1865
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Cette page présente l’image d’une lettre autographe de Berlioz dont nous avons fait l’acquisition en décembre 2011. Cette lettre, jusqu’alors inédite, porte la date du 12 mai 1865; elle est adressée à un fonctionnaire de l’Institut Égyptien. Berlioz y accuse réception d’un diplôme de membre correspondant de cet Institut. Cette nomination était connue jusqu’à présent par deux allusions dans deux lettres de Berlioz à Humbert Ferrand à cette époque. Dans la première Berlioz écrit (CG no. 3001, 26 avril 1865):
[…] J’ai fait votre commission pour de Carné, j’ai porté moi-même le diplôme qui lui était destiné. Maintenant, dites-moi si il faut remercier quelqu’un et qui il faut remercier pour cette nomination à l’Institut d’Egypte; je ne sais rien. […]
L’allusion dans la seconde lettre est encore plus brève (CG no. 3005, 8 mai 1865):
[…] Je vais écrire un peu au hasard au secrétaire de l’Institut d’Egypte, dont le nom est, selon l’usage, illisible. […]
La lettre publiée sur cette page est évidemment la lettre que Berlioz annonce ici, et elle aide à faire comprendre les allusions dans les deux lettres à Ferrand. Voici ce dont il s’agit. La fondation de l’Institut Égyptien remonte à 1798; elle fut créée au Caire par Napoléon Bonaparte au cours de l’expédition française en Égypte. Elle porte alors le titre d’Institut d’Égypte suivant le modèle de l’Institut de France à Paris. En 1801, après le départ des forces françaises, l’Institut d’Égypte suspend ses activités, mais elles sont relancées en 1836 par des érudits français, allemands et anglais sous le nom de The Egyptian Society. En 1859 l’Institut Égyptien, société savante d’inspiration occidentale, est fondé à Alexandrie par des résidents européens sous le patronat du Khédive d’Égypte. Quelques années plus tard l’Institut s’adresse à Berlioz, et sans doute aussi à d’autres personnalités du monde artistique et scientifique européen, pour l’inviter à devenir membre correspondant. En 1880 ses statuts sont révisés et le siège de l’Institut est déplacé au Caire.
Un exemplaire de la constitution de l’Institut datant de 1885 est disponible à la Bibliothèque nationale de France. Selon ce document, l’Institut devait comprendre 50 membres résidents, un maximum de 100 membres honoraires, et un nombre illimité de membres correspondants. Le numéro du Bulletin de l’Institut publié en 1866 donne le nom de Berlioz dans la liste de membres correspondants, et Berlioz y est appelé ‘Membre de l’Institut Impérial de France’ (p. 11). On ne sait si Berlioz a entretenu par la suite une correspondance avec l’Institut après sa nomination.
Sur la même page on trouve le nom ‘CARNÉ (le Vicomte Louis de), Membre de l’Académie Française’. Le Vicomte de Carné (1804-1876) est mentionné une seule fois dans les Mémoires de Berlioz (chapitre 21) à propos des débuts du compositeur dans sa carrière de critique musical: Humbert Ferrand présente Berlioz à de Carné, fondateur avec Ferrand et Cazalès de la Revue Européenne, et le convainc de devenir collaborateur à ce journal. De Carné avait en fait déjà fondé aussi le Correspondant, et il est plusieurs fois question des rapports de Berlioz avec de Carné dans la correspondance du compositeur entre 1825 et 1832 (CG nos. 48, 114, 124, 126, 249, 257, 261). Après cette date Berlioz semble perdre contact avec lui. De Carné poursuit une carrière diplomatique, et écrit aussi de nombreux ouvrages d’histoire; en 1863 il est nommé Membre de l’Institut de France, dont Berlioz faisait partie depuis 1856. Une autre lettre de Berlioz à Humbert Ferrand datée du 8 mars 1866 mentionne de Carné (CG no. 3110): ‘J’ai parlé de vous l’autre jour à l’Institut avec de Carné que je n’avais pas vu depuis 33 ans’ (ceci suppose que lors de la remise du diplôme dont il est question dans CG no. 3001 Berlioz n’a pas rencontré de Carné). Les rapports étroits entretenus par Humbert Ferrand avec de Carné dès les années 1820, et les allusions dans les deux lettres de 1865 citées ci-dessus (CG nos. 3001, 3005), donnent à supposer que Ferrand était intéressé d’une façon ou une autre à la démarche de l’Institut Égyptien envers Berlioz et de Carné, mais on ne sait exactement comment.
Nous avons fait don de l’autographe publié ici au Musée Hector Berlioz à La Côte Saint-André en août 2012; nous avons fait don auparavant au Musée de trois autres lettres autographes de Berlioz, du 16 juin 1832, de mai 1853, et du 17 mai 1854.
Nous remercions M. Antoine Troncy du Musée Hector Berlioz qui nous a mis sur la piste des lettres à Ferrand citées ci-dessus.
La lettre a depuis été publiée dans les Nouvelles lettres de Berlioz (2016) sous le no. 3009bis (p. 623), mais la date de publication, décembre 2011, est donnée par erreur comme étant juin 2015.
Lettre autographe de Berlioz (Numéro d’inventaire au Musée 2014-01-01)
On remarquera que Berlioz emploie l’orthographe sentimens et non sentiments.
Les images ci-dessous viennent de “Google Books”.
Page de titre du Bulletin
Page 11 du Bulletin
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