés, contient une analyse synoptique des trios, quatuors et quintettes qu’on doit y entendre; analyse très-bien faite en général, et qui parle à la fois aux yeux et à l’esprit, en joignant au texte critique des exemples notés sur une ou plusieurs portées, présentant, soit le thème de chaque morceau, soit la figure qui y joue un rôle important, soit les harmonies ou les modulations les plus remarquables qui s’y trouvent. On ne saurait pousser plus loin l’attention et le zèle. M. Ella a adopté pour l’épigraphe de ses programmes ces mots français, dont, par malheur, on n’apprécie guère chez nous le bon sens et la vérité, et qu’il a recueillis de la bouche du savant professeur Baillot : « Il ne suffit pas que l’artiste soit bien préparé pour le public, il faut aussi que le public le soit à ce qu’on va lui faire entendre. »

    La Musical Union, qui tient ses séances aux Willis’s Rooms (Salons de Willis), est fondée en 1845 par John Ella (1802-1888), un des premiers partisans de Berlioz en Angleterre et l’un de ses meilleurs amis à Londres. Elle continuera jusqu’en 1880 et bénéficie du soutien du Prince Consort. Elle propose une série de huit concerts par an l’après-midi et pour longtemps elle fournit presque la seule occasion d’entendre de la musique de chambre dans le West End de Londres. Les concerts de la Musican Union ont lieu d’abord aux Willis’s Rooms dans King Street, St James’s, et quand St James’s Hall est construit en 1858 ils s’y déplacent et continuent jusqu’en 1880 (Ganz [1913] p. 110-13). Charles Hallé est l’un des nombreux musiciens à s’y produire (cf. Correspondance générale no. 2142, une lettre d’Ella à Berlioz, 24 juin 1856), et il évoque la Musical Union dans ses souvenirs (Hallé [1896] p. 103-4, 112-13). voyez aussi les souvenirs de James Davison, reproduits dans Davison (1912), p. 80-2, 231-4, 277-8.

Willis’s Rooms 

    Le 7 avril 1848 Berlioz dirige dans Willis’s Rooms sa Marche hongroise de la Damnation de Faust; il répond à une invitation de la nouvelle Amateur Musical Society, et l’exécution de la marche qui est très populaire à ce moment à Londres remporte un vif succès (Ganz [1950] p. 58).

    Les origines des Willis’s Rooms remontent aux Assembly Rooms de William Almack qui ouvrent en 1765 dans King Street, St James’s. D’après Edward Walford (Old and New London, 1897, cité par Elkin, 1955, p. 75), les Assembly Rooms consistent en une grande salle de balle ornée de colonnes et de pilastres, de médaillons de style classique et de miroirs, et de deux appartements spacieux de chaque côté d’un vestibule au haut d’un grand escalier. On utilisait de temps en temps ces appartements pour de grands dîners.

    À la mort d’Almack en 1781 les salles deviennent la propriété de sa nièce Mrs Willis, et seront désormais appelées Willis’s Rooms. On les loue pour des réunions autres que musicales. Par exemple Charles Kemble, qui avec Harriet Smithson et d’autres membres d’une troupe anglaise montent des pièces de Shakespeare au Théâtre de l’Odéon à Paris en 1827, donne en 1844 des séances de Readings from Shakespeare (Lectures de Shakespeare) aux Willis’s Rooms.

    Les salles cessent d’exister comme ensemble en 1890. Une partie des locaux devient un restaurant et une autre est occupée par une firme de commissaires-priseurs. Les bâtiments sont endommagés en 1940 et complètement détruits au cours des bombardements de 1944

(Pour en savoir plus sur Willis’s Rooms voyez notre source: Elkin, 1955.)

Willis’s Rooms et la Musical Union en images

Sauf indication contraire les images sur cette page ont été saisies à partir du livre d’Elkin cité, dans notre collection. © Monir Tayeb and Michel Austin. Tous droits de reproduction réservés.

Nous remersions vivement M. Raymond E. O. Ella de nous avoir envoyé l’images électroniques du programme de concert du 16 juin 1846, de la Musical Union en 1846, du programme de concert du 11 juin 1850 et du “dîner d’anniversaire” en 1879 et les informations qui s’y rapportent. Voyez aussi sur ce site un article par Mr. Ella, intitulé John Ella, musician, born Leicester 1802, died London 1888: His Family History (en anglais).

1. Willis’s Rooms

Un bal à Almack’s
Un bal à Almack’s

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Un bal à Willis’s Rooms
Un bal à Willis’s Rooms

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L’image ci-dessus fut publiée dans The Illustrated London News du 30 mars 1861, dont un exemplaire est dans notre collection.

Willis’s Rooms dans King Street
Willis’s Rooms dans King Street

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2. The Musical Union

 L’image reproduite ci-dessous est une lithographie exécutée en 1853 d’après un dessin de Charles Baugniet (1814-1886). La lithographie sera vendue à l’époque sous le nom de ‘L’Analyse. Souvenir de la Musical Union (Neuvième Saison)’, et montre de droite à gauche: Ella, Berlioz, Molique, Spohr, Lindpaintner, Baumann, Barret, Hiller, Jarrett, Pratten, Lazarus, Vieuxtemps, Blumenthal, Goffrié, Blagrove et, Bazzini. À l’époque où cette image est dessinée Berlioz est à Londres pour monter son Benvenuto Cellini à l’opéra de Covent Garden. Ferdinand Hiller, un ami de Berlioz depuis ses années estudiantines au Conservatoire de Paris, assiste à l’unique représentation de l’opéra le 25 juin 1853. Voyez Theatre Royal Covent Garden pour les détails de cette soirée mouvementée.

Nous sommes très reconnaissants à Mike Joyce qui nous a envoyé cette photo prise par lui d’une gravure originale qu’il avait trouvée à Londres au début des années 1970, et à Gunther Braam qui a identifié la date, l’identité des personnages présents et autres détails concernant l’origine de cette lithographie.

L’Analyse – Souvenir de la Musical Union 
(Neuvième Saison)
Souvenir de la Musical Union

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La Musical Union – 1846
La Musical Union – 1846

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La gravure ci-dessus fut publiée dans G. Haddock, Some Musical Recollections of G. Haddock (Schott & Co., Londres, 1906), page 75.

Programme de concert du 16 juin 1846
Concert du 16 juin 1846

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Au “Meeting”, qui eut lieu aux Willis’s Rooms, le Quatuor en fa, No. 82, de  Haydn, le Trio en ré mineur, op. 49 de Mendelssohn, et le Quatuor en la, op. 18 No. 5 de Beethoven furent exécutés. Les exécutants étaient: ‘M. Vieuxtemps (premier violon), M. Deloffre (second violon), Mr. Hill (alto), Signor Piatti (violoncelle) et Sterndale Bennett (pianoforte)’.

Voici la transcription du texte de la deuxième moitié du programme de concert [en langues mixtes, anglais et français]: 

In every city on the continent, the musical traveller will invariably find some locality consecrated to the intellectuality of art, where the performance of the most elevated order of Instrumental Chamber Music brings together the practical, theoretical, and literary members of the profession, and the amateurs of cultivated and refined taste, affording the mutual advantages of social intercourse between men of musical genius and education, from the various schools of Europe, and noble, wealthy, and accomplished virtuosi. Such a desideratum will be supplied at the réunion of the above organized Society of Amateurs.

The Programme at each Matinée will be limited to two pieces of music by Classical Composers, and one morceau brilliant.

Each member of the Committee has the privilege of introducing a visitor, and a limited number of ladies and gentlemen of musical and literary attainments are invited by the Director to every performance.

“AUX ARTISTES ÉTRANGERS.” — Cette Société, composée de l’élite des amateurs d’Angleterre, est fondée dans le bût (sic) de propager la culture de la haute musique instrumentale de salon, et d’offrir un point de réunion aux artistes distingués de toutes les nations.

 

 

 

The perusal of the Synopsis, previous to the performance of each piece of music, will greatly assist the amateur.

To begin at a quarter to 4 o’clock precisely.

There will be an interval of ten minutes between each piece of music, to allow members an opportunity of leaving, without disturbing the audience during the performances.

The next Meeting will take place on TUESDAY, the 30th of JUNE.

Those who have had nominations are requested to introduce the new Members personally to the Director.

The expenses of the past season having been guaranteed by the Committee, the experiment of another season, on the Director’s own pecuniary responsibility, will be made, without augmenting the Subscription of ONE GUINEA for the eight performances, and half-a-crown for the Synopsis Analytique; Mr. Ella confidently relying on the support of the Society, at his Annual Benefit Concert.

The members are informed that a copy of the Synopsis is forwarded by post to those who are absent at any of the meetings.

Subscriptions to be paid to Messrs. CRAMER, BEALE, and Co., Regent-st., where names of amateurs eligible to become members will be received.

Programme de concert du 11 juin 1850
Concert du 11 juin 1850

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Le dîner d’anniversaire – 19 décembre 1879
Dîner d’anniversaire – 19 décembre 1879

Le dîner d’anniversaire en 1879 était aussi le 77ème anniversaire de John Ella et le 35ème anniversaire de la Musical Union – elle ne devait durer qu’un an de plus (1880), et à cause de sa santé et de sa vue John Ella prit sa retraite.

© (sauf indication contraire) Michel Austin et Monir Tayeb pour l’image et les informations sur cette page.

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