13 mai 1854 (CG no. 1759)
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CG = Correspondance
générale (8 tomes, 1972-2003)
NL = Nouvelles
lettres de Berlioz, de sa famille, de ses contemporains (2016)
Nous publions sur cette page l’image et son commentaire d’une lettre de Berlioz à l’écrivain et journaliste Jules Lecomte; acquis par nous, ce document a fait l’objet d’un don de notre part au Musée Hector-Berlioz à La Côte Saint-André en 2017. La lettre porte la date du 13 mai 1854 et a déjà été publiée dans CG sous le no. 1759.
© Musée Hector-Berlioz
L’image de la lettre est suffisamment lisible pour ne pas nécessiter de transcription.
Jules Lecomte (1814-1864) commence sa carrière comme officier dans la marine, mais dès 1832 il se tourne vers le journalisme et la critique; écrivain et éditeur, il fonde plusieurs journaux à Paris. Berlioz fait sa connaissance après son retour de son voyage en Italie de 1831-1832; on peut suivre leurs rapports pendant une période de plus de vingt ans d’après ce qui a survécu de leur correspondance, soit de 1837 à au moins 1859, et ces rapports ont pu durer plus longtemps encore.
Les lettres connues de Berlioz à Lecomte sont: CG nos. 497 (deuxième moitié de mai 1837), 1530 (12 novembre 1852), 1610 (27 juin 1853), 1616bis (tome VIII; mi-juillet 1853?), 1759 (13 mai 1854, la lettre reproduite sur cette page), 1801 (avec supplément dans NL p. 407; 21 octobre 1854), 1940bis (15 avril 1855; NL p. 412), et 2291 (mai-septembre 1858). (Le lettre publiée d’abord dans CG tome III sous le no. 743 est évidemment le même texte que le no. 1801, mais avec une date erronée de mars 1841, ce qui n’est pas souligné dans CG IV p. 594 ni dans NL p. 407; voir CG VIII p. 679.) En outre on connaît deux lettres de Lecomte à Berlioz, toutes deux des lettres de félicitations: CG nos. 1827 (10 décembre 1854, sur la première exécution de l’Enfance du Christ) et 2141bis (tome VIII; fin juin-début juillet 1856, sur l’élection de Berlioz à l’Institut). Le ton des échanges entre les deux hommes est cordial dès le début, et Lecomte appréciait manifestement les mérites de Berlioz. Il était donc naturel que c’est dans l’hebdomadaire Le Monde illustré, fondé par Lecomte en avril 1857, que Berlioz décide de publier à la demande de l’éditeur la série de ses Mémoires d’un musicien en 1858 et 1859.
La lettre dont il s’agit ici est évidemment écrite en réponse à une demande de la part de Lecomte pour quelques autographes de célébrités que possédait Berlioz. Ce n’est pas la première fois qu’on adresse une telle demande à Berlioz. En juin 1839 sa sœur Nancy demande à sa propre sœur Adèle, alors en visite à son frère Hector à Paris, d’essayer de lui obtenir des autographes de personnes avec lesquelles Berlioz entretenait des relations; on ne sait si sa demande réussit ou non (voir ses lettres du 4 juin et 26 juin 1839). En 1852 l’écrivain et critique Xavier Raymond (1812-1886) écrit à Berlioz avec une demande semblable et reçoit en retour une série d’autographes de célébrités: Liszt, Spontini, Jouy, Henselt, Scribe, Andrieux, Rouget de Lisle, A. de Vigny, Horace Vernet, A. Lvoff, et Paganini (CG no. 1444bis [tome VIII; 28 janvier 1852].
Les deux textes dont Berlioz fait don à Lecomte sont mentionnés tous deux et cités dans les Mémoires (chapitre 7 pour la lettre d’Andrieux, en date du 17 juin 1823, reproduit dans CG no. 23, et le même chapitre pour la lettre de Chateaubriand, en date du 31 décembre 1824 et reproduit dans CG no. 38).
La lettre du Roi de Prusse que Berlioz affirme ne pouvoir trouver est sans doute une lettre datée du 23 mars 1844 (CG no. 891bis, tome VIII). Dans ce texte, calligraphié et signé par le roi en personne dans un français impeccable, le souverain remercie Berlioz pour l’envoi et la dédicace de son Grand Traité d’instrumentation et d’orchestration modernes qui venait de paraître à Paris. Voir l’image ci-dessous suivie de la transcription du texte.
La lettre soulève une question intéressante. Les circonstances de cet événement sont présentées en détail dans la page sur Berlioz et Berlin, dans les rubriques sur les années 1842 et 1843. Quand à l’été de 1842 Berlioz achève son Traité il décide, sans doute suivant l’avis du célèbre Alexander von Humboldt, qui jouit d’un grand crédit à la cour de Prusse, d’offrir la dédicace de l’ouvrage au Roi de Prusse, ce qu’il fait au cours de son séjour à Berlin en avril 1843 (CG nos. 820, 823ter). Après son retour à Paris il envoie vers la fin de l’année des exemplaires de l’ouvrage à Berlin, dont un est destiné au roi (CG nos. 873, 877). Le roi le remercie dans la lettre dont il est question ici, lettre que Berlioz mentionne à sa sœur Nancy quelques semaines plus tard (CG no. 902, 19 mai).
Une lettre autographe d’un des plus éminents souverains de l’époque est une chose rarissime: d’ordinaire rois et empereurs ne correspondent pas en personne avec des roturiers mais par des intermédiaires (cf. nos. 991, 1106, 1108). L’existence de cette lettre attise la curiosité de collectionneurs d’autographes tels que Xavier Raymond et Jules Lecomte, mais dans les deux cas Berlioz affirme ne pouvoir retrouver la lettre (CG nos. 1444bis, 1759). L’original existe cependant et se trouve maintenant au Musée Hector-Berlioz à La Côte-Saint-André (numéro d’inventaire R96.231); il est reproduit ici avec l’autorisation du Musée ce dont nous le remercions. Il forme partie de la collection Chapot, ce qui indique qu’il est parvenu au Musée avec un lot de lettres adressées au compositeur que Berlioz a gardé, dont de nombreuses sont des lettres de félicitations (alors que beaucoup d’autres lettres adressées à Berlioz ont disparu). Il en ressort que Berlioz ne dit pas la vérité quand il soutient à ses correspondants qu’il n’arrive pas à retrouver cette lettre: en réalité il tient trop à cet autographe pour être prêt à s’en séparer.
© Musée Hector-Berlioz
J’ai reçu, Monsieur, avec bien du plaisir l’ouvrage sur l’instrumentation que vous venez de faire paraître. J’ai voué un intérêt trop vif à la musique pour ne pas avoir été sensible à l’envoi d’un travail, qui ne saurait manquer de contribuer au progrès d’un art que vous cultivez avec autant de zèle que de succès. En vous remerciant donc de l’attention que vous avez eue de me dédier cet ouvrage, J’ai voulu vous donner une marque de Ma satisfaction et de Ma bienveillance en vous faisant remettre une tabatière d’or accompagnée de la grande médaille destinée à récompenser le mérite scientifique.
à Berlin ce 23 Mars 1844
Monsieur
votre affectionné
Frédéric Guillaume
à Monsieur le Chevalier Hector Berlioz, à Paris.
Site Hector Berlioz créé le 18 juillet 1997 par Michel Austin et Monir Tayeb; cette page créée le 1er avril 2018.
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