Festival en l’honneur de Berlioz en 1870 organisé par Ernest Reyer
Compte-rendu par
Francisque Sarcey
paru dans
Le Journal Illustré, 7e année, No. 321, du 3 au 10 avril 1870, page 107
Ernest Reyer, écrivain et compositeur, était un partisan convaincu de Berlioz et de sa musique, du vivant du compositeur et pendant plusieurs décennies après. Un an jour pour jour après la mort du compositeur, le 8 mars 1870, eut lieu le Festival Berlioz à l’Opéra, préparé par Ernest Reyer; le festival attira une foule immense. La réparation définitive commençait.
Voyez aussi sur ce site Festival pour l’anniversaire de la mort d’Hector Berlioz, par Ernest Reyer, publié dans le Journal des Débats du 22 février 1870.
Le texte de cet article et l’image qui l’accompagne sont reproduits ici d’après notre exemplaire original du Journal Illustré.
M. Reyer a organisé à l’Opéra un grand festival, en l’honneur de Berlioz, dans lequel on a exécuté les plus beaux morceaux qu’il ait laissés. M. Perrin lui a prêté son concours pour cette œuvre patriotique. A eux deux ils ont rassemblé, discipliné, exercé douze cents exécutants, réuni des solistes qui se nomment Fautre, Mmes Gueymard, Christine Nilsson, Charton Demeure [sic], Carvalho, Vieuxtemps. Ils ont communiqué leur enthousiasme au public, et la salle de l’Opéra s’est trouvée pleine.
Le septuor des Troyens, le duo de Béatrix [sic] et Bénédict on été entendus avec ravissement. La marche des pêlerins d’Harold a paru ce qu’elle est : une page d’une originalité sublime ; et si d’autres morceaux, comme l’ouverture du Carnaval romain et le duo de l’Enfant [sic] du Christ, n’ont pas produit tout l’effet qu’on avait droit d’en attendre, ce désappointement a été dû à une exécution restée insuffisante, malgré le science et la volonté prodigieuse qu’a déployées M. Ernest Reyer.
Il y a eu des accrocs dans cette représentation. L’orchestre n’avait pas fait assez de répétitions. Ce pauvre Berlioz, qui toute sa vie avait été la victime des artistes, a été encore assassiné par eux après sa mort. Il a lui-même conté fort gaîment l’exécution qu’on fit de son Sardanapale à l’Institut :
« La cantate, dit Berlioz, se déroule sans accident ; Sardanapale se résout à mourir, appelle ses femmes, l’incendie s’allume, on écoute, et les initiés de la répétition disent à leurs voisins :
« — Vous allez entendre cet écroulement ; c’est étrange ! c’est prodigieux ! « Cinq cent mille malédictions sur les musiciens qui ne comptent pas leurs pauses ! Une partie de cor donnait dans une partition la réplique aux cymbales ; les cymbales la donnaient aux timbales ; celles-ci à la grosse caisse, et le premier coup de la grosse caisse amenait l’explosion finale.
« Mon damné cor ne fait pas sa note ; les timbales, ne l’entendant pas, n’ont garde de partir ; par suite, les cymbales et le grosse caisse se taisent aussi ; rien ne part, rien ! les violons et les basses continuent seuls leur impuissant trémolo ; point d’explosion ! un incendie qui s’éteint sans avoir éclaté, un effet ridicule au lieu de l’écroulement annoncé !.. »
Ah ! si Berlioz avait pu faire le compte rendu du festival célébré en son honneur à l’Opéra !
Francisque SARCEY.
Site Hector Berlioz créé le 18 juillet 1997 par Michel Austin et Monir Tayeb; cette page créée le 1er février 2017.
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