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Genève

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Présentation

    Berlioz visite Genève à deux reprises, mais seulement tard dans sa vie en 1865 (du 18 à environ le 25 août) et en 1866 (15-19 septembre). Selon une lettre de juillet 1858 à sa sœur Adèle (Correspondance Générale no. 2303; ci-après CG tout court), il n’aurait eu que peu de sympathie pour ce ‘pays de Protestants’ où l’on ‘doit s’ennuyer’. Ce qui l’amènera à Genève à ce stade de sa vie est le désir de rendre visite à Mme Estelle Fornier (née Dubœuf); il l’avait rencontré à Meylan en 1815 et en était tombé amoureux à l’âge de 12 ans. Il renouera connaissance avec elle 49 neuf ans plus tard quand il la voit brièvement chez elle à Lyon le 23 septembre 1864, selon les Mémoires. Ils se recontrent ensuite à Genève en 1865. Mme Fornier s’y était installée plus tôt la même année avec son fils Charles Fornier nouveau marié et sa femme Suzanne.

    Au chapitre 3 des Mémoires Berlioz dresse le portrait d’Estelle Dubœuf d’après ses souvenirs de Meylan:

[Estelle] avait dix-huit ans, une taille élégante et élevée, de grands yeux armés en guerre, bien que toujours souriants, une chevelure digne d’orner le casque d’Achille, des pieds, je ne dirai pas d’Andalouse, mais de Parisienne pur sang, et des… brodequins roses!… Je n’en avais jamais vu… Vous riez!… Eh bien, j’ai oublié la couleur de ses cheveux (que je crois noirs pourtant) et je ne puis penser à elle sans voir scintiller, en même temps que les grands yeux, les petits brodequins roses.

En l’apercevant, je sentis une secousse électrique; je l’aimai, c’est tout dire. Le vertige me prit et ne me quitta plus. Je n’espérais rien… je ne savais rien… mais j’éprouvais au cœur une douleur profonde. Je passais des nuits entières à me désoler. Je me cachais le jour dans les champs de maïs, dans les réduits secrets du verger de mon grand-père, comme un oiseau blessé, muet et souffrant. La jalousie, cette pâle compagne des plus pures amours, me torturait au moindre mot adressé par un homme à mon idole.

    Quand Berlioz la reverra enfin à Lyon et ensuite à Genève, sa beauté aura presque complètement disparu, mais ses sentiments pour elle n’ont en rien changé. Après sa visite à Lyon, dans une lettre à la princesse Carolyne Sayn-Wittgenstein datée du 19 octobre 1864 (CG no. 2918), Berlioz écrit:

Les ans ont presque tout détruit en elle, il faut par la pensée reconstruire à peu près entièrement sa splendide beauté ; sa taille de déesse est seule restée ; j’éprouve pourtant à la voir un ravissement si extraordinaire que j’en perds entièrement le sentiment de la réalité…

    Mme Fornier et la famille de son fils habitent tout d’abord au No. 10 Quai des Eaux-Vives (appelé maintenant le Quai Gustave Ador), et déménagent ensuite au milieu de 1866 aux Délices. Cette maison avait appartenu autrefois à Voltaire de 1755 à 1760; elle abrite maintenant l’Institut et Musée Voltaire en l’honneur du grand homme. Estelle occupait la pièce qui avait été la bibliothèque de Voltaire.

    Dans sa lettre du 28 septembre 1866 à sa nièce Joséphine Suat, Berlioz écrit (CG no. 3165):

[…] J’ai trouvé Mme Fornier installée dans une villa bâtie par Voltaire, et qu’on nomme Les Délices. Elle occupe la bibliothèque du grand homme et sa bru et son fils occupent les autres appartements. Il y a un beau parc et des chênes cinq fois séculaires; et cela coûte en tout 1200 fr, et mon appartement de la rue de Calais me coûte 2400 fr. Quelle bénédiction que les chemins de fer! Quand je serai un peu en argent j’irai encore un matin déjeuner avec elle […]

    Pendant ses brefs séjours à Genève Berlioz logera à l’Hôtel de la Métropole (qui existe toujours sur ce qui porte maintenant le nom de Quai Général Guisan), sur les rives du Lac Léman et donnant sur le Jardin anglais et le Pont du Mont-Blanc au-dessus du lac. La demeure d’Estelle sur le Quai des Eaux-Vives n’est pas loin. Berlioz rend visite à la famille chez eux et participe à leurs courtes promenades et randonnées, parfois avec Mme Fornier toute seule. La famille lui fait bon accueil et à la longue se lie d’amitié pour lui.

    Au milieu des années 1860 la maladie et les douleurs intolérables dont Berlioz souffre depuis bien des années se sont aggravées, mais ses courtes visites à Genève pour voir Mme Fornier lui procurent quelque répit et il se sent mieux. Dans une lettre à son fils Louis de l’hôtel à Genève Berlioz dit par exemple:

Je suis arrivé hier et déjà je me sens bien mieux portant qu’à Paris… ma visite à Mme F** m’a fait un bien immense et ce matin à l’heure où les douleurs arrivent elles ont trouvé la porte fermée. Une bonne pensée était là qui me gardait. On m’a reçu dans la famille de Mme Fornier comme j’avais espéré qu’on me recevrait ; on m’engage à venir tous les jours, quand je voudrai. La belle-fille, qui est ravissante, gronde presque sa belle-mère de mettre un peu de gêne et de réserve dans ses façons d’être avec moi ; mais j’espère qu’après quelques visites cette timidité disparaîtra. Je suis logé à l’hôtel de La Métropole sur le bord du lac, en face d’un beau square-jardin. C’est plein d’air et de lumière et je suis à trois pas du quai des eaux vives où demeure la famille Fornier.
(19 août 1865, CG no. 3033)

    Et à son retour à Paris il écrit à Mme Fornier:

J’irai deux ou trois fois l’an vous adorer de près, pendant vingt-quatre heures, vous voir, vous entendre, respirer votre air ; puis je me hâterai de revenir à Paris, fier et heureux comme une abeille qui emporte son butin et, de plus que l’abeille, plein d’une tendre reconnaissance.
(30 août 1865, CG no. 3038)

    De même à la princesse:

L’arrivée à Genève a eu pour résultat de me délivrer radicalement de mes douleurs pendant deux jours : je ne savais comment adorer assez mon cher docteur de son influence magnétique. Mais hélas ! elle a été de courte durée.
(17 septembre 1865, CG no. 3046)

    Et à sa nièce Joséphine un an plus tard:

Je suis allé à Genève ; parti le samedi, arrivé le dimanche, je suis reparti le mardi. Ce n’est pas long, n’est-ce pas ? Je ne te dissimulerai pas que ces deux nuits passées en chemin de fer m’ont fait grand mal. Mais j’eusse été plus malade encore de ne pas faire le voyage.
(28 septembre 1866, CG no. 3165)

    En avril 1867 Mme Fornier revient en France avec sa famille. Charles et sa famille déménagent à Paris pour prendre un nouvel emploi, tandis que leur mère s’installe à Saint-Symphorien d’Ozon près de Lyhon, qui à l’époque fait partie du département de l’Isère, pour vivre avec un autre de ses fils, Henri, qui est sur le point de se marier (CG no. 3232, note 1).

Le Genève de Berlioz par l’image

Avertissement

    Sauf indication contraire les gravures et photos de l’Hôtel de la Métropole et du Quai des Eaux-Vives viennent de Hôtel Métropole Genève, ouvrage commémoratif publié par l’administration de l’hôtel dans les années 1980, dont un exemplaire se trouve dans notre collection. Les originaux de ces gravures et photos appartiennent à l’Office de Tourisme de Genève, la Bibliothèque Universitaire de Genève BPU, des collections privées, et l’hôtel lui-même.

    Nous remercions M. François Jacob, conservateur de l’Institut et Musée Voltaire, de nous avoir envoyé une gravure et une photographie moderne des Délices, prise en hiver, de leur propre collection et de nous avoir accordé la permission de les reproduire sur cette page.

    Les images de l’Hôtel de la Métropole en 1858 et au début du XXe siècle, de l’étiquette de baggage de l’Hôtel Métropole, du Quai des Eaux-Vives, de Genève, et du théâtre de Genève ont été saisies à partir de cartes postales et autres objets de notre collection.

    Les photos du Quai des Eaux-Vives de 2008 ont été prises par M. Vincent Arlettaz que nous remercions bien vivement. Toutes les photos de 2011 sur cette page ont été prises par Michel Austin en mai 2011.

© 2008-2013 Tous droits de reproduction résérvés.

1. Vue générale de Genève

Genève avant 1861
Genève avant 1861

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    La gravure ci-dessus, dont un exemplaire est dans notre collection, fut publiée dans un numéro du Journal Illustré en 1864. Le Pont du Mont-Blanc, qui passe devant l’Île Rousseau entre les deux rives du Lac Léman, fut construit en 1861-1862 (voyez l’image ci-dessous). Ce pont fut démoli en 1903 et remplacé la même année par l’actuel Pont du Mont-Blanc.

Genève en 1863
Genève en 1863

(Image plus grande)

La gravure ci-dessus, dont un exemplaire est dans notre collection, fut publiée à Leipzig dans l’Illustrirte Zeitung du 31 janvier 1863.

Genève en 1890

Genève en 1863

(Image plus grande)

2. L’Hôtel de la Métropole

    Conçu par l’architecte Joseph Collart, l’hôtel devait s’appeler au départ Hôtel des Chemins de Fer; les travaux commencent en 1854 sur le site de fortifications anciennes qui avaient été démolies dans les années 1840. Le 1er avril 1854 les terrains et les bâtiments, toujours en construction, sont vendus à la Societé anonyme de l’Hôtel Métropole; le bâtiment est terminé en 1855. Il comptera parmi ses premiers visiteurs des noms illustres tels ceux de Berlioz, Liszt et Wagner.

    La propriété de l’hôtel a changé de mains plusieurs fois depuis son origine; pendant la deuxième guerre mondiale l’hôtel est mis à la disposition du Comité international de la Croix-Rouge. Le nom de l’hôtel a aussi subi plusieurs modifications: entre autres Hôtel de la Métropole, Grand Hôtel de la Métropole, Hôtel Métropole et National, Hôtel Métropole Genève, et Swissôtel Métropole Genève.

    Remis à neuf en 1954 l’hôtel fait ensuite l’objet d’importants travaux de rénovation et restauration entre 1978 et 1982, et rouvre ses portes en novembre 1982. En 2004, année du 150ème anniversaire de l’hôtel, un autre grand projet de rénovation de l’intérieur, entrepris en 1999, est achevé; l’extérieur du bâtiment n’est pas touché.

L’Hôtel de la Métropole en 1858
Hôtel de la Métropole

(Image plus grande)

La lithographie ci-dessus, publiée à Genève par Briquet & Fils, vient de notre collection.

L’Hôtel de la Métropole entre 1862 et 1864
Hôtel de la Métropole

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    À cause de la construction du Pont du Mont-Blanc sur le Lac Léman, le Jardin anglais est réaménagé en 1862 suivant le plan que l’on voit dans la gravure ci-dessus; la petite tour à gauche de l’hôtel est démolie en 1864.

Hôtel de la Métropole

(Image plus grande)

    La publicité ci-dessus concernant l’hôtel parut dans un journal local en 1868. Elle est reproduite ici d’après Swissôtel Métropole Genève – 150 ans 1854-2004, ouvrage commémoratif publié par l’administration de l’hôtel.

L’Hôtel de la Métropole vers 1876
Hôtel de la Métropole

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L’Hôtel de la Métropole vers la fin du 19ème siècle
Hôtel de la Métropole

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L’Hôtel de la Métropole au début du XXe siècle
Hôtel de la Métropole

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L’Hôtel de la Métropole en 1940
Hôtel de la Métropole

(Image plus grande)

La photo ci-dessus est d’après Swissôtel Métropole Genève – 150 ans 1854-2004, ouvrage commémoratif publié par l’administration de l’hôtel.

L’Hôtel Métropole et National – Étiquette de baggage
Hôtel de la Métropole

(Image plus grande)

L’Hôtel de la Métropole après les rénovations de 1978-1982
Hôtel de la Métropole

(Image plus grande)

La photo ci-dessus est d’après Hôtel Métropole Genève, ouvrage commémoratif publié par l’administration de l’hôtel dans les années 1980.

L’Hôtel de la Métropole en 2011
– maintenant Swissôtel Métropole Genève
Swissotel Métropole Genève

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Le Swissôtel Métropole Genève en 2011
Swissotel Métropole Genève

(Image plus grande)

Le Swissôtel Métropole Genève en 2011
Swissotel Métropole Genève

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Le Swissôtel Métropole Genève en 2011
– vue depuis la fontaine dans le Jardin anglais
Swissotel Métropole Genève

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La fontaine dans le Jardin anglais en 2011
Jardin anglais

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Le Swissôtel Métropole Genève en 2011
– Salon Hector Berlioz
Swissotel Métropole Genève

(Image plus grande)

    Cette image montrant une salle de conférence après les rénovations de 1999-2004 est reproduite ici d’après Swissôtel Métropole Genève – 150 ans 1854-2004, ouvrage commémoratif publié par l’administration de l’hôtel.

3. Les Délices

    C’était la maison de Voltaire pendant son séjour à Genève de mars 1755 à octobre 1760. Berlioz y rendit visite à Mme Estelle Fornier, son fils Charles Fornier et sa famille pendant deux jours en septembre 1866; la famille Fornier y vécut de mai 1866 à avril 1867. Les Délices abritent maintenant l’Institut et Musée Voltaire.

Les Délices
Les Délices

(Image plus grande)

Les Délices en hiver
– maintenant l’Institut et Musée Voltaire
Les Délices

(Image plus grande)

Les Délices en 2011
Les Délices

(Image plus grande)

Les Délices en 2011
Les Délices

(Image plus grande)

Les Délices en 2011
– l’entrée principale de l’Institut et Musée Voltaire
Les Délices

(Image plus grande)

4. Le Quai des Eaux-Vives

    Ce quai se nomme maintenant Quai Gustave Ador, d’après l’homme d’état suisse Gustave Ador (1845-1928), délégué de son pays à la Société des Nations (prédécesseur des Nations Unies), et Président du Comité international de la Croix-Rouge pendant la première guerre mondiale. Le changement de nom a sans doute eu lieu quelque temps après 1937 (voyez la deuxième carte postale ci-dessous).

Le Quai des Eaux-Vives au 19ème siècle
Quai des Eaux-Vives

(Image plus grande)

    Sur cette gravure on aperçoit l’Hôtel de la Métropole à l’extrémité du Pont du Mont-Blanc, quelques immeubles vers la gauche, juste avant le deuxième tournant à gauche et le début du Quai des Eaux-Vives (voyez aussi l’image plus grande).

Le Quai des Eaux-Vives vers 1925
Quai des Eaux-Vives

(Image plus grande)

La carte ci-dessus fut postée le 19 mai 1925.

Le Pont du Mont-Blanc et le Quai des Eaux-Vives vers 1937
Quai des Eaux-Vives

(Image plus grande)

La carte ci-dessus fut postée le 12 septembre 1937.

Le domicile de Madame Fornier
au Quai des Eaux-Vives en 2008
Domicile de Madame Fornier

(Image plus grande)

Le domicile de Madame Fornier
au Quai des Eaux-Vives en 2008
Domicile de Madame Fornier

(Image plus grande)

Nous remercions vivement M. Vincent Arlettaz de nous avoir envoyé les deux photographies ci-dessus prises par lui.

Le Quai des Eaux-Vives en 2011
Quai des Eaux-Vives

(Image plus grande)

Le Quai des Eaux-Vives en 2011
Quai des Eaux-Vives

(Image plus grande)

Le Quai des Eaux-Vives en 2011
Quai des Eaux-Vives

(Image plus grande)

Madame Fornier habitait au No. 10 au centre de l’immeuble dans la photo ci-dessus.

Le domicile de Madame Fornier
au Quai des Eaux-Vives en 2011
Domicile de Madame Fornier

(Image plus grande)

Le domicile de Madame Fornier
au Quai des Eaux-Vives en 2011
Domicile de Madame Fornier

(Image plus grande)

5. Le Théâtre de Genève

    La famille Fornier invite Berlioz à participer à ses promenades et excursions; elles ont pu le mener en direction de l’opéra pour le voir du moins de l’extérieur. L’ancien théatre sera remplacé par la suite par un nouveau bâtiment, conçu d’après le Palais Garnier à Paris par l’architecte Jacques-Elisée Goss. Rebaptisé Grand Théâtre ce nouveau bâtiment ouvre ses portes en 1879. C’est dans ce théâtre que les Troyens (les deux premiers actes seulement) seront représentés pour la première fois à Genève en 1932, sous la direction d’Albert Paychère. Des années plus tard l’œuvre reviendra au Grand Théâtre, mais cette fois dans son intégralité, sous la baguette de John Nelson en 1974 et 2007 (septembre et octobre).

    Les cartes postales ci-dessous montrent le Théâtre de Genève en 1862 et 1880.

Le Théâtre de Genève sur la Place Neuve en 1862
Théâtre de Genève

(Image plus grande)

Le Théâtre de Genève sur la Place Neuve vers 1880
Théâtre de Genève

(Image plus grande)

Site Hector Berlioz créé par Michel Austin et Monir Tayeb le 18 juillet 1997; Page Berlioz à Genève créée le 8 mars 2008 et augmentée le 1er juin 2011. Révision le 1er juin 2023.

© (sauf indication contraire) Michel Austin et Monir Tayeb. Tous droits de reproduction réservés.

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