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Berlioz à Londres

8 Hinde Street

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Présentation

    Le no. 8 Hinde Street était le domicile de Prosper Sainton; c’est ici que Berlioz dîne avec Wagner vers le 20 juin 1855. Sainton, toulousain d’origine, est une violoniste de talent, établi à Londres; il épousera en 1860 une cantatrice anglaise. L’engagement de Berlioz comme chef d’orchestre avec la New Philharmonic Society à Exeter Hall en 1855 coïncidait avec celui de Wagner avec l’ancienne [Royal] Philharmonic Society à Hanover Square Rooms. Les deux hommes assistent à certains de leurs concerts et se rencontrent plusieurs fois, notamment lors de leur célèbre réunion chez Sainton (photo ci-dessous). Leur rencontre à Londres est connue d’après la correspondance des deux compositeurs et par un passage de l’autobiographie de Wagner (Mein Leben). Les principaux textes sont cités en français et replacés dans le contexte plus large de leurs rapports dans la page Berlioz et Wagner. Citons d’abord des extraits de la lettre de Berlioz à Liszt du 24-25 juin (Correspondance générale no. 1987):

[…] Nous avons beaucoup parlé de toi avec Wagner ces jours-ci, et tu peux penser avec quelle affection, car, ma parole d’honneur, je crois qu’il t’aime autant que je t’aime moi-même.
Il te racontera sans doute son séjour à Londres et tout ce qu’il a eu à souffrir d’une hostilité de parti-pris. Il est superbe d’ardeur, de chaleur, de cœur, et j’avoue que ses violences même me transportent. Il semble qu’une fatalité m’empêche d’entendre rien de ses dernières compositions! le jour où sur la demande du Prince Albert il a dirigé son ouverture du Tanhauser [sic] à Hanovre Square Room, j’étais, à la même heure, forcé d’assister à une affreuse répétition de chœurs pour le concert de la New Philharmonic que j’avais à diriger deux jours après. […] Malgré quelques absences réelles dans l’orchestre les deux premiers morceaux de Roméo ont bien marché. La Fête a même été rendue avec une telle verve que, pour la 1ère fois depuis que cette symphonie existe, elle a été bissée à grands Hurras par tout ce vaste auditoire d’Exeter Hall. Il y a eu beaucoup de fautes dans le Scherzo. […]
Wagner finit demain Lundi avec ceux de Hanovre Square, et se hâtera de partir le lendemain. Nous dînons ensemble avant son concert. Il y a [chez lui] quelque chose de singulièrement attractif, et si nous avons des aspérités tous les deux au moins nos aspérités s’emboîtent […]

    Un peu plus tard, le 5 juillet, Wagner écrit de son côté au même Liszt:

[…] Je rapporte d’Angleterre un véritable profit: une amitié chaleureuse et profonde que j’ai conçue pour Berlioz et qui nous lie tous les deux. J’ai entendu un concert de la New Philharmonic Society sous sa direction, et je dois avouer avoir été peu impressionné par son interprétation de la symphonie en sol mineur de Mozart; quant à l’exécution de sa symphonie Roméo et Juliette, fort médiocre, elle m’a fait pitié. Mais quelques jours plus tard nous étions seuls à dîner ensemble chez Sainton: il était en pleine forme, et les progrès en français que j’ai faits à Londres m’ont permis d’avoir pendant cinq heures une conversation du plus haut intérêt avec lui sur toutes questions se rapportant à l’art, la philosophie et la vie. J’ai ainsi conçu une sympathie profonde pour mon nouvel ami; il me parut tout autre qu’auparavant; nous avons chacun reconnu dans l’autre un compagnon d’infortune et je me trouvai plus heureux que Berlioz. – Après mon dernier concert il est encore venu me rendre visite avec le peu d’amis que me restent à Londres; sa femme y était aussi; nous sommes restés jusqu’à trois heures du matin, et avons pris congé avec de chaleureuses embrassades. […]

    On trouvera des compléments avec une discussion plus approfondie dans la page Berlioz et Wagner.

    Les visiteurs au Site Hector Berlioz sauront qu’Olivier Teitgen a écrit une pièce, L’Entente cordiale, qui prend pour point de départ ce tête-à-tête de Berlioz et Wagner chez Sainton. Leur conversation et les idées exprimées par eux ont été déduites fidèlement des mémoires, de la correspondance et d’autres écrits des deux hommes. Le texte intégral de cette pièce, publié avec la permission de l’auteur, peut être lu en ligne sur une page spéciale du site.

Illustration

    La photo reproduite sur cette page a été prise par Michel Austin en 2001. © Monir Tayeb et Michel Austin. Tous droits de reproduction réservés.

No. 8 Hinde Street en 2001
8 Hinde Street

(Image plus grande)

© Michel Austin et Monir Tayeb pour l’image et les informations sur cette page.

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