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LE PREMIER OPÉRA DE BERLIOZ

Par

MICHEL BRENET

paru dans

Courrier de l’Art, 3, 10, 17, 24 septembre; 1, 8 octobre 1886


    «Enfin on va jouer ma musique!» Cette parole amère; prophétie ou sarcasme, de Berlioz mourant, s’est réalisée plus vite peut-être qu’il ne l’aurait pensé. L’enquête de réhabilitation s’est ouverte d’abord au concert; c’est là que depuis quinze ans nous avons vu passer et repasser les trois quarts de son œuvre, sous les yeux d’un auditoire enthousiaste, qui ne se lasse pas d’applaudir ses créations les plus hardies et qui s’intéresse avec presque autant de passion à ses pages les moins heureuses. Il n’est plus maintenant d’amateur de musique qui ne se pique d’avoir entendu au moins la Damnation de Faust; combien sont peu nombreux, au contraire, ceux auxquels la partition des Troyens est un peu familière, ou qui connaissent autrement que par le titre celle de Benvenuto Cellini! Ce premier opéra de Berlioz est pourtant un de ses ouvrages les plus dignes d’intérêt, d’étude et, en bien des points, d’admiration. Tandis que l’on en prépare la reprise à l’Opéra-Comique, nous allons essayer d’en raconter l’histoire accidentée.

I

    C’est pendant son séjour en Italie que le futur auteur de l’Enfance du Christ, caressant de beaux rêves d’avenir, avait commencé à songer au fameux ciseleur florentin dont il avait lu les mémoires. Quand il parcourait les montagnes des Abruzzes, altéré à la fois de travail et d’aventures, l’existence romanesque et accidentée de ce «bandit de génie» lui revenait volontiers à l’esprit. Peut-être, s’il eût vécu en ce beau temps de la Renaissance, eût-il mené la vie orageuse d’un Cellini, plutôt que l’existence calme et sérieuse d’un Palestrina, donnant libre carrière à son humeur bizarre, à son imagination enflammée, quittant l’épée du guerrier pour revêtir le froc du moine, et le rejetant aux orties pour manier la dague du spadassin, enfin ne restant fidèle qu’à une chose: à son art. Cette figure étrange l’attirait et, lorsqu’il revint à Paris, il choisit lui-même les mémoires de Benvenuto pour sujet de son premier opéra.

    Ne se sentant pas assez sûr de son talent d’écrivain pour tenter de se bâtir à lui-même un livret, il s’adressa à Léon de Wailly, qui appela à son aide son ami déjà célèbre, Auguste Barbier, «l’auteur des Iambes». Au bout de peu de temps les deux écrivains apportèrent à Berlioz un poème en deux actes, que le musicien ravi déclara «le plus délicieux opéra-comique qu’on puisse trouver», et aussitôt, avec la confiance de leur âge, les trois jeunes auteurs s’en allèrent frapper à la porte bien fermée de l’Opéra-Comique; Crosnier, qui en était le directeur, les fit entrer non sans défiance, les écouta poliment et les congédia de même, remettant avec soin ses verrous derrière le jeune artiste qui passait déjà et se faisait très volontiers passer pour «un bouleverseur du genre national». On était au mois d’août 1834. Sans balancer, les trois auteurs entreprirent de convaincre Véron, le directeur de l’Opéra; moins franc ou moins résolu que son collègue de l’Opéra-Comique, il hésita, atermoya et, pour ne pas prononcer un refus formel, ajourna la question indéfiniment1.

    Avec le printemps de 1835 la face des choses sembla se renouveler, la direction de l’Académie de musique passa en d’autres mains et l’arrivée de Duponchel au fauteuil quitté par Véron fut pour Berlioz le signal d’une nouvelle espérance. Duponchel, qui ne s’était pas encore révélé à ses yeux comme un «Chinois» ni comme un «Hottentot», admit dès l’abord en principe le sujet et les auteurs, mais il demanda aux poètes des changements importants qui ne pouvaient manquer de retarder la solution définitive de la question. Il fallait en premier lieu transformer, selon l’usage, en récitatifs chantés les dialogues parlés de l’opéra-comique; en outre, une lettre de Berlioz nous le fait deviner, on pratiqua des interversions de scènes, le «chant des ciseleurs» passa du commencement du premier acte au commencement du deuxième. Après quoi le poème entier fut remis à Alfred de Vigny pour «en revoir attentivement les vers». Cette très légère part de collaboration fit croire à quelques personnes que le poète d’Éloa était en réalité l’un des auteurs de Benvenuto Cellini et il arrive à Berlioz lui-même de le nommer, par inadvertance, aux lieu et place de Léon de Wailly, dans une lettre à Humbert Ferrand2.

    Dès le commencement de ses négociations avec Duponchel, Berlioz s’était juré de ne pas se contenter d’une promesse verbale et d’exiger «un bon contrat avec un dédit solide». Au mois d’octobre 1835, il était en possession d’une convention dûment écrite et parafée et il ne lui restait plus qu’à se cuirasser de patience pour attendre le complet épuisement de la liste des ouvrages reçus avant le sien; «II y en a trois malheureusement», écrivait-il; en réalité, on joua quatre grands opéras: les Huguenots, de Meyerbeer; Esmeralda, de Mlle Louise Bertin; Stradella, de Niedermeyer; Guido et Ginevra, d’Halévy, sans compter cinq ballets; il fut même question de faire passer encore, avant Benvenuto Cellini, un opéra en cinq actes d’Auber, sans doute le Lac des Fées, qui fut représenté quelques mois après 3.

    Ces longs délais donnaient à Berlioz plus de temps qu’il n’en avait besoin pour achever sa partition; il l’écrivait d’inspiration, avec un enthousiasme et une sève juvénile qu’il constatait plus tard, ajoutant avec une nuance de regret qu’il ne les retrouverait peut-être plus jamais. Il était dans sa destinée de ne pouvoir pas même jouir en paix de ce plaisir d’écrire qu’il se ressentait si vivement; au plus fort de son travail, il fut forcé d’abandonner sa tâche pour subvenir, à l’aide de ses article de journaux, aux exigences du pain quotidien; là même on voit que son sujet l’obsède: quand il lui prend la fantaisie singulière de se mettre en scène dans une «nouvelle», il se représente sous les traits transparents d’Alfonso della Viola et suppose entre ce musicien et Benvenuto Cellini une correspondance pleine des allusions les plus hardies et les plus étranges à la composition de son propre Requiem et à la situation dans laquelle il se trouvait vis-à-vis du gouvernement à propos de l’exécution de cet ouvrage4.

    Exhaler bien haut son mécontentement, fût-ce sous forme d’allégorie, appeler ses ennemis presque en face «une tourbe de lâches imbéciles», c’était là sans doute, pour l’ardent, l’irascible Berlioz, un plaisir d’un certain prix; mais de telles distractions ne pouvaient pas se prendre tous les jours et il fallait se résigner à la fastidieuse besogne des feuilletons et des comptes rendus, juste au moment où, sur la même table, s’étalaient de grandes feuilles de papier réglé et où se pressaient sous sa plume les mélodies de Benvenuto Cellini! C’était «un crève-cœur indescriptible». Mais bientôt un ami, un véritable ami, que Berlioz s’empresse de nommer, vint mettre fin à ce supplice digne de Tantale, en offrant spontanément au musicien, les ressources nécessaires pour pouvoir congédier journaux et revues et achever en paix les dernières pages de sa partition 5.

    A mesure que semblait se rapprocher le moment tant désiré de la représentation, l’artiste voyait autour de lui s’élever des obstacles et fourbir des armes. Déjà l’accueil tumultueux fait à l’Esmeralda de Mlle Bertin lui avait offert comme un avant-goût de la lutte qui allait se produire. Quelques-unes des causes qui avaient contribué à la chute de cet ouvrage subsistaient pour combattre le sien propre; si la pression du très puissant Journal des Débats avait été d’un utile secours pour faire mettre en répétitions Benvenuto Cellini, cette protection même lui attirait l’animosité d’une coterie hostile à tout ce qui touchait, de près ou de loin, la famille Bertin et l’importante feuille politique dont elle avait la direction.

    En ce temps-là, qui n’est guère éloigné de nous que d’une cinquantaine d’années, la mode du reportage quotidien n’était pas encore inventée, et les gazettes ne décrivaient pas au public, bien longtemps d’avance, par une série d’ «indiscrétions» plus ou moins alléchantes, plus ou moins exactes, les moindres détails d’un opéra inédit. Mais si les plumes des courriéristes ne fonctionnaient pas encore avec l’activité que nous leurs connaissons, il est fort à croire que les mêmes échos et les mêmes conjectures alimentaient largement les conversations journalières dans les groupes d’artistes et d’amateurs que les choses du théâtre et de la musique passionnaient. A plus forte raison quand il s’agissait de l’ouvrage d’un artiste discuté comme Berlioz, dont la musique, les écrits, le langage et jusqu’à l’aspect extérieur, piquaient vivement la curiosité, excitant à la fois des enthousiasmes passionnés, des sympathies ardentes, des critiques acerbes, des moqueries dédaigneuses. Au fond, il était loin de détester le bruit que produisaient autour de lui amis et ennemis; la confusion de ces derniers était une des joies qu’il trouvait dans un succès; homme de lutte, de réforme et d’aventures, il n’était pas fâché d’avoir à déconfire quelques Philistins:

A vaincre sans péril on triomphe sans gloire,

et il ne leur ménageait point, dans ses lettres à des amis, dans ses conversations aussi, les railleries sanglantes et les épithètes sonores que le bon goût ne lui permettait pas de leur dire tout crûment dans ses articles de journaux. Le jour sous lequel ses adversaires s’efforçaient de la peindre ne lui déplaisait pas; il répétait, sans trop y contredire, qu’on le faisait passer pour «un sapeur, un bouleverseur» en musique, et il était presque ravi de constater que Duponchel «tremblait de peur».

    C’est dans ces dispositions réciproques que commencèrent, au printemps de 1838, les répétitions de l’opéra de Berlioz; un compte de dépenses, aux archives de l’Opéra, place au 4 mai la première commande de costumes; une note au crayon, sur la copie du livret conservée aux mêmes archives, nous indique un total de dix-neuf répétitions en scène, dont la première eut lieu le mardi 26 juin. C’est à ce moment que, par un court entrefilet, la Revue et Gazette musicale, journal dévoué à Berlioz, annonce pour la première fois que Benvenuto Cellini est à l’étude6. Deux mois plus tard, la même feuille, s’enhardissant davantage, cite quelques morceaux et affirme «que chaque répétition ajoute à la confiance des artistes7». Il ne faut guère voir dans cette assertion qu’un encouragement, car il résulte au contraire d’autres témoignages que ces études furent pour le compositeur un long supplice; il se voyait mal soutenu par le directeur, hésitant et effrayé, contre la mauvaise volonté ou les taquineries d’un nombreux personnel qui le comprenait peu ou mal, et qui voyait généralement en lui plutôt un fou qu’un apôtre. La critique écoutait aux portes et se préparait à protester: déjà, dans la première moitié de l’année, avait paru, contre ses deux rôles de musicien et de littérateur, un pamphlet de près de cent pages destiné à lui faire entendre raison, à le «ramener à des idées plus saines8 ».  Dans certains journaux, on glissait des allusions, on faisait des réserves à l’avance, on émettait des doutes: «Benvenuto Cellini augmentera-t-il les recettes en appelant la foule? Nous saurons tout cela mercredi, car c’est mercredi le jour du jugement. En attendant, voici quelques indiscrétions de coulisses qui ne laissent pas que de donner de vagues soucis aux séides du système musical de l’auteur: Spontini assistait, il y a une semaine à peu près, à la répétition du premier acte, et il n’a pas admiré! Ceux qui l’entouraient ont été aussi froids que lui9».  Les esprits étaient montés de part et d’autre et l’orage se préparait: à vrai dire, il était attendu quand il éclata, le soir de la première représentation.

    La première représentation fut affichée pour le 3 septembre 1838; mais dans la matinée, par suite d’une indisposition du principal acteur, Duprez, le spectacle fut changé; on joua un acte du Philtre avec le ballet de la Chatte métamorphosée en femme10. La première représentation de Benvenuto Cellini n’eut lieu que le 10 septembre 1838; tous les partis s’étaient donné rendez-vous dans la salle, et la soirée marqua à tous les points de vue dans les annales du théâtre lyrique français. Avant le lever du rideau, on s’entre-regardait, on s’entre-dévorait déjà. Les gens venus pour applaudir, ou même simplement pour écouter, entendaient répéter autour d’eux «que la musique de Benvenuto Cellini était une musique absurde, savante peut-être, mais savante jusqu’à en être inintelligible. L’auteur d’une pareille musique était perdu à tout jamais; il ne se relèverait certes pas d’une telle chute, et c’était là un châtiment bien mérité par tant d’orgueil que de vouloir innover en musique». Et le même écrivain ajoute: «L’œuvre était condamnée aux flammes avant d’avoir été entendue. A telles enseignes que, depuis la première note de l’opéra jusqu’à la dernière, des messieurs que je n’ai ni ne veux avoir l’honneur de connaître, n’ont cessé, dans divers coins de la salle, de se livrer aux plus ravissantes pasquinades, telles que vociférations sourdes, ou cris aigus, ou sifflets prolongés, ou exercices de ventriloque, le tout entremêlé d’éclats d’un gros rire…11».

    Tandis qu’en sortant du théâtre les siffleurs allaient gaiement chanter victoire et préparer leurs feuilletons, à l’opéra, la fièvre des coupures s’emparait du directeur, du personnel et gagnait, bon gré mal gré, les auteurs et le musicien; le crayon bleu et les ciseaux fonctionnaient rapidement, ou plutôt, pour être scrupuleusement exact, disons qu’aux ciseaux l’on substituait un autre outil de tailleur, une aiguille, enfilée de gros fil, à l’aide duquel on cousait solidement ensemble, par douzaines, les pages que l’on comptait sacrifier dans la malheureuse partition; c’étaient comme les clous d’un cercueil où l’on enfermait pour toujours les inspirations du maître, condamnées à mort par la foule. A ce prix, l’on espérait voir se relever l’ouvrage, comme remonte un ballon subitement déchargé de son lest. Ses défenseurs adoptèrent pour leurs articles de journaux une ligne de conduite analogue: on les vit, pour essayer de sauver la partition qu’ils admiraient, jeter par-dessus bord le livret dont ils s’étaient promis monts et merveilles. Ils s’efforcèrent de prouver que les sifflets du premier soir n’avaient visé que les fautes des poètes: «La partition, pour la plus grande partie des spectateurs, est restée intacte; le musicien sain et sauf;» ainsi, du moins, la Revue et Gazette musicale cherche à l’établir, par la plume de Boisselot; dans l’Artiste, Chaudes-Aigues passe condamnation sur le livret tout entier, à commencer par le sonnet imprimé en guise de préface et qui, à son avis, doit être de Léon de Wailly, car il est aussi mal écrit que sa prose d’Angelica Kaufmann; «le musicien n’a été secondé en rien par les poètes », ajoute-t-il; d’Ortigue, à son tour, dans un écrit que nous examinerons plus loin, est presque aussi sévère; il reproche au livret «l’absence-totale d’intérêt positif et d’action dramatique», et, tout en constatant que ce poème «a réellement inspire le musicien » il remarque que celui-ci a payé l’erreur des poètes. Berlioz lui-même, qui, dans le feu d’un premier enthousiasme, avait écrit: «Le libretto est ravissant12», finit par avoir des doutes sur l’habileté de ses collaborateurs: «Leur travail, à en croire même nos amis communs, ne contient pas les éléments nécessaires à ce qu’on nomme un drame bien fait. Il me plaisait néanmoins, et je ne vois pas encore aujourd’hui en quoi il est inférieur à tant d’autres qu’on représente journellement13

    Berlioz avait raison, ses amis avaient tort, peut-être sciemment: ce n’était pas aux scènes de Barbier et Wailly que le public avait déclaré une si rude guerre, mais bien au musicien lui-même; on put s’en convaincre bientôt, et l’attitude de la presse fut à cet égard d’une franchise qui ne pouvait laisser subsister nulle équivoque. Dans quelques comptes rendus, il n’était pas même question du poème, soit qu’on le jugeât indigne d’attention, soit qu’on voulût prouver que la partition seule était en cause. Ouvrons deux des recueils les plus autorisés et les plus répandus de l’époque, nous y trouverons, plus ou moins développés, les mêmes arguments contre le musicien: «Ce que M. Berlioz invente, c’est parbleu bien un art tout entier! En effet, il n’est tenu compte, dans cette musique, ni de la voix du chanteur, ni de la portée d’un instrument; la plus extravagante fantaisie règle tout à son gré et pousse, selon qu’il lui convient, les ténors dans la région des basses, l’ophicléide dans les gammes de la flûte et du hautbois. Cela se passe en dehors de toutes les lois reconnues de la mesure, du rythme et de la mélodie14». – « La partition de M. Berlioz semble un défi porté aux lois essentielles de l’art; il n’y est tenu compte ni de la voix, sacrifiée sans cesse aux prétentions turbulentes de l’orchestre, ni du rythme, cet irrésistible moyen d’action, cette musique innée qui trouve son écho dans toutes les poitrines... Je défie qu’on cite en musique une tradition glorieuse que M. Berlioz ait respectée. La mélodie, le rythme, la voix humaine? Pour la mélodie, la plupart du temps elle lui échappe, et si d’aventure il la tient dans ses mains, c’est pour la torturer sous les tenailles d’un rythme de fer, avec la joie barbare d’un enfant qui plume un oiseau. Comme tous les caractères désorganisateurs, M. Berlioz a le génie de la destruction; il trouve moyen d’en finir en une fois avec la mélodie et le rythme, et d’anéantir l’un par l’autre ces deux éléments essentiels de toute musique. Quant à la voix humaine, il lui ôte du premier coup sa fière indépendance, son allure hardie, ses élans vers le ciel, et la soumet à la domination brutale de l’orchestre: la voix humaine ravalée au niveau d’un violon ou d’un trombone, plus bas encore!15»

    Ainsi, cette chute bruyante était bien vite approuvée, et peu s’en fallait que devant l’arrêt du public on ne criât «Laissez passer la justice du roi!» La Revue de Paris poussait un soupir de satisfaction: «Enfin M. Berlioz a eu sa soirée!» et la Revue des Deux-Mondes lui donnait la réplique: «Pour les Titans qui escaladent le ciel sans en rapporter le feu sacré, notre époque a le ridicule: fâcheux vautour qui vaut bien celui de Prométhée.» Il y aurait bien des choses à citer en ce genre; mais ceux qui nous font l’honneur de nous suivre se lasseraient plus vite de lire que nous de transcrire et de commenter. Aux critiques directes de l’œuvre se mêlaient, dans la plupart des journaux, de graves dissertations sur toutes sortes de points fort sérieux de la théorie et de l’esthétique musicales; comme il arrivait souvent que les plus «savantes» de ces réflexions ne provenaient pas précisément des musiciens les plus instruits, les amis et les défenseurs de Berlioz se donnaient toutes les peines imaginables pour définir, la mélodie, le rythme, l’unité, la forme, l’expression: toutes choses connues depuis un certain temps, mais qu’on recommence à discuter tous les vingt ou vingt-cinq ans. Berlioz, écrivant à Ferrand, comptait ses partisans, dont la liste n’était pas longue: «Les journaux pour, dit-il, sont la Presse, l’Artiste, la France musicale, la Quotidienne, les Débats16».

    Les colonnes d’une feuille périodique, fût-elle la plus complaisante, n’offraient pas aux admirateurs du maître un espace assez large pour développer à fond sa défense; l’un des plus convaincus et des plus dévoués d’entre eux n’hésita point à écrire et à publier, sur Benvenuto Cellini, un volume tout entier de trois cent soixante-dix pages17: ce n’était pas tout à fait un in-quarto pareil à ceux que se jetaient à la tête autrefois, dans la docte Allemagne, à propos de solfège, de théorie ou de critique, Mattheson, Buttstedt, ou Biedermann; mais c’était beaucoup plus que les minces brochures dans lesquelles les Parisiens du XVIIIe siècle débattaient la fameuse question des écoles nationales, des Italiens et des Français, de Gluck et de Piccini. Pour d’Ortigue et les Berliozistes, l’ennemi, c’était encore l’Italie, et les fauteurs de la chute de Benvenuto Cellini, admirateurs intransigeants de Rossini et de Donizetti, semblaient descendre en ligne directe de ces «dilettanti» du temps de Louis XVI, dont les oreilles saignaient en entendant Alceste. Il est aisé de faire profession d’éclectisme et de tolérance quand il s’agit des œuvres du passé: pour le présent, c’est autre chose; chez nous, nous avons si peur de ce qui sort des modèles reçus et des sentiers battus, que nous avons fait du mot «original» un terme de raillerie. D’Ortigue perdait donc ses peines à vouloir prêcher raison à des gens que le temps seul pouvait convaincre. Par malheur, cet unique moyen de persuasion fit défaut à Benvenuto Cellini, dont nous avons à suivre les aventures.

II

    Au prix des coupures dont nous avons parlé, les auteurs et la direction avaient pu remettre sur pied le malheureux opéra; la seconde représentation avait eu lieu le 12 septembre, la troisième, le 14; soit qu’on eût réussi à prouver aux habitués de l’Académie de musique que Berlioz n’était pas dépourvu d’imagination, qu’en écoutant bien, l’on trouverait dans sa partition des mélodies, que ces mélodies ne se passaient pas absolument de rythme, que les dissonances dont on parlait tant ne se substituaient pas d’un bout à l’autre aux tierces et aux sixtes si chères aux oreilles italiennes, qu’enfin le violon ne cédait pas sa place au trombone, ni le hautbois à la trompette; – soit que Mme Dorus-Gras, Mme Stolz, dans les rôles de Teresa et d’Ascanio, Alizard dans celui de Balducci (qu’il venait de reprendre à Dérivis), eussent redoublé d’efforts et de talent; – soit que tout simplement il y eût un peu moins d’adversaires ou un peu plus de partisans dans la salle, – toujours est-il que l’on ne sifflait plus, mais que l’on commençait à applaudir18. Il y avait donc encore quelque espoir de voir l’ouvrage se relever et obtenir une série d’auditions suffisante pour permettre aux gens de bonne volonté de l’étudier et de le comprendre: un critique en demandait dix. Mais au sortir de la troisième représentation, qui s’était terminée par un accident d’exécution, Duprez rendit son rôle de Cellini et l’opéra fut retiré faute de ténor, personne à ce moment ne se trouvant en état de remplacer le principal interprète. Cette étrange retraite excita dans les journaux, même les moins prévenus en faveur de Berlioz, une surprise et une indignation générales. Le Monde dramatique, qui n’avait pas épargné au musicien ses critiques, traitait l’acteur avec une assez rude franchise: «Duprez vient de se permettre un coup d’État à l’Opéra... Pourquoi cela? me direz-vous. Parce que notre ténor n’était pas applaudi, bissé, redemandé après la pièce et couronné comme un triomphateur romain. Cette orgueilleuse boutade est un outrage direct envers Berlioz, une grave insulte envers le public et une révolte trop hardie envers le directeur. Si on ne s’était pas donné la ridicule manie de traiter Duprez en grand homme, quand Duprez a daigné succéder à Nourrit, rien de tout cela ne serait arrivé19». L’Artiste, rendu plus sévère par son admiration pour l’œuvre abandonnée, disait: «C’est une fuite honteuse et une mauvaise action.» D’Ortigue, affectant de ne point nommer le chanteur et sans parler de sa retraite, n’épargne à son talent aucune des critiques que la froideur du public aurait pu lui faire entrevoir20. Cherchons, comme nous le conseille M. Adolphe Jullien, dans les souvenirs de Duprez, «ce que le vieux ténor impénitent dit de Benvenuto Cellini21». Le chanteur ne parle pas de l’abandon subit de son rôle qui lui fut tant reproché, et il s’excuse par le récit d’un événement de famille, du désordre où il entraîna l’un des derniers morceaux: «On sait que le talent de Berlioz, d’ailleurs excellent musicien, n’était pas précisément mélodique. Lorsqu’on s’embrouille dans cette musique compliquée et savante, il n’est pas facile de se retrouver…». Berlioz jouait de malheur avec Duprez: un deuil profond était venu frapper le ténor au cours des répétitions, et voici que, pendant la troisième représentation, Mme Duprez mettait au monde un fils, dont la naissance, en comblant de joie son mari, lui fit «perdre la tête» et le fil de son rôle22.

    Pendant trois mois, Alexis Dupont étudia le rôle, et les affiches de l’Opéra annoncèrent la reprise incessante d’un ouvrage que certainement le craintif Duponchel pouvait croire ensorcelé; enfin, le 11 janvier 1839, Benvenuto Cellini reparut sur la scène. Bien peu de semaines s’étaient écoulées depuis ce fameux concert après lequel Paganini, enthousiasmé, avait envoyé à Berlioz la lettre si connue et le chèque de 20,000 francs. Le triomphe du compositeur n’eut point d’écho dans la salle de l’Opéra, et l’on arriva péniblement à donner encore trois auditions du premier acte seul, accompagné de la Gipsy ou du Diable boiteux: annoncé encore une fois le 3 mai sans être joué, Benvenuto Cellini rentra dans le sommeil et le silence. L’argent, qui est le nerf de la guerre, est aussi le grand ressort des directions théâtrales: or, l’opéra de Berlioz ne faisait pas d’argent23. Que pouvait-on opposer à cela?

    Parmi les spectateurs de ces rares soirées se trouvait un cœur chaud d’artiste chez qui l’impression des beautés de l’ouvrage devait rester profondément gravée. Au lendemain de la reprise de l’opéra de Berlioz, Franz Liszt avait laissé déborder son enthousiasme dans une des «Lettres d’un bachelier en musique», qu’il écrivait pour la Revue et Gazette musicale; c’était un parallèle entre Berlioz et le héros de son opéra, Cellini, puis même entre Berlioz et le héros de Cellini, Persée: «Honneur à toi, Berlioz, car toi aussi tu luttes avec un invincible courage, et si tu n’as pas encore dompté la Gorgone, si les serpents sifflent encore à tes pieds en te menaçant de leurs dards hideux; si l’envie, la sottise, la malignité, la perfidie, semblent se multiplier autour de toi, ne crains rien, les dieux te sont en aide; ils t’ont donné, comme à Persée, le casque, les ailes, l’égide et le glaive: c’est-à-dire l’énergie, la promptitude, la sagesse et la force. Combat, douleur et gloire, destin du génie24

    Le grand virtuose ne devait pas se borner à de belles paroles, et Berlioz put éprouver, par des actes, jusqu’à quel point ses œuvres avaient conquis l’admiration et le dévouement de Liszt. En 1852, après de longs voyages accomplis comme pianiste dans toutes les grandes villes de l’Europe, l’artiste hongrois venait depuis peu d’années de se fixer à Weimar, où sa carrière artistique avait pris une direction nouvelle. L’instrument qui lui avait valu de si retentissants succès ne tenait plus dans sa vie que la seconde place. A présent, Kapellmeister de la cour, dirigeant le théâtre et les concerts, il consacrait tous ses soins et la meilleure part de son temps à faire étudier et jouer les partitions de son choix; de toutes façons, ce n’étaient que des productions élevées, choisies souvent parmi les chefs-d’œuvre connus de la scène ou de la symphonie, souvent aussi parmi les créations audacieuses vers lesquelles Liszt était entraîné par son tempérament. Bientôt Weimar devint, entre tous les centres musicaux de l’Allemagne, non seulement un des plus cultivés, mais un des plus «avancés». Berlioz fut un des premiers maîtres que Liszt prit ainsi sous son patronage; dans l’espace de quelques années, presque tout son œuvre défila devant les habitants de la petite capitale, non seulement au concert, mais au théâtre, où Benvenuto Cellini revit le jour, le 20 mars 1852, treize ans et demi après son échec à Paris. Le public à Weimar fut froid, mais non hostile; surpris, mais non malveillant; à la fin de la même année, on célébra, en présence du maître français, une «semaine de Berlioz», pendant laquelle on exécuta deux fois Benvenuto et une fois Roméo et Juliette (du 17 au 21 novembre 1852). «L’entreprise d’introduire l’opéra de Berlioz en Allemagne était, nous dit Richard Pohl, au nombre des plus audacieuses.» Et dans un autre ouvrage, le même écrivain ajoute: «Si nous considérons Benvenuto Cellini d’une manière générale, cet opéra nous semble encore aujourd’hui, malgré quelques défauts, digne d’admiration; mais quand nous réfléchissons qu’il fut composé vers les années 1830-40, il nous apparaît comme un phénomène... Cette œuvre allait à l’encontre de toutes les opinions reçues en matière de musique d’opéra. L’inspiration l’avait dictée; l’originalité respirait dans chaque morceau; partout se montraient le mépris de la mode, un rigide dédain de toute concession antiartistique; la caractéristique musicale du drame s’étendait jusqu’aux plus petits détails; l’orchestre luttait d’importance avec les chanteurs; une magnifique polyphonie, un style presque symphonique enveloppaient toute la partition: et pourtant, on n’annonçait l’ouvrage que comme un opéra «semi-seria», non pas comme un «grand opéra»; pourtant il n’avait pas les cinq actes traditionnels, mais se bornait à deux modestement25…».

    Pour la première représentation à Weimar, Berlioz avait modifié la forme générale de son ouvrage, en le divisant en quatre actes, la traduction allemande était de Riccius; pour la reprise donnée en sa présence, pendant cette «semaine de Berlioz», le maître, supprimant quelques morceaux, disposa l’opéra en trois actes. C’est dans cette forme que, sans doute enhardi par le succès de Weimar, il essaya de le transporter à Londres, où on le joua le 25 juin 1853; les trois rôles principaux étaient tenus par Mmes Julienne Dejean, Nantier-Didiée, et par Tamberlick. Quelques-unes des causes qui avaient entraîné à Paris la chute de Benvenuto Cellini amenèrent son échec à Londres; les «dilettanti» de l’Angleterre se montrèrent aussi hostiles à l’œuvre nouvelle que ceux de France. Encore une fois, Liszt et Weimar se chargèrent de ramener à flot l’opéra brusquement repoussé; une nouvelle traduction allemande, de Peter Cornelius, fut substituée à la première, dont, nous assure-t-on, elle ne différait guère; Berlioz retoucha sur nouveaux frais sa partition; il «l’éclaircit» dans quelques parties trop touffues, et, comme pour marquer que c’étaient là sa forme et ses dimensions définitives, la fit paraître chez les éditeurs Mayer et Litolff, de Brunswick, en partition de piano et chant, avec texte allemand et français26. Une reprise solennelle eut lieu pour une fête de la cour de Weimar (le jour anniversaire de la naissance de la grande duchesse), le 16 février 1856. Depuis cette époque, Benvenuto Cellini reparut de temps en temps sur la scène, où Liszt eut l’honneur de le révéler à l’Allemagne étonnée. Le même auteur que nous venons de citer, M. Pohl, constate que Berlioz avait semé dans son ouvrage tant d’invention et de nouveauté, qu’il l’avait rendu «plus admirable qu’abordable» pour le commun des auditeurs. Mais, en Allemagne, on ne se rebute pas aux difficultés ni aux hardiesses. Si ce fut là que le compositeur de Benvenuto Cellini trouva toujours les auditeurs les plus attentifs, quelquefois les plus admiratifs, c’est là aussi qu’il rencontra souvent les interprètes les plus zélés et les plus dociles. Il devait être ravi, par exemple, de ce Caspari, un ténor qui n’avait aucune note merveilleuse dans la voix, qui n’est pas parvenu à une célébrité européenne, auquel on trouvait même des défauts dans le chant, mais qui n’était jamais fatigué, jamais enroué, qui apprenait extraordinairement vite, chantait tout à première vue, avait autant de sûreté que de bonne volonté et de persévérance, et auquel on vit faire ce prodige, «assurément sans autre exemple dans les annales des ténors», de chanter, dans l’espace de quatre jours, Cellini et Lohengrin, deux rôles entièrement nouveaux pour lui, et, trois jours plus tard, Faust, dans la partition de Berlioz, également pour la première fois! Aussi, combien de fragments, dans les mémoires ou les lettres de Berlioz, qui sont les témoignages de sa joie ou de sa reconnaissance pour les musiciens d’Allemagne! Ces pages nous disent que si le maître est mort trop tôt pour assister parmi nous à la réhabilitation de ses œuvres, il est mort à temps pour éviter les cruelles épreuves de la guerre de 1870 eût fait subir à son âme d’artiste et à son cœur de Français.

    En terminant cette longue étude, tenterons-nous une analyse de l’opéra dont nous avons retracé la carrière agitée? Pour cette musique pittoresque et colorée, plus que pour toute autre, l’exécution est nécessaire; et puisque l’audition que nous appelons de tous nos vœux nous est promise à bref délai, mieux vaut nous abstenir d’une froide et sèche description, basée sur la simple lecture. Ce n’est pourtant pas que les matériaux manquent pour une étude de la partition de Berlioz, et de curieuses comparaisons naissent de l’examen des divers documents.

    C’est tout d’abord la grande partition du théâtre de l’Opéra, volumineuse copie formant cinq gros volumes; selon l’usage du temps, elle ne servit pas au chef d’orchestre pour diriger les représentations de l’ouvrage: il se contentait d’une partition abrégée, ou conducteur, également conservée à la bibliothèque de l’Opéra. Dans un de ses écrits27, Berlioz a pris soin de dire que la partition du théâtre de Weimar et le manuscrit autographe qu’il avait conservé chez lui contenaient les modifications adoptées pour la scène allemande, et représentaient, par conséquent, l’état définitif de l’œuvre; la partition autographe appartient, depuis la mort du maître, à la bibliothèque du Conservatoire de musique. Si cette version, la plus conforme aux intentions du compositeur, doit seule servir de guide pour une reprise de Benvenuto Cellini, elle ne supplée pas, au point de vue historique, à l’examen des précédentes copies: la partition de l’Opéra nous montre l’état primitif de l’ouvrage; le «conducteur» nous fait assister à ses remaniements, le manuscrit du Conservatoire nous donne sa forme dernière. Au point de vue de la forme générale, la réduction pour piano et chant (français), publiée à Paris en 1865, nous présente aussi l’opéra tel que Berlioz l’avait abrégé et remanié pour Weimar. Mais quiconque voudrait se faire de l’ouvrage une juste idée ne pourrait s’y fier qu’à demi; nulle musique n’est peut-être plus rebelle au piano que celle de l’auteur des Troyens; en outre, cette réduction ne satisfaisait pas tout à fait Berlioz, si l’on en juge par les corrections qu’il avait faites sur son exemplaire. On peut le voir à la Bibliothèque nationale28, avec des fautes d’impression, des erreurs de notes, de valeurs, de prosodie, de nuances, corrigées au crayon bleu par le maître, soit dans les marges, soit sur de petits morceaux de papier collés ici et là. M. Ernst, qui a signalé avant nous ces corrections, prit la peine de les compter: il en a trouvé soixante-deux29.

    Ce qui nous frappe tout d’abord à la lecture de ces différentes versions, c’est cette variété extraordinaire d’inspiration, qui permettait ou maître de placer, dans le même ouvrage, les folles gaietés de l’opéra bouffon à côté des larges élans du drame musical et cette «verve impétueuse», qu’il regrettait plus tard comme un don précieux de la jeunesse; ce sont bien les qualités maîtresses de Benvenuto Cellini. Mais si nous revenons sur les pages lues d’abord d’un seul trait, nous y trouvons Berlioz tout entier, dans tout le développement de son génie. Comme le ciseleur de Florence, il a jeté tous les métaux dans le moule incandescent de sa statue: mais si l’étain se mêle à l’or, l’or domine au centuple et brille de son plus vif éclat; comme Persée, rouge du feu de la forge, la partition se dresse devant nous, chaude encore, après cinquante ans, de l’ardeur de l’inspiration et du travail.

    Au lendemain de la chute de l’ouvrage, Jules Janin écrivait à Berlioz une lettre où il blâmait le public de n’avoir pas su «reconnaître Cellini pour un frère de Fidelio». Depuis lors, Liszt a repris la même comparaison: «Il existe, de notre temps, un second Fidelio, une œuvre haute et puissante conception. Son heure n’a pas encore sonné. Mais un jour on le reconnaîtra pour une des œuvres les plus importantes de notre temps; on l’admirera, et le théâtre de Weimar s’honorera d’avoir été le premier à le tirer de l’oubli.30» Pour nous, l’analogie des deux ouvrages ne nous a jamais frappé, et nous dirons même qu’il nous semblerait plus facile d’en marquer les dissemblances que les ressemblances. Au contraire, le rapprochement que M. Ernst a esquissé entre Benvenuto Cellini et les Maîtres chanteurs nous semblerait de nature à fournir, comme poème et même comme musique, d’intéressants développements31.Fidelio a déjà quatre-vingts ans; Cellini en a près de cinquante; les Maîtres chanteurs, pas encore vingt: combien faudra-t-il encore d’années ou de quarts de siècle avant que ces trois partitions soient également familières au public parisien?

    C’est l’opéra du maître français qui se présentera le premier au jugement de la génération actuelle; laissons au spectateurs de 1886 le plaisir de discerner eux-mêmes les mérites d’un ouvrage où les beautés fourmillent, et d’applaudir, bruyamment sans doute, le chef-d’œuvre sifflé par leurs pères.

MICHEL BRENET

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Notes :

1. Berlioz, Lettres intimes, pages 151, 155.

2. Berlioz, Lettres intimes, pages 164, 167.

3. Berlioz, Lettres intimes, page 175. – Revue et Gazette musicale du 23 avril 1837.

4. La nouvelle le Premier Opéra fut publiée dans la Revue et Gazette musicale des 1er et 8 octobre 1837. Chacun peut la lire dans les Soirées de l’orchestre. On trouvera dans le livre de M. Hippeau, Berlioz intime (Paris, Fischbacher, 1883, in-8o), pages 350 et suiv., des détails sur ce curieux épisode.

5. Berlioz, Mémoires, tome Ier, page 334, de l’édition in-18.

6. Revue et Gazette musicale du 10 juin 1838.

7. Idem, du 5 août 1838.

8. Voici le titre de cet écrit, entièrement consacré, dit Fétis, «à une critique amère des talents de Berlioz»: Chronique musicale de Paris, par Joseph Mainzer, première livraison; Paris, 1838, in-8o de 95 pages. Dans la préface, l’auteur explique qu’il se réserve de publier les livraisons suivantes à des époques irrégulières, selon l’occasion ou les besoins de l’art; elles ne parurent jamais, faute d’occasions sans doute: on n’a pas tous les jours un homme à déchirer.

9. Le Monde dramatique du 26 août 1838, tome VII, page 128.

10. Archives de l’Opéra, registre des recettes. – Le Courrier des théâtres du 4 septembre 1838.

11. L’Artiste, 2e série, tome Ier, page 313: Analyse de Benvenuto Cellini, par Chaudes-Aigues.

12. Lettres intimes, page 165, 2 octobre 1835.

13. Mémoires, tome Ier, page 328.

14. Revue de Paris, septembre 1838; tome LVII, page 211.

15. Revue des Deux Mondes du Ier octobre 1838: De l’École fantastique et de M. Berlioz, par Henri Blaze.

16. Lettres intimes, page 182. On retrouvera le feuilleton de Théophile Gautier sur Benvenuto Cellini dans l’Histoire de l’art dramatique depuis vingt-cinq ans, publiée chez Hetzel, s. d., tome Ier, pages 171-174.

17. De l’École musicale italienne et de l’Administration de l’Académie royale de musique, à l’occasion de l’opéra de M. H. Berlioz, par M. Joseph d’Ortigue; à Paris, impr. Pollet, 1839; in-8o, XXII-347 pages. – Nous demandons la permission de consacrer à ce volume une note un peu longue. Le livre, ou plutôt le pamphlet de d’Ortigue, qui porte au titre le millésime de 1839, est daté, à la fin de la préface, du 20 décembre 1838: il fut donc écrit entre le moment de la première apparition de Benvenuto Cellini et celui de sa reprise, en janvier 1839. Après cette seconde épreuve, négative comme la précédente, d’Ortigue remit son travail sur le chantier et le fit paraître de nouveau sous un titre plus général: Du Théâtre italien et de son influence sur le goût musical français; Paris, 1840. Les changements apportés au moyen de cartons se réduisent à ceci: la préface, qui était une lettre à Léon Kreutzer sur Benvenuto Cellini, est remplacée par une lettre au même sur Roméo et Juliette. – Dans le chapitre V (De l’administration de l’Académie royale de musique), quelques pages très vives sur la chute de Benvenuto sont remplacées par des considérations générales. L’épigraphe est changée. – Mais la pagination n’est pas modifiée et les fautes d’impression de la première édition ne sont pas corrigées.

18. Revue et Gazette musicale du 18 septembre 1838.

19. Le Monde dramatique du 23 septembre 1838.

20. D’Ortigue, De l’École musicale italienne, etc., pages 67, 112, 113, 137.

21. Ad. Jullien, Hector Berlioz, la vie et le combat, les œuvres; Paris, Charavay, 1882, in-18; page 24.

22. Duprez, Souvenirs d’un chanteur; Paris, Lévy, 1880, in-18; pages 153, 154.

23. Le tableau des recettes de Benvenuto Cellini est assez instructif, et nous croyons utile de le reproduire, d’après le registre des Archives de l’Opéra: 

1re représentation, le 10 septembre 1838 5,949 fr.40
2e représentation, le 12 septembre 1838  2,733 20
3e représentation, le 14 septembre 1838  2,923 20
4e représentation, le 11 janvier 1839 2,947 10
5e (le Ier acte avec la Gipsy), le 20 février 1839  4,426 80
6e (le Ier, acte avec la Gypsy), le 8 mars 1839 3,126 
7e (le Ier acte avec le Diable boiteux), le 17 mars 183 9 4,153 20

Ces chiffres ont besoin d’un point de comparaison qu’il est facile de fournir: les 19, 21 et 23 septembre 1838, on fait 7,291 fr. 10, 4,847 fr. 80 et 8,801 francs de recette avec Guillaume Tell, le Philtre, la Sylphide, les Huguenots; le 13 janvier 1839, 5,650 fr. 20 avec la Juive; le 24 février, 7,023 fr. 70 avec le 4e acte de Gustave et la Gipsy. Tous ces chiffres sont ceux de la recette journalière à la porte, en dehors des abonnements.

24. Revue et Gazette musicale du 13 janvier 1839.

25. Richard Pohl, Franz Liszt; Leipzig, 1883, in-8o, pages 146, 150 (tome II des Gesammelte Schriften über Musik und Musiker de l’auteur); – Hektor Berlioz, Studien und Erinnerungen, Leipzig, 1884, page 124 (tome III idem). – voici, d’après le premier de ces ouvrages, la liste des productions de Berlioz exécutées à Weimar sous la direction de Liszt, en plus de Benvenuto Cellini: Harold en Italie; Faust (deux fois); Roméo et Juliette (deux fois); – Symphonie fantastique; – le Retour à la vie; l’Enfance du Christ; – Ouvertures du Roi Lear (deux fois), de Waverley, de Cellini (cinq fois), du Carnaval romain (six fois), des Francs-Juges (trois fois); – la Captive.

26. Une édition française a été publiée à Paris en 1865.

27. Les Grotesques de la musique, page 319.

28. Sous la cote Vm 759 BfHa.

29. A. Ernst, L’Œuvre dramatique d’Hector Berlioz; Paris, Lévy, 1884, in-18, page 118.

30. R. Pohl, Hektor Berlioz, Studien und Erinnerungen, page 128.

31. A. Ernst, L’Œuvre dramatique d’Hector Berlioz, page 112.

Nous remercions vivement notre ami Gene Halaburt de nous avoir envoyé cet article. M. Halaburt est en possession d’un exemplaire original de cet article, publié en 1886.

Voyez aussi Benvenuto Cellini, Ouverture: Benvenuto Cellini et Ouverture: Le Carnaval Romain ailleurs sur ce site.

Site Hector Berlioz créé le 18 juillet 1997 par Michel Austin et Monir Tayeb; cette page créée le 11 juillet 2003.

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