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Située au pied de Tivoli, sur le site d’une villa d’époque républicaine ou du temps d’Auguste, la villa fut construite entre 118 et 134 de notre ère par l’empereur Hadrien pour lui servir de résidence de campagne. Elle présentait un raccourci de tout ce que le monde romain connaissait en matière de luxe et de raffinement. Avec une superficie d’environ 18 km2 le somptueux complexe était avec son étalage de jardins plus un parc impérial aux dimensions d’une petite cité qu’une villa traditionnelle. On y trouvait de nombreux bâtiments exotiques, répliques de ceux visités par l’empereur dans la partie orientale de son empire, tels le Canope avec son temple de Sérapis, bordé de statues comprenant des caryatides semblables à celles de l’Érechthée d’Athènes. Les bâtiments sont tous romains de style et de construction, mais avec des noms grecs.
Dès sa première visite à Tivoli le 18 juin 1831 Berlioz est séduit par la Villa Adriana, et il y revient sans doute plusieurs fois lors de visites ultérieures à la ville. Une lettre à sa famille datée du 24 juin raconte en détail sa première visite (CG no. 232):
[…] J’ai vu aussi la villa Adriana, et ces sublimes ruines m’ont rempli de tant de pensées et de sensations que je crois qu’elles ont voulu me dédommager de la non impression de toutes celles de Rome. Figurez-vous une maison de campagne d’une lieue et demi de tour, dans laquelle l’empereur Adrien avait réalisé de véritables rêves. En entrant il y avait un théâtre grec; il n’y a plus que deux colonnes et quelques arcades de l’amphithéâtre, le milieu est un carré de choux; mais il faut rendre justice au propriétaire, c’est le seul endroit cultivé; tout le rest est dans le plus magnifique abandon; le palais impérial, les bains, la Bibliothèque, les pavillons de repos, les cours, sont assez bien conservés pour des ruines; dans les salles des gardes de l’empereur, les éperviers et les milans bâtissent leurs nids; la vallée de Tempé (imitation de celle de la Grèce) est aujourd’hui une forêt de cannes; je n’ai pas pu voir le Tartare, ni les Champs-Elysées, ni beaucoup d’autres choses dont les noms m’échappent, on s’y perd; des murs de six pas d’épaisseur, d’une hauteur prodigieuse, recouverts en stuc, peints à fresques, des tours, des voûtes, des colonnes partout; pas de statues, parce qu’un pape, je ne sais lequel, les a fait enlever pour faire de la chaux; en entrant dans ce monument, je me suis vu pour la première fois en présence de la grandeur romaine, j’étais oppressé, consterné, anéanti. Encore si j’eusse été seul!… Mais patience, ce n’est qu’à une demi-heure de Tivoli, et quand j’y serai etabli, je me permetterai d’y passer la journée quelque fois. […]
Les Mémoires décrivent une autre visite vers la fin d’octobre, quand Berlioz revient de Naples en compagnie de deux Suédois, Bennet et Klinksporn (chapitre 41):
[…] Au-dessous [sc. de Tivoli], à l’entrée de la plaine, je guidai ces messieurs dans le labyrinthe de la villa Adriana; nous visitâmes ce qui reste de ses vastes jardins; le vallon dont une fantaisie toute-puissante voulut créer une copie en miniature de la vallée de Tempé; la salle des gardes, où veillent à cette heure des essaims d’oiseaux de proie; et enfin l’emplacement où s’éleva le théâtre privé de l’empereur, et qu’une plantation de choux, le plus ignoble des légumes, occupe maintenant.
Comme le temps et la mort doivent rire de ces bizarres transformations!
Toutes les photographies modernes reproduites sur cette page ont été prises par Michel Austin en mai 2007; la gravure de 1836 vient de notre collection. © Michel Austin et Monir Tayeb. Tous droits de reproduction réservés.
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